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Mauritanie

Premières élections de la transition

Une Mauritanienne vote, à Nouakchott, dimanche 19 novembre 2006, aux élections municipales et législatives. 

		(Photo : AFP)
Une Mauritanienne vote, à Nouakchott, dimanche 19 novembre 2006, aux élections municipales et législatives.
(Photo : AFP)
Un peu plus d’un million de mauritaniens étaient appelés aux urnes ce dimanche pour élire leurs 216 maires et 95 députés, première étape électorale de la transition démocratique conduite par la junte au pouvoir. La campagne s’est déroulée sans incidents majeurs, malgré la multitude de candidats en lice. Près de 1700 listes ont été présentées, dont 80 dans la capitale. L’opération de vote s’annonçait difficile, avec trois bulletins uniques à placer dans trois urnes, d’autant que la sensibilisation tardive n’a pas permis de toucher tous les électeurs, en majorité analphabètes.

De notre correspondante à Nouakchott

Ce sont les premières élections organisées depuis le renversement de Maaouya ould Taya  le 3 août 2005, après 20 ans passés au pouvoir, et c’est sans doute ce qui explique le climat indéfinissable qui a régné durant cette campagne. En quelques mois, tous les repères ont été chamboulés, avec d’un côté, un ex-parti au pouvoir qui a perdu de son panache et de ses adhérents, une ex-opposition qui n’a plus d’ennemi contre qui faire campagne, et des indépendants qui sont apparus soudainement sans motivation très claire.

Sous les tentes traditionnelles et dans les meetings, priorité a été donnée au folklore avec quelques soirées dansantes, un parti faisant même venir la vedette sénégalaise Youssou N’dour mais globalement la campagne n’a été que modérément festive sans grand débat d’idées. Aujourd’hui comme hier, dans ces élections locales, la tradition reste de suivre la campagne du cousin ou du candidat de la tribu, plus que le programme d’un parti. De nombreux électeurs se sont d’ailleurs inscrits hors de leur lieu de résidence, au village, pour soutenir leur proche. «Si j’avais su que mon frère se présentait à Mederdra, je ne me serais pas inscrit dans la capitale» peste Moctar, un chauffeur qui regrette d’avoir à voter pour un candidat qui ne lui est pas familier.

Pléthore de listes

Cette année, le choix s’annonce difficile et certains leaders politiques s’inquiètent de la confusion remarquée chez les électeurs. Plus de 25 partis sont candidats, mais aussi des formations politiques non reconnues comme les islamistes et plus d’un tiers de listes indépendantes avec dans l’ensemble, de nombreux inconnus à l’affiche. On compte notamment 1222 listes pour 216 communes. Avec une nouveauté cette année : un quota de 20 % de femmes a été institué dans les conseils municipaux ainsi qu’une représentation minimum au Parlement.

En Mauritanie, plus d’un million d'electeurs ont été appelés à choisir, dimanche, leurs maires et députés. 

		(Carte: Marc Verney/RFI)
En Mauritanie, plus d’un million d'electeurs ont été appelés à choisir, dimanche, leurs maires et députés.
(Carte: Marc Verney/RFI)

Les autorités ont réaffirmé vendredi soir leur neutralité et leur volonté d’organiser un scrutin libre et transparent après avoir été accusées d’ingérence dans le jeu politique en encourageant les candidatures indépendantes au détriment des partis traditionnels. En acceptant d’imprimer des bulletins de vote uniques sécurisés et numérotés, à Londres, et de publier les résultats bureau par bureau sur internet, le pouvoir assure avoir fait le nécessaire.

 Les partis craignent cependant des fraudes. «Nous avons des informations qui font état de la circulation de copies du bulletin unique qui pourraient être remplis avant le jour du scrutin et remis à des électeurs peu habitués à voter» confie Mohamed ould Maouloud, président de l’Union des Forces du Progrès et porte-parole d’une coalition de 11 partis. L’inquiétude concerne surtout les zones rurales et l’Est du pays ou de nombreux partis n’ont pas les moyens d’être représentés pour contrôler les opérations de vote.

500 observateurs

Un représentant de la Commission électorale nationale indépendante devrait être dépêché dans chacun des 2336 bureaux avec l’objectif d’être plus efficace que lors de la première entrée en scène de la Ceni, lors du référendum constitutionnel de juin dernier. Pour la première fois, 300 observateurs nationaux et 200 étrangers ont été accrédités par le pouvoir. «Vous serez des témoins qui vont observer les faits et dire la vérité en toute objectivité et toute indépendance» a insisté Habib ould Hemet, ministre secrétaire général de la Présidence. Au premier rang des observateurs étrangers, il y a les européens, au nombre de 87,  présents dans toutes les régions. «Cela faisait des années qu’on demandait à la Mauritanie de pouvoir observer car la fraude était monnaie courante. C’est donc pour nous très important que les autorités acceptent une mission d’observation européenne à long terme» confie Marie-Anne Isler Beguin, chef de la délégation des observateurs.

Le premier enjeu du scrutin reste la participation et le nombre de bulletins nuls.  «La sensibilisation de la population sur ce que signifie un vote démocratique a pris du retard, on peut donc s’attendre à des surprises bonnes comme mauvaises dimanche soir» ajoute la chef de la délégation européenne. Les électeurs devront voter trois fois, pour les municipales, les législatives régionales, et les législatives liste nationale. Pour éviter les erreurs, les présidents de bureau de vote ont été autorisés à les aider à glisser le bon bulletin dans la bonne urne. Les électeurs pourront aussi choisir d’aller trois fois dans l’isoloir pour décomposer leur vote. L’opération risque de prendre du temps, c’est pourquoi il a été décidé que tous ceux qui seront présents à la fermeture des bureaux à 19 heures seront autorisés à voter, même si cela doit prendre plusieurs heures supplémentaires.



par Marie-Pierre  Olphand

Article publié le 19/11/2006 Dernière mise à jour le 19/11/2006 à 18:05 TU