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Affaire Société Générale

L'avenir de la banque et de son PDG en question

par Myriam Berber

Article publié le 29/01/2008 Dernière mise à jour le 30/01/2008 à 08:47 TU

Daniel Bouton, PDG de la Société Générale.(Photo : Reuters)

Daniel Bouton, PDG de la Société Générale.
(Photo : Reuters)

Les attaques se multiplient contre la direction de la banque après la révélation d’une fraude présumée qui lui a coûté près de 5 milliards d'euros. Cette affaire, par sa gravité et son ampleur, fragilise son PDG Daniel Bouton, dont la responsabilité est clairement mise en cause. Plusieurs menaces pèsent désormais sur la banque française. Des scénarios de rachat et de démantèlement commencent même à circuler dans les milieux financiers.

Cinq jours après la révélation de la fraude présumée dont la Société Générale a été victime, le trader Jérôme Kerviel a été mis en examen, lundi 28 janvier 2008, notamment pour « abus de confiance », « faux et usage de faux ». Mais alors que les juges ont décidé de le laisser en liberté sous contrôle judiciaire, contre l’avis du parquet, la pression se concentre désormais sur Daniel Bouton, PDG de la banque depuis 1997, dont les jours à la tête de l’établissement paraissent comptés. Le patron de la banque française est de plus en plus critiqué, notamment par la classe politique. Le président de la République, Nicolas Sarkozy, a lancé la charge, lundi soir, estimant qu'une telle crise ne pouvait «pas rester sans conséquences, s'agissant des responsabilités, y compris au plus haut niveau ».

Le ministre de la Justice, Rachida Dati, a abondé dans ce sens, mardi, déclarant que la responsabilité de Daniel Bouton pouvait « être engagée ». Même constat pour le président de la commission des Finances du Sénat, Jean Arthuis, qui a estimé, mardi, que  Daniel Bouton ne pouvait « pas faire autrement que partir », soulignant qu'il y avait « véritablement eu un problème de gouvernance et de contrôle interne de la banque » à l'origine de l'affaire. Par ailleurs, le ministre de l’Economie et des Finances, Christine Lagarde, va remettre, lundi 4 février 2008, un rapport au Premier ministre François Fillon nourri des conclusions de la Banque de France et de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Ce rapport devrait préciser le déroulement exact des faits, y compris leur découverte par la direction de la Banque et avant la diffusion de l’information au public.

Les dirigeants dans la tourmente

Dans l’entourage de la banque, on tient à rappeler que la Société Générale est un établissement privé régi par les décisions de son conseil d’administration. C’est donc aux administrateurs de décider du maintien ou non de Daniel Bouton à son poste. Pour l’heure, ils ont refusé sa démission présentée la semaine dernière mais celui-ci est désormais encadré par un administrateur indépendant et les présidents des comités de nomination. Ils auront à se poser de nouveau la question de son éventuel départ dès demain mercredi au cours d’un conseil d’administration.  

Cette fraude présumée a fait perdre près de 5 milliards d'euros à la Société Générale. Ajoutés aux 2 milliards de pertes dans la crise du crédit immobilier à risque («subprimes»), la banque française voit ainsi s'envoler un montant total de 7 milliards d'euros. Pour combler ces pertes : une augmentation de capital de 5, 5 milliards d’euros doit être prochainement lancée. Au total, les bénéfices annuels qui étaient de 5,4 milliards d’euros en 2006, devraient s’effondrer autour de 700 millions d’euros. Au passage, l’affaire Kerviel devrait également endommager, durant plusieurs mois, l’activité du pôle de Financement et d’Investissement (BFI) de la banque, le principal moteur de croissance de la Générale, puisque cette branche génère le quart des profits du groupe.

Crise de confiance

« La confiance va être difficile  à restaurer. La fraude ajoutée aux pertes liées aux subprimes a terni l’image de la Générale », commente un professionnel du secteur, selon qui «  la banque a fait l’erreur de charger le trader, sans répondre à la question de l’inefficacité des systèmes de contrôle ». Les déboires de la Société Générale suscitent déjà des convoitises. Une liste de noms de repreneurs potentiels commence même à circuler :  de BNP Paribas à HSBC en passant par Santander ou Barclays. Le quotidien britannique Financial Times évoque même un possible mariage entre la Société Générale et la Banque Postale. 

Des scénarios de démantèlement circulent également qui verraient sa rivale BNP Paribas reprendre la banque de détail et le Crédit Agricole le pôle de Financement et d’Investissement (BFI). Mais les pouvoirs publics sont décidés à soutenir la Générale. Selon le secrétaire général de l'UMP, Patrick Devedjian « une intervention de l'Etat serait légitime en cas de raid boursier sur la banque française », estimant que l’Etat français n’est « pas obligé de rester inerte quand la substance même de son économie est en péril ». Lundi, l’action a perdu 3,82% à la Bourse de Paris à 71,05 euros. Mardi matin, le cours a relativement bien résisté, il remontait de 2,7% pour s’établir à 72,98 euros.

A écouter

Thami Kabbaj

Ancien trader à Londres, auteur de La psychologie des grands traders

« Je pense qu'il cherchait à prouver qu'il était un trader d'exception et le trait de caractère qui pousse malheureusement de nombreux traders qui échouent, c'est l'égo, l'excès de confiance. » 

29/01/2008

Daniel Bouton doit-il démissionner ? Les réponses divergent.

« Pour l'UMP Jérôme Chartier et le socialiste Manuel Valls, le PDG de la Société Générale doit partir ; mais la PS Elisabeth Guigou ou l'UMP Hervé Mariton sont beaucoup plus sceptiques...»

30/01/2008 par Valérie Gas

Christine Lagarde

Miinistre de l'Economie et des Finances

« Je n’ai été mise au courant que mercredi… Ma préoccupation de savoir comment améliorer l’efficacité des contrôles…»

30/01/2008 par Valérie Gas

Alain Bocquet

Député du parti communiste

« On savait que l’argent était roi dans ce monde, maintenant il est devenu fou… Ce qui se passe à la SG n’est qu’une petite partie de l’iceberg...»

30/01/2008 par Valérie Gas