Présidentielle 2007
Bourdes, dérapages et manigances
(Photo : AFP)
Ca n’a pas traîné. Dès la parution du Canard enchaîné, les socialistes sont montés au créneau. Avec un objectif : attaquer Nicolas Sarkozy. Il faut dire que l’occasion était belle. L’hebdomadaire satyrique a, en effet, publié un article dans lequel il met en cause le cabinet du ministre de l’Intérieur, en affirmant qu’il a ordonné aux Renseignements généraux (RG) de s’intéresser au cas de Bruno Rebelle. Ce qui sous-entend que la vie du tout nouveau conseiller de Ségolène Royal sur les questions environnementales, qui est aussi l’ancien directeur de Greenpeace France, aurait donc été épluchée par les services pour chercher la petite bête susceptible d’être utilisée dans la campagne présidentielle. Une hypothèse confirmée, ce jour, par le quotidien Le Parisien qui affirme avoir obtenu par «plusieurs sources proches du ministère de l’Intérieur» l’assurance qu’un membre du cabinet de Nicolas Sarkozy était impliqué dans la demande d’enquête.
Il n’en fallait pas plus pour que les socialistes dénoncent les manœuvres du ministre de l’Intérieur et son utilisation des services de l’Etat pour obtenir des informations contre ses adversaires dans la campagne. François Hollande, le Premier secrétaire du PS qui est aussi le compagnon de Ségolène Royal, a demandé qu’il y ait «des vérifications» sur les informations diffusées par le Canard enchaîné. Il a aussi insisté sur les dangers de la «confusion des genres», à savoir être à la fois ministre de l’Intérieur et candidat à la présidentielle, qui «entraîne toutes les suspicions, laisse penser à toutes les manipulations». Le porte-parole du PS, Julien Dray, a parlé de «pratiques inacceptables» et a demandé au chef de l’Etat «de rappeler les règles élémentaires».
Tous les coups ne sont pas permis
Ségolène Royal n’a pas réagi immédiatement. Elle a attendu jeudi matin pour évoquer ces informations sur l’enquête des RG. La candidate a affirmé : «Une campagne électorale ne doit pas tout permettre. Il appartiendra au président de la République d’assurer le bon fonctionnement d’une campagne électorale présidentielle». Elle a aussi estimé être en ce moment «l’objet d’attaques généralisées sur tous les plans, y compris sur (sa) vie privée». La candidate socialiste avait déjà dénoncé les «méthodes de racaille» de ses adversaires lorsque des informations sur son patrimoine avaient été rendues publiques, il y a quelques jours, l’obligeant à révéler qu’elle payait l’impôt de solidarité sur la fortune.
Dans le camp de Nicolas Sarkozy, les accusations ont été balayées d’un revers de main. Le ministre de l’Intérieur les a, tout d’abord, lui-même qualifiées de «ridicules». Il a choisi le ton de l’ironie pour minimiser l’affaire en déclarant : «Pour chercher quoi ? Son programme ? Ce n’est pas une enquête qu’il faut, c’est une exploration». Ses lieutenants ont ensuite pris le relais. Brice Hortefeux a affirmé : «Quand on a rien à dire, on crie au complot. La campagne de Ségolène Royal, ça ne marche pas. Et comme ils sont en train de patauger, ils inventent désespérément des sorties de secours».
Une fiche mais pas d’ordre
La Direction centrale des Renseignements généraux (DCRG) a confirmé qu’elle avait réalisé une fiche sur Bruno Rebelle mais a précisé qu’elle n’avait reçu aucune demande d’enquête spécifique du ministère de l’Intérieur. Elle aurait agi dans le cadre de sa mission de surveillance des militants des organisations susceptibles d’organiser la «contestation» (elle n’est, en revanche, pas censée s’intéresser aux partis politiques). Le document aurait été rédigé avant l’arrivée de l’ancien directeur de Greenpeace dans l’équipe de campagne de Ségolène Royal et une réactualisation «automatique et sans ordre» aurait eu lieu au mois de janvier. Ce qui semble confirmer la version de Nicolas Sarkozy mais n’a pas totalement convaincu le principal intéressé. Bruno Rebelle a, en effet, annoncé son intention de porter plainte pour «atteinte à la vie privée» et a qualifié, dans une interview au Parisien, «les méthodes» des renseignements généraux de «procédés scandaleux».
Enquête de routine ou pas ? Difficile de démêler le vrai du faux. Une chose est sûre, la campagne électorale se durcit. Chaque camp cherche à rendre les coups reçus et toutes les occasions sont bonnes pour appuyer là où ça fait mal. L’enquête des RG a fourni aux socialistes un argument pour critiquer les avantages dont jouit le candidat Sarkozy tant qu’il reste ministre de l’Intérieur et essayer de lui donner une image de manipulateur dangereux. Mais en montant personnellement au créneau et en multipliant les attaques contre Nicolas Sarkozy, François Hollande a aussi tendu la perche au candidat de l’UMP. Celui-ci a eu beau jeu d’esquiver les critiques en s’amusant des efforts du Premier secrétaire pour tenter «de reprendre la main pour mener la campagne en lieu et place de madame Royal». Une attitude que Nicolas Sarkozy met sur le compte de la «nervosité» engendrée dans le camp socialiste par les derniers sondages qui ont montré une chute des intentions de vote en faveur de la candidate.par Valérie Gas
Article publié le 25/01/2007 Dernière mise à jour le 25/01/2007 à 15:58 TU