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Kenya

Une rentrée scolaire difficile pour les familles

Article publié le 14/01/2008 Dernière mise à jour le 14/01/2008 à 11:58 TU

Les enfants Kényans ont fait aujourd’hui leur rentrée scolaire. Une rentrée difficile pour les familles car la crise politique qui a éclaté après l’annonce des résultats des élections paralyse de nombreuses activités. Beaucoup de parents manquent d’argent.

Kayole, un quartier découpé par les immeubles à trois ou quatre étages. Le linge pend aux balcons en fer forgé.(Photo : L. Correau/RFI)

Kayole, un quartier découpé par les immeubles à trois ou quatre étages. Le linge pend aux balcons en fer forgé.
(Photo : L. Correau/RFI)

Avec notre envoyé spécial à Nairobi, Laurent Correau

Njogou Njau, tailleur&nbsp;: «&nbsp;<em>Nous devrions être en train de fabriquer des uniformes pour l’école, nous devrions en fabriquer beaucoup. Mais nous n’en faisons pas parce que les gens n’ont pas d’argent.&nbsp;</em>»(Photo : L. Correau)

Njogou Njau, tailleur : « Nous devrions être en train de fabriquer des uniformes pour l’école, nous devrions en fabriquer beaucoup. Mais nous n’en faisons pas parce que les gens n’ont pas d’argent. »
(Photo : L. Correau)

La boutique de Njogou Njau est installée sur une rue du quartier de Kayole qui mène au marché. Elle était resté fermée pendant la période d’émeutes. Elle est maintenant rouverte. Njogou Njau est tailleur. Mais si nécessaire, il peut aussi couper les cheveux ou tailler la barbe. Une partie de sa boutique est aménagée en salon de coiffure. Et même avec deux activités, les affaires ont du mal à reprendre.

Or, Njogou Njau a trois enfants, deux qui vont à l’école, un à l’université. Et ils ont fait leur rentrée aujourd’hui. « Le début de l’année, c’est un peu cher confie l’artisan : vous devez donner de l’argent pour le déjeuner, parce que les enfants prennent leur déjeuner à l’école. Vous devez acheter un uniforme et des livres. C’est obligatoire ».

Le tailleur-coiffeur s’apprête donc à aller voir les maîtres d’école pour leur expliquer qu’il n’a pas eu assez de rentrées d’argent… et leur demander de patienter un peu : « Quand il y a des manifestations, quand il y a tous ces problèmes, les gens n’achètent plus rien. Donc pas d’argent. Même maintenant, nous n’avons pas encore assez d’activité à cause de tous ces problèmes. Nous devrions être en train de fabriquer des uniformes pour l’école, nous devrions en fabriquer beaucoup… Mais nous n’en faisons pas parce que les gens n’ont pas d’argent… ».

«&nbsp;<em>La paix, c’est ce dont nous avons besoin maintenant.</em>&nbsp;» explique un ami de Njogou Njau, en regardant l’enseigne qui fait face à la boutique du tailleur.(Photo : L. Correau/RFI)

« La paix, c’est ce dont nous avons besoin maintenant. » explique un ami de Njogou Njau, en regardant l’enseigne qui fait face à la boutique du tailleur.
(Photo : L. Correau/RFI)

Assis devant la boutique de Njogou Njau, on lit facilement les gros caractères qui ornent le magasin d’en face. Il s’agit du « supermarché de la paix ». Un ami du commerçant esquisse un sourire « la paix, c’est ce dont nous avons besoin maintenant ».

« Les gens ont peur »

Le quartier de Kayole est découpé par les immeubles à trois ou quatre étages. Le linge pend aux balcons en fer forgé. John Karori Nduati habite dans une maison à un seul étage, qu’il présente comme l’une des plus vieilles des environs. Une pièce unique. Un lit à deux étages masqué par un fin rideau et quelques fauteuils.

John est tantôt chauffeur de taxi, tantôt ouvrier dans le bâtiment. Il vend ses services à qui en a besoin. Et depuis deux semaines, ils ne sont pas nombreux. « Il y a moins de travail qu’avant, explique John, parfois je pouvais être dans le matatu [NdlR : le minibus] j’avais un appel de quelqu’un qui me disait : j’ai une maison, je veux qu’elle soit repeinte, est-ce que vous pouvez venir et que nous négocions… Je dirais que j’étais assez pris avant. Mes ces jours-ci, je peux rester toute la semaine sans recevoir un coup de téléphone. Les gens ont peur ».

John Karori Nduati, devant son stand&nbsp;: «&nbsp;<em>Mes clients sont les gens qui ne travaillent pas. C’est pour cela que les affaires ralentissent.</em>&nbsp;»(Photo : L. Correau/RFI)

John Karori Nduati, devant son stand : « Mes clients sont les gens qui ne travaillent pas. C’est pour cela que les affaires ralentissent. »
(Photo : L. Correau/RFI)

Pour faire face aux coups durs, John s’appuyait jusqu’ici sur le petit commerce de sa femme, un étal installé juste devant la maison, garni de quelques légumes. « Nous vendons des tomates, explique-t-il devant le kiosque, nous avons des épinards, des choux, des oignons, des carottes et des bananes… Ça fait un an que j’ai construit ça. Je l’ai créé pour ma femme, pour que quand je n’aurai pas de travail elle puisse avoir à manger pour les enfants. Ca marchait bien, mais maintenant ce n’est pas au top ».

Il en dit plus à l’abri des regards, enfoncé dans son fauteuil, la tête toujours couverte de sa casquette. « Ceux qui achètent les légumes de mon commerce -mes clients- sont en fait les gens qui ne travaillent pas. C’est pour ça que les affaires ralentissent. On vend au total pour 50 shillings maintenant, alors que d’habitude on vendait au moins pour 300 ou 400 shillings. Les affaires sont trop mauvaises… ».

« La vie est devenue très difficile, reconnaît John Karori Nduati, je n’ai pas payé mon loyer, mon propriétaire me presse de le faire et je n’ai pas d’argent. Les enfants font leur rentrée et je n’ai pas d’argent ». Et il conclut, très calme : « Je vais devoir ouvrir un autre commerce ».