par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 12/05/2008 Dernière mise à jour le 12/05/2008 à 16:02 TU
« Les citoyens de la Serbie ont confirmé qu'il souhaitaient que la Serbie fasse partie de l'Union européenne », a déclaré le président Tadic, en appelant à la formation rapide d'un nouveau gouvernement.
( Photo : AFP )
Les électeurs ont fait mentir les sondages, qui prévoyaient un match très serré entre le Parti radical serbe (SRS, extrême-droite nationaliste) et la Coalition pour une Serbie européenne, qui regroupe, autour du Parti démocratique (DS), de petites formations comme le Mouvement serbe du renouveau de l’inusable Vuk Draskovic, grande figure de l’opposition serbe depuis le début des années 1990, ou les libéraux du G17 Plus.
Le Parti radical n’a obtenu que 28,2% des voix, une évidente contre-performance alors que son candidat, Tomislav Nikolic, n’avait été battu que d’une courte tête par Boris Tadic au second tour des élections présidentielles, le 3 février dernier. L’autre grand perdant de la journée de dimanche est le Premier ministre démissionnaire, le conservateur Vojislav Kostunica, dont les partisans n’ont recueilli que 11,2% des suffrages.
S’adressant à plusieurs centaines de sympathisants rassemblés dimanche soir dans le centre de Belgrade, Boris Tadic a souligné le sens de cette victoire : les Serbes aspirent à une vie « normale », ce qui suppose la poursuite du processus d’intégration européenne du pays. Dans les jours qui ont précédé l’élection, l’Europe a fait plusieurs gestes qui ont sûrement pesé sur l’issue du scrutin : le 29 avril, l’Accord d’association et de stabilisation (ASA), première étape vers l’intégration, a finalement été signé avec la Serbie et, il y a une semaine, 17 pays européens ont décidé d’octroyer des visas gratuits à certaines catégories de citoyens serbes. Pour une population privée de liberté de circulation depuis 1992, cette mesure donne une signification concrète à la perspective européenne.
Scénarios pour une coalition
Malgré sa large victoire, le Parti démocratique se retrouve néanmoins devant la tache difficile de former un nouveau gouvernement, et de trouver des partenaires de coalition. Il peut compter sur les 7 élus des minorités nationales, mais cela ne suffira pas.
En théorie, une alliance serait possible avec le Parti libéral démocratique, qui disposera de 13 députés, mais la formation la plus courtisée sera certainement le Parti socialiste de Serbie (SPS), fort de ses 20 députés. L’ancien parti de feu Slobodan Milosevic se retrouve en effet en position d’arbitre. La logique voudrait qu’il penche du côté des nationalistes, mais il a amorcé depuis plusieurs mois des tractations en coulisse pour se rapprocher du Parti démocratique. L’objectif des derniers fidèles de Milosevic est simple : devenir un parti de gauche respectable et adhérer à l’Internationale socialiste. Dans cette perspective, le Parti socialiste de Serbie pourrait devenir un partenaire de coalition fort acceptable pour le Parti démocratique.
Des tractations compliquées risquent donc, malgré tout, de s’engager, alors que des échéances urgentes attendent la Serbie, notamment au Kosovo. Dans ce territoire qui a proclamé, le 17 février dernier, une indépendance que Belgrade refuse de reconnaître, les élections étaient également organisées dans les zones serbes. La participation a même été plus forte que jamais : près de 55% des 91 000 électeurs serbes inscrits au Kosovo se sont rendus aux urnes. Pour eux, voter revenait surtout à affirmer que le Kosovo fait toujours partie de la Serbie.
La satisfaction de la France |
« Le 11 mai, très clairement, la Serbie a fait le choix de l'Europe » ont estimé lundi le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, et le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet, dans un communiqué. Bernard Kouchner s'est entretenu « au téléphone avec les dirigeants du parti démocrate pour leur transmettre ses félicitations ». « A la suite de cette élection, nous allons travailler pour concrétiser les perspectives européennes de la Serbie », continue le communiqué, « les Serbes savent qu'ils peuvent compter sur l'Europe et la France ». La France présidera l'Union européenne pour 6 mois à compter du 1er juillet 2008. |
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