Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Proche-Orient

Israël canonne, les diplomates tatonnent

De gauche à droite : Condoleezza Rice, Kofi Annan et Javier Solana. Les  manœuvres diplomatiques se poursuivent, mais sans grand résultat pour le moment. 

		(Photo : AFP)
De gauche à droite : Condoleezza Rice, Kofi Annan et Javier Solana. Les manœuvres diplomatiques se poursuivent, mais sans grand résultat pour le moment.
(Photo : AFP)
Au septième jour de guerre, Israël parait plus que jamais déterminé à liquider le Hezbollah. Rien ni personne, ne semble pouvoir, ou vouloir, l’arrêter. Ni le sommet du G8, ni les déclarations américaines ou européennes, ni les divergences de la Ligue arabe ne risquent d’entamer la marche en avant de l’Etat hébreu.

Loin de diminuer en intensité, les attaques israéliennes sur le Liban sont à l'inverse de plus en plus massives. Alors que la guerre entre dans sa deuxième semaine, les espoirs d’un règlement par la voie diplomatique ont été jusque là déçus. Au contraire, le feu vert donné implicitement par les Américains, qui refusent d’appeler à un arrêt des attaques d’Israël contre le Liban, laisse les mains libres à l’Etat hébreu pour poursuivre son offensive. Selon des révélations du quotidien britannique le Guardian, les Etats-Unis auraient donné un délai d’une semaine supplémentaire aux Israéliens, fixant une date butoir, précisent des sources européennes, de peur de perdre le contrôle en cas de conflit prolongé. Cela expliquerait en partie, pourquoi les Américains rejoints par les Britanniques, se sont abstenus d’appeler à un cessez-le-feu lors du sommet du G8 de Saint-Pétersbourg, comme au Conseil de sécurité de l’ONU ou à la réunion des ministres européens des Affaires étrangères. Prudent néanmoins, le président Bush a quand même décidé mercredi d'envoyer des soldats au Liban pour protéger les citoyens et les intérêts américains. 

Les critiques formulées par l’Union européenne, et particulièrement par la France, sur le côté «disproportionné» de sa riposte n’impressionne guère Israël. Sa détermination est au contraire renforcée par son opinion publique qui, ce mardi, affirmait à 86%, soutenir les opérations aériennes et navales de Tsahal dirigées contre le territoire libanais. La très grande majorité des Israéliens juge encore que la réaction de son gouvernement n’est pas disproportionnée et que la menace que fait peser le Hezbollah sur le nord du pays doit être éliminée une fois pour toutes. Concernant ce dernier point, Israël estime complètement légitime ses actions contre la milice chiite libanaise, d’autant plus que le désarmement de celle-ci figure noir sur blanc dans la résolution 1559 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée en 2004 à l’unanimité et restée depuis lettre morte.

Un recul de 50 ans

Il faut appliquer la résolution 1559, a martelé le Premier ministre israélien Ehud Olmert aux trois émissaires de l’ONU, de passage à Jérusalem, après avoir rencontré le Premier ministre libanais Fouad Siniora. De plus en plus impuissant, ce dernier n’a pu qu’implorer les pays arabes et la communauté internationale d’œuvrer à un cessez-le-feu immédiat, accusant Israël de vouloir «ramener le Liban 50 ans en arrière». Le Conseil de sécurité de l’ONU devait entendre son secrétaire général, Kofi Annan, qui lui transmettra les résultats de la mission de médiation menée par les trois envoyés de retour d’Israël et du Liban. Si le cessez-le-feu n’est de toute évidence plus à l’ordre du jour, la diplomatie internationale se raccroche au principe de l’envoi d’une mission internationale de surveillance au Sud Liban, suivant la demande du G8 formulée au Conseil de sécurité.

Mais là encore, l’assentiment de chacun est loin d’être acquis. A commencer par l’ambassadeur américain à l’ONU, John Bolton, qui estime que le Conseil de sécurité n’a pas à débattre de cette question avant de savoir comment le conflit entre Israël et le Hezbollah va être résolu. Cependant, le patron de l’ONU, Kofi Annan prêche pour le déploiement d’une telle force de stabilisation au Sud Liban. Cette force devrait être composée de suffisamment d’hommes et de moyens pour «donner le temps» à un désarmement du Hezbollah dont les combattants sont déployés à la frontière depuis le retrait israélien en 2000. Le déploiement de cette force n’a pas soulevé d’hostilité à Tel-Aviv qui souhaite plus que jamais l’éloignement des milices du Hezbollah loin de sa frontière. 

Un aveu d’impuissance

L'idée de déployer une force tampon est toutefois accueillie avec réserves par les Européens, comme a pu le constater mardi Kofi Annan, de passage à Bruxelles. Il en a profité pour préciser ce que serait ce dispositif d’interposition : «Je souhaiterais une force plus importante que la force actuelle de 2 000 hommes de la Finul dont le mandat s’achève fin juillet, sur un constat d’échec a-t-il indiqué. Mais le secrétaire général de l'ONU ne va pas jusqu’à réclamer 8 000 hommes comme l’avait fait l’Italien Romano Prodi en marge du G8. Pendant ce temps les grandes manœuvres diplomatiques se poursuivent. La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a annoncé qu’elle se rendrait dans la région «dès que cela serait approprié, si cela pouvait être utile», mais sans arrêter de date. Madame Rice contredit ainsi le président Bush dont une conversation avait été surprise lors du G8, alors qu'il croyait le micro fermé. M. Bush avait confié au Premier ministre Tony Blair, que Condoleezza Rice devait se rendre dans la région «assez rapidement». Ce à quoi le Britannique s'était proposé de s'y rendre également si Madame Rice «avait besoin qu'on lui prépare le terrain». Selon toute vraisemblance, Condoleezza Rice a estimé pouvoir se passer de ses services. Le Haut représentant de l’Union européenne pour la politique extérieure, Javier Solana, est en Israël où il a lancé un appel pour que «ceux qui ont de l’influence pour aider à résoudre ce problème le fassent rapidement, immédiatement, maintenant». On pourrait y voir un demi-aveu d’impuissance devant la situation qui se dégrade jour après jour. On estime déjà à plus d’un demi-million le nombre des déplacés au Liban.

Divisée et affaiblie, la Ligue arabe ne constitue pas non plus un recours fiable  pour le Liban dans cette crise. Pour l’heure, seule l’Arabie saoudite a critiqué ouvertement le Hezbollah. Mais de source diplomatique, d’autres pays membres entretenant de bonnes relations avec les Etats-Unis, considèrent que l’opération du Hezbollah était une erreur. L’organisation panarabe en était toujours mercredi à tenter d’obtenir l’accord des deux tiers de ses membres pour pouvoir convoquer un sommet. Devant ces tergiversations, le Libanais Fouad Siniora a accusé la communauté internationale de ne pas faire «tout son possible pour que cesse l’agression d’Israël contre le Liban. La communauté internationale a cessé de faire pression sur Israël et Israël a considéré cela comme un feu vert», a-t-il regretté. Le Liban a vécu aujourd’hui sa pire journée depuis le début de l’offensive israélienne, au moins 54 civils ont été tués en quelques heures dans des raids aériens.

par Claire  Arsenault

Article publié le 19/07/2006Dernière mise à jour le 19/07/2006 à TU

Dossiers

(©AFP/Bourgoing/RFI)

Audio

Bombardements à Beyrouth

«Pour le moment les infrastructures sont touchées, le bilan en pertes civiles est énorme. Le Hezbollah, lui, a gardé toute sa capacité de riposte. Il reste à savoir si cette campagne ne va pas se poursuivre par une invasion totale du Liban ou une invasion partielle du Liban Sud pour aller dénicher ces combattants du Hezbollah.»

[19/07/2006]

Soha Boustani

Responsable de l'information au bureau de l'Unicef à Beyrouth

«La situation a mis les enfants dans un état de traumatisme. Ils avaient entendu leurs parents parler de la guerre, et maintenant ce sont eux qui la vivent.»

[19/07/2006]

Articles