Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

France

GDF-Suez : la bataille du gaz

Manifestation contre la fusion GDF-Suez à Besançon, dans l'est de la France. 

		(Photo: AFP)
Manifestation contre la fusion GDF-Suez à Besançon, dans l'est de la France.
(Photo: AFP)
C’est le dossier le plus chaud de la rentrée. Les députés français entament, jeudi 7 septembre, l’examen du projet de loi sur l’énergie qui prévoit notamment la privatisation de Gaz de France (GDF), prélude à la fusion avec Suez. L’opposition a déposé quelque 137 500 amendements, ce qui constitue un record depuis le début de la Ve République. Une partie de la majorité -UDF en tête- est également très divisée sur cette privatisation de GDF voulue par le gouvernement Villepin. Les syndicats appellent à une journée nationale d’action le 12 septembre prochain. De leur côté, les associations de défense des consommateurs dénoncent un piège tendu aux Français. Le débat s’annonce donc mouvementé autour de ce projet qui soulève de nombreux enjeux.

Economie. En février 2006, l’électricien italien Enel menace de lancer une offre publique d’achat (OPA) sur le groupe franco-belge privé Suez. Pour protéger Suez d’une OPA hostile, le Premier ministre Dominique de Villepin propose un rapprochement franco-français entre le privé Suez et le gazier public Gaz de France. Or cette fusion implique une privatisation de GDF, détenu à 80% par l’Etat. Dans ce nouvel ensemble, la participation de l’Etat dans le capital de GDF baissera de 80 à 34%. L’objectif est de créer un pôle puissant dans le domaine gazier en Europe, face à la mise en production prochaine de gisements russes, qataris et iraniens. De quoi renforcer le poids de GDF face à ses concurrents étrangers dans un contexte de libéralisation des marchés de l’énergie.

Politique. Au nom du patriotisme économique, le projet de loi a été «bouclé dans la précipitation», dénonce l’opposition. Pour tenter d’empêcher son adoption, les députés socialistes et communistes ont déposé quelque 137 500 amendements pour modifier le texte. Sans compter que l’opposition entent également utiliser toutes les procédures (suspensions de séance, demandes de quorum, etc.) pour ralentir les débats qui sont prévus jusqu’au vendredi 22 septembre. Le président de l’Assemblée nationale Jean-Louis Debré a prévenu que «si jamais on persistait dans cette volonté de blocage des institutions», il demanderait lui-même le recours à l’article 49-3 de la Constitution, qui permet l’adoption d’un texte sans vote par l’engagement de la responsabilité du gouvernement. A droite également, ce mariage entre les deux groupes suscite de nombreuses réticences, y compris au sein de l’UMP, le parti majoritaire. Pour calmer le jeu, le président de l’UMP Nicolas Sarkozy s’est rallié tardivement au texte gouvernemental. Mais il n’est pas parvenu à maintenir l’unité dans ses rangs. Une quarantaine de députés sarkozystes ont tout de même annoncé qu’ils ne voteraient pas le texte en l’état. D’autant que les députés ne connaissent pas encore les exigences de Bruxelles à l’égard de ce futur ensemble, la Commission européenne devrait rendre son verdict fin octobre ou mi-novembre.

Social. Le ministre de l’Economie Thierry Breton et les PDG des deux groupes, Jean-François Cirelli (Gaz de France) et Gérard Mestrallet (Suez) n’ont pas convaincu les syndicats de la cohérence industrielle du projet. Ils sont inquiets du sort des 60 000 agents communs à EDF et GDF et craignent notamment des suppressions de postes, étant donné les doublons entre les sociétés GDF et Suez. L’intersyndicale CGT, FO, CFE-CGC et CFDT de GDF appelle le 12 septembre à une journée nationale d’action avec manifestations et arrêts de travail. Le syndicat FO, comme la CGT, défend un projet alternatif de fusion EDF-GDF, car quelque 50 000 agents travaillent pour les deux entreprises

Consommation. Quels avantages les Français vont-il tirer de la loi relative au secteur de l’énergie qui prévoit l’ouverture des marchés de l’électricité et du gaz au 1er juillet 2007 ? Selon les associations de défense de consommateurs, la fusion avec Suez ne pourra se faire qu’au détriment des consommateurs, car une telle concentration entraînera «des risques de dérive des prix». L’organisation UFC-Que Choisir souligne qu’à compter de cette date, les consommateurs de gaz et électricité qui choisiront de s’engager sur le marché libre ne pourront plus bénéficier par la suite des tarifs régulés, sauf en cas de déménagement. De l’autre côté, les tarifs régulés vont probablement connaître une forte hausse. En effet, les deux opérateurs historiques conserveront une position dominante sur le marché français et disposeront d’une grande liberté pour augmenter les tarifs.



par Myriam  Berber

Article publié le 06/09/2006 Dernière mise à jour le 06/09/2006 à 16:21 TU

Audio

Julien Dourgnon

Directeur d'étude à «UFC-Que choisir»

«Le consommateur qui aura décidé de quitter le tarif régulé de l'énergie ne pourra plus faire marche en arrière.»

[06/09/2006]

Articles