Automobile

Roumanie : Grève illimitée chez Dacia

par Myriam Berber

Article publié le 25/03/2008 Dernière mise à jour le 25/03/2008 à 16:42 TU

Piquet de grève sur le site de Renault Dacia en Roumanie.
(Photo : AFP)

Les salariés roumains de l’usine Dacia, filiale du groupe automobile Renault, où est fabriquée la Logan, la voiture à bas prix du constructeur, sont en grève illimitée. Ils réclament 40% d’augmentation de salaires, la direction propose 19%.

Près de 10 000 salariés, sur les 13 000 de l’usine Dacia-Renault, en Roumanie ont entamé, lundi 23 mars 2008, un mouvement de grève pour une durée indéterminée. Premier constructeur automobile roumain, racheté en 1999 par le groupe français Renault, Dacia est devenu l’une des marques phares de Renault grâce au succès de la voiture à bas prix Logan. En 2007, Dacia a établi un nouveau record de ventes, avec 230 000 unités commercialisées en Roumanie et à l’étranger, soit une hausse de 17,4% par rapport à l’exercice 2006.  

Tous les employés entendent profiter de ces résultats spectaculaires enregistrés par Dacia. Le salaire brut moyen au sein du groupe est actuellement de 1 064 lei, soit environ 285 euros. Mais pour quelque 2 500 employés sans ancienneté, il ne dépasse pas les 780 lei bruts, soit 220 euros. Les salariés réclament donc une augmentation des salaires de 40 % pour s’adapter, disent-ils, au coût de la vie en Roumanie qui s’aligne de plus en plus sur celui de la moyenne européenne. Autrement dit une augmentation de salaires fixe de 550 lei, soit d'environ 150 euros ainsi qu’une majoration des primes de Pâques et de Noël. De son côté, la direction avance des chiffres différents concernant la rémunération de ses employés. Elle fait savoir qu’un salarié de l’usine franco-roumaine touche environ 600 euros bruts par mois, alors que la moyenne nationale est de 500 euros. Elle conteste également le nombre de grévistes : ils ne seraient que 49% du total, loin des 80% annoncés par les syndicats.

Une plainte pour « contester la légalité » de la grève

Le montant des majorations exigées par les grévistes a été jugé « inacceptable » par la direction de l’usine qui estime que les salariés ont déjà bénéficié d’augmentations de salaires moyennes de plus de 140%, soit près de cinq fois l’inflation sur la même période. Pour cette année, elle est prête à accorder une augmentation de 19%, primes comprises, et met en avant tous les autres avantages dont disposent les employés : primes diverses ou vacances, des tickets restaurants, réduction dans les transports en commun. Alors que les employés estiment que leurs revendications sont justifiées, compte tenu des bénéfices dégagés par l’usine ces dernières années, la direction estime, pour sa part, que ceux-ci, soit 300 millions d’euros entre 2005 et 2007, n’ont toujours pas compensé les pertes entre 2000 et 2004, soit 363 millions d’euros. La direction se déclare « ouverte à des négociations » avec les syndicats, mais annonce avoir déposé une plainte en justice pour « contester la légalité » de la grève. 

Les négociations s’annoncent serrées. La Roumanie se distingue, à l’heure actuelle, par une situation de plein emploi : le taux de chômage officiel n’atteint que 4%. Et dans certaines régions du pays, il y a même une pénurie de main-d'œuvre. D’où l’arrivée d’ouvriers asiatiques payés 30% moins cher que les Roumains. Dans le secteur automobile, la grève de Dacia pourrait représenter un signal d'alarme pour le constructeur américain Ford, qui vient de reprendre l'ancienne usine automobile de Daewoo à Craiova, dans le sud du pays. Ford compte investir 675 millions d’euros et produire chaque année, à partir de 2011, quelque 300 000 voitures de petite taille uniquement en Roumanie et exportées dans toute l’Union européenne. Le groupe américain va sans doute refaire ses calculs sur ses futurs investissements en Roumanie.