Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Etats-Unis/Irak

Bush réfléchit à des troupes supplémentaires

Dans une interview au <em>Washington Post</em>, le président&nbsp;George Bush a déclaré qu’en Irak, «<em>nous ne gagnons pas, nous ne perdons pas</em>». 

		(Photo : AFP)
Dans une interview au Washington Post, le président George Bush a déclaré qu’en Irak, «nous ne gagnons pas, nous ne perdons pas».
(Photo : AFP)

Le président Bush projette d’augmenter les effectifs de son armée en Irak et, pour la première fois, il a admis que les forces des Etats-Unis ne sont pas en train de gagner cette guerre. L’interview de George Bush, publiée dans l’édition de mercredi du Washington Post, coïncide avec la visite surprise à Bagdad du nouveau responsable du Pentagone, Robert Gates. La Maison Blanche souhaiterait disposer de 70 000 soldats supplémentaires, un effort qui prendra des années et qui coûtera des dizaines de milliards de dollars.


En recevant dans le Bureau Ovale les journalistes du Washington Post, George Bush a choisi une formule mi figue mi raisin pour définir les perspectives militaires actuelles en Irak : «Nous ne gagnons pas, nous ne perdons pas». Cette phrase contraste considérablement avec les affirmations faites lors de la campagne pour les élections de mi-mandat : il se disait convaincu que l’armée des Etats-Unis était en train de gagner ce conflit. Depuis, il y a eu la défaite électorale et le rapport bipartite Baker-Hamilton. Et si aujourd’hui le président américain propose d’augmenter le nombre de soldats en Irak, cela contredit les propositions de ce rapport qui prônait un retrait graduel des troupes américaines déployées en Irak. La victoire des démocrates, qui ont acquis la majorité au Congrès il y a six semaines, ne semble pas, non plus, avoir eu de réelle influence sur les orientations du locataire de la Maison Blanche.

George Bush s’est déclaré «enclin à penser» que cette augmentation d’effectifs doit surtout toucher l’armée de terre et les marines. Dans une conférence de presse tenue mercredi, Bush a confirmé ses déclarations au Washington Post, soulignant que «la victoire est réalisable, mais nous ne réussissons pas aussi vite que je le souhaite». Le président a aussi indiqué qu’il allait demander à Robert Gates, le secrétaire à la Défense, de lui présenter des propositions concrètes au sujet de cette délicate question. Le nouveau responsable du Pentagone, qui a pris ses fonctions il y a peine deux jours, a effectué mercredi une visite surprise à Bagdad pour se rendre compte, sur le terrain, de la situation militaire et aussi de l’état d’esprit des troupes américaines qui n’est pas, loin de la, très brillante.

Une guerre très couteuse en vies et en argent

Ainsi, un rapport du Pentagone indique que les attaques dirigées contre le personnel de sécurité et les civils irakiens ont enregistré une augmentation de plus de 20%, par rapport au trimestre précédent. Selon Robert Gates, un échec en Irak serait «une calamité» qui hanterait les Etats-Unis, en mettant en péril leur crédibilité. L’armée américaine a perdu près de 3 000 hommes, depuis le début de la guerre en Irak, en mars 2003. Une estimation récente évalue à 150 000 le nombre d’Irakiens tués dans ce conflit, qui ressemble de plus en plus à une guerre civile, avec les actions des milices chiites et sunnites qui échappent à tout contrôle et qui rendent impossible le transfert de la gestion de la sécurité du pays aux Irakiens.

Selon le Washington Post, les chefs militaires américains, ainsi que les élus du Congrès, se déclarent inquiets au sujet du moral des troupes qui sont au bord du «point de rupture». Ainsi, la 3ème division d’infanterie va être obligée de retourner l’an prochain en Irak. C’est la troisième fois, en trois ans et demi, que les unités de cette division doivent revenir sur le théâtre des opérations. En conditions normales, l’intervalle entre les rotations d’effectifs déployés à l’étranger est de deux ans. Chez les marines, un corps spécial qui peut inclure des unités d’élite, la norme est de 7 mois sur le terrain et 14 mois de repos. Cette règle est également impossible à respecter.

Le taux de suicide des militaires américains déployés en Irak a enregistré une augmentation de 50% en 2005, par rapport à l’année précédente. La guerre en Irak, ainsi que les missions en Afghanistan, ont rendu le recrutement difficile, obligeant ainsi les commandements à abaisser les exigences en matière d’aptitudes physiques et intellectuelles. La Maison Blanche s’est empressée de démentir l’existence de divergences importantes entre le président et la chaîne de commandement des forces armées.

Une réforme qui va prendre des années

Les effectifs des différents corps d’armée américains (armée de terre, marine, armée de l’air et corps des marines) totalisent près de 1,5 millions d’hommes et femmes, en y incluant les réservistes actuellement mobilisés. L’armée de terre rassemble 507 000 soldats et les marines 180 000 engagés. Les troupes américaines présentes en ce moment en Irak sont évaluées à 140 000 soldats, ce qui représente un coût de l’ordre de deux milliards de dollars par semaines, près de 110 milliards par an, selon le directeur du budget de la Maison Blanche, Rob Portman.

George Bush s’est déclaré conscient des difficultés auxquelles son armée doit faire face : «Il est juste de penser que la guerre idéologique va durer un moment et que nous allons avoir besoin d’une armée capable de supporter nos efforts». En proposant d’augmenter les effectifs militaires, le président a voulu s’éloigner des orientations adoptées auparavant par l’ancien secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, lequel misait plus sur les nouvelles technologies que sur les hommes. Rumsfeld a été congédié après la défaite des républicains aux élections du 7 novembre. Bush souhaiterait que les démocrates l’appuient dans cette refonte de la politique militaire, notamment en Irak, où le renfort du contingent permettrait, dans une première phase, d’accélérer la formation de troupes irakiennes.

Les médias américains affirment que Bush souhaiterait recruter 70 000 nouveaux soldats et envoyer 20 000 hommes supplémentaires en Irak. Ce processus permettrait ensuite d’initier la réduction des effectifs, comme cela a été recommandé par la commission Baker-Hamilton. Reste que la formation de ces effectifs supplémentaires va mettre plusieurs mois à être mise à exécution et va couter 1,2 milliards de dollars par an, pour chaque tranche de 10 000 soldats en plus. Les scénarios les plus optimistes révèlent que l’augmentation des effectifs ne pourra pas dépasser 7 000 hommes par an. Certains généraux craignent qu’une croissance à court terme du nombre de soldats américains en Irak se traduise même, à la longue, par davantage d’attaques contre les troupes des Etats-Unis.   



par Antonio  Garcia

Article publié le 20/12/2006 Dernière mise à jour le 20/12/2006 à 19:36 TU