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Politique française

Trois candidats pour une investiture

Les trois candidats déclarés du PS : Ségolène Royal, Dominique Strauss-Khan et Laurent Fabius. 

		(Photos : AFP)
Les trois candidats déclarés du PS : Ségolène Royal, Dominique Strauss-Khan et Laurent Fabius.
(Photos : AFP)
Le Parti socialiste entame la dernière ligne droite avant la désignation de son candidat pour la présidentielle, le 16 novembre prochain. Les trois postulants qui restent finalement en lice, Ségolène Royal, Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn, ont donc engagé officiellement leur campagne auprès des militants socialistes auxquels revient le choix final. Ils ont rendu publiques leurs «professions de foi» et doivent participer à une série de débats, dont trois seront retransmis à la télévision. A chacun ses priorités et surtout sa personnalité.

Si les sondages placent Ségolène Royal en tête des intentions de vote, ses adversaires n’ont pas renoncé à lui rafler la mise sur le fil. Ils ne cessent d’ailleurs d’argumenter sur le fait qu’il ne faut pas se fier aux enquêtes d’opinion car sondage ne veut pas dire suffrage. D’autant que les enquêtes évaluent souvent les intentions des sympathisants et non des vrais militants socialistes inscrits au Parti. Mais surtout, Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn, largement dépassés sur le terrain de l’image, essaient de replacer le débat sur les idées et les projets. Ils attendent d’ailleurs avec impatience de pouvoir confronter leurs arguments entre eux, mais surtout avec Ségolène Royal. A l’occasion des six débats prévus dans le cadre de la campagne interne : 17, 24 octobre et 7 novembre pour les débats télévisés, 19 (Clermont-Ferrand), 26 (Paris) octobre et 9 novembre (Toulouse) pour les débats devant les militants.

Surnommée la madone des sondages, Ségolène Royal a souvent été accusée, par ses adversaires de droite et aussi ses concurrents de gauche, de privilégier la forme sur le fond et de surfer sur les idées des autres sans faire de véritables propositions. La faute peut-être à sa méthode, la «démocratie participative», qui consiste à demander aux Français de lui faire part, sur son blog et lors de ses déplacements notamment, de leurs idées et de leurs souhaits pour qu’elle puisse les relayer. Il est vrai que la popularité de Ségolène Royal est surtout venue de sa capacité à parler un langage qui touche les Français, à réagir sur les sujets sensibles, plutôt qu’à défendre un programme de gouvernement. Néanmoins, elle a tenté depuis son entrée en campagne pour l’investiture, à Vitrolles, le 29 septembre dernier, de rectifier le tir.

Des valeurs et des principes

Ségolène Royal a décliné son argumentaire sur le thème de l’«ordre juste», dont elle a fait son principal «désir d’avenir». Ce thème, qui va sur le terrain des valeurs, convient bien à son positionnement politique. Il lui permet d’être à la fois novatrice et traditionaliste dans la famille socialiste. Traditionaliste lorsqu’elle défend «l’exigence de justice et de transformation sociale». Novatrice lorsqu’elle affiche le besoin d’ordre, référence habituellement plutôt droitière. En matière idéologique, elle bouscule le dogmatisme routinier. Dans sa profession de foi, elle définit le socialisme notamment comme un moyen de «s’arracher à la pesanteur des habitudes». Cette manière de mélanger les références permet à Ségolène Royal de jouer la carte du changement et de faire valoir ce qu’elle apporte en tant que femme dans un univers où ce sont les hommes qui ont jusqu’à présent exercé les plus hautes responsabilités. C’est sûr, Ségolène Royal défend plus des principes qu’un programme. Elle parle d’«égalité réelle» à l’école, de «lucidité» contre la violence, d’«excellence environnementale».

Rien à voir avec la promesse d’augmenter le Smic (salaire minimum) de 100 euros s’il est élu, faite par Laurent Fabius. L’ancien Premier ministre n’a pas choisi la même approche. Il s’est positionné très à gauche. Et il a pris sept engagements précis parmi lesquels celui de mettre fin aux exonérations de cotisations sociales dans les grandes entreprises, d’obliger les maires à construire des logements sociaux, de faire une loi-programme sur l’environnement, de créer une nouvelle branche de la sécurité sociale pour les personnes âgées et les handicapés, d’organiser dès 2007 un référendum sur la VIe République…

Rassembler la gauche

Laurent Fabius prône, d’autre part, le rassemblement de la gauche avec les Verts sur la base d’un «contrat» et condamne les dérives vers le centre qui ne correspondent pas, selon lui, à l’identité socialiste telle qu’elle a été définie avec François Mitterrand puis Lionel Jospin. Mais surtout, il invite les militants à garder «les thématiques» socialistes à l’esprit et à désigner un candidat qui aura «une capacité à servir l’Etat». Autrement dit quelqu’un qui, comme lui, a l’expérience des responsabilités. Dans sa profession de foi, il résume cette idée par une formule poétique en invitant les militants à faire la différence entre «l’écume des vagues et la profondeur de l’océan». Une manière de ne pas dire entre Ségolène la médiatique et Laurent le compétent.

Dans ce triptyque, Dominique Strauss-Kahn a pris la place intermédiaire. Il revendique d’avoir un projet et une réelle expertise, sur les dossiers économiques notamment, en tant qu’ancien ministre, comme Laurent Fabius. Et il prône le renouvellement «des analyses», «des instruments», «des modes d’action» des socialistes, histoire de ne pas laisser le champ de l’innovation à la seule Ségolène Royal. Son programme est clair : la priorité y revient au social et à la lutte contre les inégalités. Pour progresser dans ces domaines, il propose notamment d’améliorer la redistribution fiscale et de concentrer «les capitaux publics sur ceux qui ont moins de capital social». Dominique Strauss-Kahn veut «un nouveau rapport entre l’économique et le social» et «une nouvelle articulation entre la loi et le contrat». Il défend une vision du socialisme «émancipateur» dans lequel l’économie doit permettre «la mobilité sociale». La mise en œuvre de cette vision de la «démocratie sociale» nécessite un président «engagé» et non plus «arbitre».



par Valérie  Gas

Article publié le 16/10/2006 Dernière mise à jour le 16/10/2006 à 09:40 TU