De retour samedi 26 avril à Dharamsala, en Inde, après sa visite aux Etats-Unis, le Dalaï Lama s'est dit prudemment satisfait de l'offre de rencontre faite par le gouvernement chinois, tout en réclamant des «
discussions sérieuses ». Pékin a indiqué vendredi être disposé à recevoir un «
représentant privé » du dirigeant tibétain, dans les «
prochains jours ». Une proposition d'ores et déjà saluée par les Etats-Unis, l'Allemagne, la France ou encore la Grande-Bretagne, visiblement soulagés à un peu plus de trois mois des Jeux Olympiques. Mais certains observateurs se demandent s'il ne s'agit pas surtout d'une opération de relations publiques dans la perspective des Jeux Olympiques.
Le Dalaï Lama parle aux médias à son arrivée à l'aéroport de Kangra, près de Dharamsala, le 26 avril 2008.
(Photo : AFP)
Avec l'annonce surprise de Pékin, les clignotants diplomatiques ont commencé à repasser au vert. Au grand soulagement des entreprises qui sponsorisent les Jeux Olympiques de Pékin. Coca Cola, Adidas, McDonald’s ou Volkswagen ont investi des millions de dollars. Ils ont fait profil bas de crainte de se fermer le marché chinois. Ils reprennent espoir après la course désastreuse de la flamme olympique en Occident et en Asie.
Mais cet espoir risque d'être de courte durée si la promesse chinoise se résume finalement à un effet d'annonce à usage extérieur. C'est ce que prophétisent certains sinologues spécialistes du Tibet. Tous attendent en tout cas de savoir quand et surtout avec qui, côté Chine, c'est-à-dire à quel niveau de représentation va commencer le dialogue promis.
En effet, depuis 2002, le gouvernement en exil du Tibet et l'entourage du Dalaï Lama sont en pourparlers avec des responsables chinois, sans avancées réelles, selon le Dalaï Lama, qui dénonce un durcissement de Pékin depuis 2006. Les derniers contacts remontent au milieu de l'année dernière. Alors aujourd'hui, il reste à savoir si Pékin a effectivement décidé de traiter la question du Tibet comme un problème qui mérite mieux qu'une répression ou une opération de relations publiques.
Les tentatives de dialogue des trente dernières années |
Il est bien peu probable que cette reprise de contact ouvre la voie à un dialogue politique entre la Chine et le gouvernement tibétain en exil, comme en témoignent les vaines tentatives de ces trente dernières années.
Il y a d'abord eu les missions d'enquêtes de 1979 et 1980. Trois séjours au Tibet d'émissaires du Dalaï Lama autorisés par le président chinois de l'époque, Deng Xiaoping. Puis, dans la foulée, une série de rencontres où Pékin se borne à évoquer le sort personnel du numéro un tibétain en exil.
Le « Plan de paix en cinq points » que propose le Dalaï Lama en 1987 à Washington, et qu'il détaille l'année suivante à Strasbourg devant le Parlement européen, n'y change rien. Au contraire, l'autonomie culturelle, religieuse et politique revendiquée sur la région administrative mais aussi sur les enclaves tibétaines des provinces voisines, est tout simplement inacceptable pour Pékin qui interrompt les contacts formels en 1993.
Quand les contacts reprennent en septembre 2002, c'est selon le même schéma : visites tibétaines à Lhassa mais refus de discussion sur ce qu'on appelle désormais la « voie médiane », que Pékin assimile toujours à du séparatisme.
Six rencontres plus tard, le fil est à nouveau rompu l'été dernier, Pékin ne voulant et ne pouvant au fond se résoudre à une quelconque concession politique qui non seulement inspirerait d'autres minorités mais ébranlerait aussi et surtout deux piliers du régime : le centralisme et la suprématie du parti. |