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Politique française

Royal-Hollande : c’est pas lui, c’est moi

Ségolène Royal et François Hollande ont effectué, devant les militants réunis au congrès du Parti socialiste, un numéro de duettiste assez au point. 

		(Photo : AFP)
Ségolène Royal et François Hollande ont effectué, devant les militants réunis au congrès du Parti socialiste, un numéro de duettiste assez au point.
(Photo : AFP)
Ségolène Royal est la candidate socialiste à la présidentielle. François Hollande, son compagnon à la ville et le père de ses quatre enfants, est Premier secrétaire du parti qui la soutient. La situation est inédite en France. Et elle a suscité un certain nombre de questions sur leur capacité à gérer vie de couple et vie politique. Le principal point d’interrogation concerne maintenant la place que François Hollande peut occuper auprès de sa compagne durant la campagne pour la présidentielle, et après.

Ségolène Royal a dit merci à François Hollande. Dans la salle de la Mutualité à Paris, où était organisé, le 26 novembre, le congrès du Parti socialiste destiné à procéder à son investiture officielle, la candidate à la présidentielle a parlé du Premier secrétaire comme de celui sans qui «rien n’aurait été possible». On ne peut pas dire qu’elle a rendu un hommage appuyé à son compagnon puisqu’il ne s’agissait que d’un message de remerciement au milieu de nombreux autres. Etait-ce simplement de la discrétion de la part d’une candidate qui ne veut pas en faire trop sur les liens qui l’unissent au dirigeant de son parti ? Ou cela traduit-il une véritable volonté de marquer publiquement son indépendance ?

De la même manière, lorsque François Hollande a pris la parole après Ségolène Royal à la Mutualité, il n’a pas manqué de mettre un bémol à l’enthousiasme presque irrationnel provoqué chez les militants par l’apparition de la candidate. «Le seule fête qui vaudra sera en mai prochain [après le deuxième tour de la présidentielle]». Et d’ajouter, pour ceux qui n’aurait pas compris, qu’il ne faut pas se livrer avant l’heure à un «exercice de jubilation collective». Le moins que l’on puisse dire, c’est que le Premier secrétaire s’est efforcé de rappeler que le plus dur reste à faire et que dans la campagne électorale, il faudra changer de braquet pour gagner. Il a insisté sur la nécessité d’«imposer les thèmes de la confrontation» avec la droite. Peut-être une manière de dire que désormais il faut parler du fond et du programme. Pas seulement jouer la carte du discours et de la forme, quel que soit le talent de la candidate.

A elle, l’aura. A lui, la pugnacité

On ne peut manquer de constater, malgré tout, que Ségolène Royal et François Hollande ont effectué un numéro de duettiste assez au point devant les militants. Ségolène Royal a prononcé un discours qui se voulait au-dessus de la mêlée. François Hollande a, en revanche, mis les mains dans le cambouis politique en allant attaquer la droite. Elle a évoqué les ambitions et les objectifs en appelant les socialistes à suivre sa méthode : écouter les Français. Il a pris Nicolas Sarkozy comme cible et a dénoncé les travers du ministre de l’Intérieur en le désignant du même coup comme l’adversaire à battre. Une répartition des rôles quasi parfaite. A elle, l’aura. A lui, la pugnacité. A elle de convaincre les Français. A lui de rassembler la gauche.

Comment donc savoir à quel jeu jouent vraiment ces deux-là ? Ont-ils agi de concert depuis le début ? Est-ce François Hollande qui a piloté la candidature de Ségolène ? Jusqu’à quel point ? A-t-elle, au contraire, coupé définitivement l’herbe sous le pied de son compagnon, à la tête du PS depuis 1997 et dont on a dit qu’il aurait voulu aller lui-même à la bataille électorale malgré l’échec cuisant de la campagne pour le référendum sur la Constitution européenne ? Au sein du PS, ces questions ont souvent été posées. François Hollande a même été soupçonné, durant la campagne interne, de favoriser Ségolène Royal par rapport à ses deux adversaires, Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn.

Attendre 2012 ?

Quel qu’ait été le calcul de départ -si calcul il y a eu-, les dés sont aujourd’hui jetés : Ségolène Royal est le capitaine du bateau socialiste pour la présidentielle. François Hollande ne sera pas son directeur de campagne. Mais il aura la tâche de mobiliser les forces du parti pour aider la candidate à conquérir le pouvoir. Il a, dès la désignation de Ségolène Royal, insisté sur le rôle central du PS dans la campagne. Mais il a aussi pris acte de la nécessité de laisser à Ségolène Royal une «liberté» qu’elle a de toute manière su prendre depuis longtemps.

Difficile de savoir ce qui se produira après le scrutin. Si Ségolène Royal gagne, François Hollande entrera-t-il au gouvernement ? Il n’a pas écarté cette hypothèse. Elle non plus. Il n’ira pas, en revanche, s’installer à l’Elysée. La vie de «premier monsieur» ne semble pas faire partie de ses objectifs. Il a, par ailleurs, affirmé qu’il quitterait de toute manière la tête du parti après les législatives de juin 2007. Pour quoi faire ? A l’entendre, pour «organiser [son] propre destin». Peut-être attendre la présidentielle de 2012.



par Valérie  Gas

Article publié le 27/11/2006 Dernière mise à jour le 27/11/2006 à 17:15 TU