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Corée du Nord

Pékin et Washington divergent sur les sanctions

Le Conseil de sécurité des Nations unies devait entamer jeudi 12 octobre un débat sur le projet de résolution prévoyant des sanctions contre Pyongyang. 

		(Photo : AFP)
Le Conseil de sécurité des Nations unies devait entamer jeudi 12 octobre un débat sur le projet de résolution prévoyant des sanctions contre Pyongyang.
(Photo : AFP)
Après l’essai nucléaire présumé effectué par Pyongyang en début de semaine, le Conseil de sécurité de l’Onu devait entamer jeudi soir un débat sur le projet de résolution américain. Le texte, appuyé par le Japon, la France et la Grande-Bretagne comporte des sanctions sévères pouvant aller jusqu’à l’emploi de la force. La Chine et la Russie, qui se disent également partisanes de la fermeté, veulent néanmoins exclure l’option militaire. De son côté, la Corée du Nord menace le Japon de «fortes représailles» s’il met en œuvre de nouvelles sanctions à son encontre.

La crise du nucléaire nord-coréen fait apparaître un clivage diplomatique similaire à celle du nucléaire iranien. D’un côté un groupe de puissances emmené par les Etats-Unis et prônant une ligne dure, de l’autre la Chine et la Russie préconisant une position plus souple.

Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) et le Japon ont ainsi échoué, mercredi soir, à se mettre d’accord, notamment sur l'étendue du domaine juridique d’une résolution et sur le champ des sanctions à imposer à la Corée du Nord après l’annonce, en début de semaine, de son premier essai nucléaire.

Le projet est placé sous le Chapitre VII de la Charte de l'Onu, qui donne au Conseil de larges pouvoirs d'action, y compris militaires. Le texte, notamment, « condamne le test nucléaire proclamé par la Corée du Nord » et exige qu'elle « s'abstienne de tout nouvel essai nucléaire ou tir de missile balistique ». Il prévoit la mise en oeuvre d'un embargo sur « les armes et matériels connexesles matériels liés à la technologie nucléaire ou à celle des missiles », ainsi que sur « les marchandises de luxe ». Est également prévue « l'inspection internationale de toute cargaison à destination ou en provenance de Corée du Nord afin d'assurer l'application des mesures ci-dessus ».

Jugé trop dur, le projet n’a obtenu ni l’aval de Pékin, ni celui de Moscou. Chine et Russie sont deux partenaires importants de la Corée du Nord. La Chine, notamment, alliée historique du régime nord-coréen, fournit une aide alimentaire et énergétique vitale à son voisin communiste, pays de 23 millions d’habitants dont elle redoute toute déstabilisation. Aussi insiste-t-elle pour n’invoquer que certains articles du Chapitre VII, comme le 41, qui prévoit seulement « des mesures n’impliquant pas l’emploi de la force armée ».

« Une menace à la paix et à la stabilité internationale »

Jeudi soir, les Etats-Unis, appuyés par le Japon, devaient donc soumettre au Conseil de sécurité, à New York, une version amendée de ce projet, avec l’espoir de voir adoptée cette nouvelle mouture vendredi ou samedi. Mais Washington, ainsi que plusieurs autres délégations, tient à ménager à la communauté internationale la possibilité d’envisager une action militaire.

Depuis l'annonce de cet essai, des doutes persistent quant à sa nature, nucléaire ou conventionnelle, et à sa puissance. Le président américain Bush a néanmoins estimé, mercredi, qu’il s’agissait en soi d’« une menace à la paix et à la stabilité internationale » devant entraîner des « répercussions sérieuses ».

Or jeudi matin, quelques heures avant cette réunion du Conseil en séance plénière, la Chine, bien qu’ayant qualifié l’essai nucléaire nord-coréen d’initiative « insolente », insistait de nouveau sur une solution « pacifique » à la crise. « Toute mesure ou action devrait bénéficier au dénouement de la crise nucléaire dans la péninsule coréenne par l'intermédiaire de moyens pacifiques et du dialogue », a déclaré Liu Jianchao, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Cette déclaration est intervenue peu après le départ pour Washington et Moscou d'un émissaire du président chinois Hu Jintao, afin de tenter d’aplanir les différends.

Le Japon, «  pays le plus affecté »

Réagissant violemment, la Corée du Nord a averti mercredi qu'elle considérerait « comme une déclaration de guerre » de nouvelles « pressions » américaines à son encontre. Jeudi, c’est vers le Japon que se sont dirigées les menaces du régime de Pyongyang : il a évoqué de « fortes représailles » si Tokyo appliquait de nouvelles sanctions unilatérales annoncées mercredi, y compris la suspension de toutes les importations nord-coréennes. Ces mesures supplémentaires doivent entrer en vigueur vendredi pour six mois.

Il faut dire que le Japon, de par sa position géographique – et en tant qu’ancien colonisateur de la péninsule coréenne –, se sent particulièrement vulnérable. Le secrétaire général du gouvernement nippon, Yasuhisa Shiozaki, a estimé que l'essai nucléaire de lundi avait « multiplié par deux la menace » à l'encontre du Japon, qu'il a présenté comme « le pays le plus affecté » par les agissements nord-coréens.

La Corée du Sud a, quant à elle, décidé de renforcer son armement conventionnel. Il s’agit, a annoncé jeudi son ministre de la Défense Yoon Kwang-Ung, de mieux se préparer à une éventuelle attaque nucléaire du régime stalinien. Séoul va également demander à Washington de confirmer sa protection au sein d'un parapluie nucléaire. Le principe en avait été accepté par les Etats-Unis en 1978 mais les modalités restent encore à définir.

par Philippe  Quillerier

Article publié le 12/10/2006 Dernière mise à jour le 12/10/2006 à 16:45 TU