par Myriam Berber
Article publié le 31/01/2008 Dernière mise à jour le 31/01/2008 à 18:27 TU
La Réserve fédérale américaine (Fed) a envoyé le signal que les marchés semblaient attendre. Une semaine après avoir réduit son taux d’intérêt directeur de trois quarts de point, la Fed l’a de nouveau baissé d’un demi-point. Il s’agit de la cinquième réduction des taux américains depuis septembre. Les taux se retrouvent donc à 3% contre 5,2% en septembre. En abaissant le loyer de l’argent, le Conseil des gouverneurs, présidé par Ben Bernanke, manifeste clairement qu’il prend en considération les risques que la crise immobilière fait courir à l’ensemble de l’économie américaine.
Le ralentissement de la croissance américaine a incité la banque centrale à ouvrir dans l’urgence les vannes du crédit pour limiter les dégâts et redonner du souffle à l’économie américaine. Selon les premières estimations du ministère américain du commerce, la croissance a été quasi-nulle au quatrième trimestre 2007. Elle a atteint 0,6% en rythme annuel. Au total, l'année 2007 se termine avec une croissance ne dépassant pas 2,2%, contre 2,9% en 2006, ce qui est le rythme le plus faible en cinq ans. La dégradation de l'immobilier s’est traduit par une pression à la baisse sur le pouvoir d'achat des ménages, et donc sur la consommation, premier moteur de la croissance. Les dépenses des Américains d’octobre à décembre 2007 n’ont ainsi grimpé que de 2% contre 2,8% au cours du troisième trimestre.
Ecart entre les taux européens et américains
Pour la majorité des analystes, Ben Bernanke fait le constat qu’il se trouve devant une situation économique particulièrement périlleuse et qu’il lui faut contrer les risques de récession par tous les moyens. Après avoir été accusé d’avoir mal apprécié la gravité de la crise, le successeur d’Alan Greenspan ne veut plus être pris en défaut. Les baisses de taux est un moyen à la disposition de la Fed pour soutenir l'économie. Une autre consiste à injecter des liquidités. Pour la quatrième fois en un mois, mardi, la Fed a apporté 30 milliards de dollars aux banques américaines, pour leur permettre de se financer plus facilement.
Mais cette politique offensive de la Fed commence à susciter des inquiétudes en zone euro. Le président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Junker a estimé, jeudi, après cette nouvelle baisse des taux aux Etats-Unis, que si l’écart de taux avec l’Europe se creusait « dramatiquement », cela rendrait la situation « difficile » pour l’économie européenne. Selon lui, « un écart trop important des taux de change entre le dollar et l’euro pourraient devenir à terme dangereux pour les exportateurs européens ». Pour autant, Jean-Claude Junker a aussi estimé que « l'analyse de la Fed était la bonne » face à la crise financière.
Même constat de la part du secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet, qui s’inquiète des conséquences sur les cours des changes. Selon lui, « on risque de se retrouver à des niveaux de l’euro par rapport au dollar qu’aucun Européen quel qu’il soit ne souhaite ». D’autant que cette baisse des taux d’intérêt américains pourrait se poursuivre. La Fed a ainsi suggéré qu’elle pourrait aller plus loin pour contrer les risques de récession.