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Macédoine

Retour au pouvoir de la droite nationaliste

32% des voix pour le VMRO-DPMNE : un triomphe personnel pour le nouveau chef de ce parti, Nikola Gruevski. 

		(Photo : AFP)
32% des voix pour le VMRO-DPMNE : un triomphe personnel pour le nouveau chef de ce parti, Nikola Gruevski.
(Photo : AFP)
Au terme d’un scrutin qui s’est déroulé sans incidents majeurs, le VMRO-DPMNE revient au pouvoir. La représentation parlementaire des partis albanais, divisés, sera minorée. Cette nouvelle donne pourrait remettre en question la stabilité du pays, qui dépend toujours de l’application des accords de paix d’Ohrid, conclus en août 2001.

De notre envoyé spécial à Skopje

La droite nationaliste macédonienne revient au pouvoir, dont elle avait été chassée en 2002, un an après le conflit armé qui avait déchiré le pays. L’Organisation révolutionnaire intérieure de Macédoine – Mouvement démocratique pour l’unification nationale macédonienne (VMRO-DPMNE), héritière des mouvements de résistance à l’occupant turc du début du XXe siècle, a obtenu une victoire sans appel aux élections législatives de mercredi. C’est un triomphe personnel pour le nouveau chef de ce parti, Nikola Gruevski, 35 ans, qui affiche un profil ultra-libéral, et assure que son parti a rompu avec le romantisme nationaliste qui le caractérisait autrefois.

Avec 32% des voix, selon les premiers résultats officiels, le VMRO-DPMNE pourrait compter sur une cinquantaine des 120 sièges du futur Parlement, contre une grosse trentaine pour les sociaux-démocrates (SDSM) du Premier ministre sortant, Vlado Buckovski, crédités de 23%. Les ultra-nationalistes du VMRO-Parti national, scission du VMRO-DPMNE, pourraient aussi tabler sur 9 députés. Le marasme économique et social du pays semble donc avoir convaincu les électeurs de tenter l’expérience d’une nouvelle alternance.

L’Union européenne s’est félicitée d’un scrutin qui s’est déroulé sans incidents majeurs, même si un certain nombre d’irrégularités ont été signalées, surtout dans les zones albanaises du pays : des hommes votaient parfois pour toute leur famille, des électeurs n’avaient pas de carte d’identité. Alors que la Macédoine a, depuis l’automne dernier, le statut officiel de pays candidat, l’UE devrait désormais probablement exercer des pressions pour la formation d’un gouvernement de coalition incluant des représentants albanais.

Partie serrée dans le camp albanais

C’est en effet dans le camp albanais que la partie a été la plus serrée. Les deux principaux partis de cette minorité qui représente un quart de la population totale du pays arrivent au coude à coude. L’Union démocratique pour l’intégration (BDI), qui participait à la coalition gouvernementale dirigée par les sociaux-démocrates, obtiendrait 12 mandats parlementaires, contre 11 au Parti démocratique des Albanais (PDSH), qui pourrait s’allier au VMRO-DPMNE, avec qui ce parti était déjà en coalition de 1998 à 2002.

De toute manière, les Albanais auront moins de représentants que dans la précédente assemblée, ce qui s’explique par leur faible mobilisation : dans les zones albanaises, la participation n’a souvent pas dépassé 40% des inscrits. Cette relative sous-représentation des Albanais dans le futur Parlement n’est assurément pas de bon augure pour la stabilité du pays, toujours suspendue à l’application des accords de paix d’Ohrid, qui ont mis fin au conflit armé de 2001.

Les anciens commandants de la guérilla albanaise de l’UCK-M avaient majoritairement rejoint les rangs du BDI, et devraient donc désormais se retrouver dans l’opposition, tandis que le PDSH a connu ces dernières années une forte radicalisation, en se prononçant explicitement pour la division ethnique de la Macédoine. Ce parti est également très lié à de puissants intérêts mafieux.

L’avenir suspendu au sort du Kosovo

La stabilité de la Macédoine sera de toute manière dépendante des évolutions dans le Kosovo voisin. Le Premier ministre social-démocrate Buckovski avait privilégié une approche pragmatique, en choisissant un dialogue direct avec les dirigeants albanais du territoire placé sous protectorat des Nations unies, notamment sur des questions cruciales comme la définition des frontières, qui n’avaient jamais été précisées depuis l’éclatement de la Fédération yougoslave. On ignore si le VMRO-DPMNE poursuivra la même politique.

Alors que les militants les plus radicaux envisagent toujours une « unification nationale » des « terres albanaises » des Balkans, qui impliquerait un démantèlement de la Macédoine, la stabilité de ce petit pays demeure une clé majeure des équilibres régionaux. De ce point de vue, il n’est pas certain que les résultats du scrutin de mercredi soient une très bonne nouvelle.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 06/07/2006Dernière mise à jour le 06/07/2006 à TU