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Israël

Ehud Olmert sur RFI

Article publié le 13/05/2008 Dernière mise à jour le 13/05/2008 à 07:26 TU

Ehud Olmert pendant une conférence de presse, le 11 mai à Jérusalem.( Photo : Reuters )

Ehud Olmert pendant une conférence de presse, le 11 mai à Jérusalem.
( Photo : Reuters )

Le Premier ministre israélien a accepté de répondre aux questions de trois radios françaises ce lundi, Europe 1, le groupe Radio France, et RFI. Ehud Olmert revient sur ses déboires judiciaires, qu'il relativise, sur les chances d'aboutir à un accord avec les Palestiniens d'ici la fin de l'année, auxquelles il croit, sur la menace iranienne, et sur ses relations avec Nicolas Sarkozy : une « histoire d'amour », dit-il. Entretien réalisé pour RFI par Catherine Monnet, notre envoyée spéciale permanente à Jérusalem.

La tourmente judiciaire et ses conséquences

Question : Vos ennuis judiciaires vont-ils vous contraindre à démissionner ?

Ehud Olmert : J’espère que non. C’est devenu courant, dans presque tous les pays démocratiques occidentaux modernes, les Premiers ministres font l’objet d’enquêtes, d’accusations, notamment dans le domaine du financement des campagnes électorales. C’est désagréable. On s’en passerait bien. Mais quand tous les faits seront clairement établis, on aura une version des faits complètement différente.

Question : De nombreux responsables politiques s’interrogent sur votre capacité à continuer à gouverner  le pays et à négocier avec les Palestiniens, dans ces circonstances ?

Ehud Olmert : Vous n’avez qu’à leur demander... Ils vous diront que je le fais de façon relativement efficace. Regardez ! Quand vous gouvernez, vous avez tellement de responsabilités sur les épaules que vous devez être capable de garder le contrôle, de  vous concentrer sur les priorités que vous vous êtes fixées, et de mettre à leur vraie place les autres questions. Je ne sous-estime pas les difficultés. Mais je gouverne, et je  vais continuer à gouverner

Question : Toutefois la scène politique israélienne est en effervescence. Certains hommes politiques, y compris dans votre propre camp, préparent leurs armes. On parle même d’élections anticipées…

Ehud Olmert : Il n’y a pas eu, ces dix dernières années, une seule élection qui n’ait pas donné lieu à un scrutin anticipé ! Donc  il n’y a rien de nouveau. Cela fait partie de la vie politique en Israël. D’ailleurs, je ne connais pas un seul homme politique ou un Premier ministre comme moi qui n’ait pas dix amis avec des couteaux dissimulés dans le dos,  prêts à les sortir. C’est la politique. Si vous ne voulez pas être mêlé à cela, il ne faut pas y rentrer. Si vous en êtes, vous savez que cela se passe comme cela, et que vous devez être prêt à faire face. Moi, je suis prêt !

Question : Selon les sondages, 59% des Israéliens veulent que vous démissionnez…

Ehud Olmert : C’est désagréable mais ça a été pire, ça a été mieux, et ça ira mieux à l’avenir…

Question : Est-il possible que ces accusations aient pour but de vous empêcher de faire des concessions avec les Palestiniens ?

Ehud Olmert : Je ne sais pas, mais ça ne m’arrêtera pas.

Le processus de paix

Question : Vous avez rencontré le général Omar Suleiman, le chef du renseignement égytien, venu vous présenter les propositions de trêve du Hamas. Comment s’est passée la rencontre ?

Ehud Olmert : Nous avons eu des discussions très encourageantes.  Mais j’ai déjà dit et répété que s'il n’y avait pas de terrorisme à Gaza, Israël n’aurait pas à répliquer. Maintenant, la balle est dans leur camp. Nous ne cherchons pas particulièrement à nous battre avec les Palestiniens à Gaza. Ils gouvernent un petit fief entièrement dédié au terrorisme. Israël n’occupe pas un pouce de terre de Gaza, on a entièrement évacué en 2005. Les Palestiniens n’ont aucune raison de s’en prendre à nous, mais ils continuent d’attaquer jour après jour des Israéliens innocents avec des roquettes, des attentats-suicide, des tirs de mortiers et toutes sortes de moyens violents.  Et naturellement, on doit riposter, mais jusqu’à présent, on n’a pas utilisé toute notre puissance, tous les moyens que nous avons à notre disposition pour les arrêter. Mais bien sûr, on peut le faire. On espère qu’on n'aura pas à le faire, et qu’ils arrêteront.

Question :  Mais est-ce qu’Israël se dirige vers un cessez-le-feu avec le Hamas?

Ehud Olmert : Israël a posé ses conditions qui sont indispensables :  qu’il y ait un calme total au sud entre nous et les terroristes ; ces demandes ont été présentées explicitement au général Suleiman, qui n’est pas un négociateur entre nous et le Hamas. Il se préoccupe du dossier parce que ce n’est pas dans l’intérêt de l’Egypte d’avoir dans le sud une explosion de violence à grande échelle, et il veut empêcher cela. On lui a expliqué nos conditions pour éviter une dégradation de la situation. Maintenant on attend de voir…

Question : George Bush revient en Israël pour le 60e anniversaire du pays, et dans la région pour rediscuter du processus de paix. Pensez-vous qu’un traité de paix puisse être signé avec les Palestiniens avant fin 2008, comme le président Bush s’y est engagé à Annapolis ?

Ehud Olmert : On veut essayer de parvenir à une entente qui va jeter les bases d’une solution à deux Etats, avant la fin 2008. Ca ne veut pas dire que cela pourra être fait, ou que cela sera fait très vite. Car tout dépendra de l’application de la feuille de route, qui prendra plus de temps en raison du terrorisme à Gaza, de la faiblesse de l’Autorité palestinienne. Mais l’idée est d’abord de définir les contours d’une solution à deux Etats. A quoi ressembleront ces deux Etats ? Quelles seront les frontières ? Quelles seront les garanties de sécurité ? Comment sera réglé le problème des réfugiés ? Est-ce que l’on peut le faire ? Tout d’abord, il faudra se mettre d’accord sur le principe, ensuite il faudra commencer à prendre des mesures sur la base de la feuille de route, jusqu’à ce que nous arrivions à la phase finale de sa mise en œuvre. C’est le concept. Quant aux arrangements sur les contours d’une solution à deux Etats qui doivent encore être précisés, eh bien, on essayera d’y parvenir d’ici la fin 2008. Et, oui, si vous me demandez si on peut y arriver d’ici la fin 2008, ma réponse est oui.  Quand est-ce qu’on le fera ? On ne sait pas. Je déploie des efforts exceptionnels. C’est une grande mission, si on parvient à le faire, cela sera une percée historique et un changement majeur dans la région comme il n’en est plus arrivé depuis des années.  Je ne suis pas très optimiste mais je suis absolument déterminé à faire tous les efforts pour y arriver.

Question :  Pour parvenir à la paix, il faudra faire beaucoup de concessions, sur Jérusalem, les frontières, les réfugiés… Etes-vous prêt à les faire ?

Ehud Olmert : Les deux côtés doivent faire des concessions. Je dois faire des concessions, et Abou Mazen doit en faire. Je suis prêt à en faire et j’attends de voir où Abou Mazen est prêt à faire des concessions. S'il en fait, j’en ferai, mais je ne suis pas prêt à tout brader.

Question : Avec qui allez-vous allez signer la paix, alors qu’il y a, de facto, deux Palestine, une à Ramallah avec le Fatah, et une à Gaza avec le Hamas ?

Ehud Olmert : Non, vous faites erreur.  Un homme seulement a été élu démocratiquement par tous les Palestiniens, c’est le Docteur  Mahmoud Abbas.  C’est le seul qui, formellement et officiellement, représente le peuple palestinien, et est reconnu comme tel par le monde entier. Après, il y a des Palestiniens qui ont pris le contrôle illégalement d'une partie du pays, sur ce que doit devenir l’Etat palestinien à Gaza, mais ils ne sont pas les représentants légitimes du peuple palestinien. 

La situation régionale : le Liban, l'Iran

Question : La situation s’est fortement dégradée ces derniers jours au Liban. Vous êtes inquiet ? …

Ehud Olmert : Nous sommes très attentifs à l’intégrité du Liban et sa stabilité, et nous ferons tout ce que nous pouvons pour parvenir à un accord avec le Liban, tôt ou tard. Je regrette de voir que la stabilité politique du Liban n'est pas correctement respectée par les différentes parties libanaises. Ce n’est pas bien, ce n’est pas dans notre intérêt. Nous suivons les événements au Liban de très près. 

Question : Israël est-il prêt à rendre le Golan à la Syrie ?

Ehud Olmert : Il y a des questions importantes avec la Syrie. Nous sommes prêts à négocier avec la Syrie ; on espère le faire avec la Syrie, je suis prêt à faire la paix avec tous les pays arabes qui veulent. C’est mon désir, mon rêve, ma mission...

Question : Les pourparlers entre la Syrie et Israël ne se font-ils pas au détriment du Liban ?

Ehud Olmert : Nous voulons négocier avec la Syrie. S'il y a des négociations et quand il y en a aura, croyez moi, on essayera de ne pas divulguer les détails de ces négociations, on essayera de garder ces négociations à huis clos pour les rendre plus efficaces.

Question : Israël considère l’Iran comme sa menace principale. Où est la ligne rouge ?

Ehud Olmert : Je l’ai déjà dit clairement à l’ensemble des responsables occidentaux, y compris au président Nicolas Sarkozy : on ne peut pas laisser l’Iran devenir une puissance nucléaire. C’est cela, la ligne rouge pour nous. Israël ne peut tolérer l’idée qu’un ennemi qui ne cesse de déclarer qu’il veut rayer Israël de la carte puisse posséder des armes non-conventionnelles. Je pense que c’est cela, l’objectif : empêcher l’Iran d’avoir des armes non conventionnelles. C’est la priorité et la responsabilité des pays occidentaux, de toutes les grandes puissances du monde, et j’espère qu’elles sont conscientes du danger, et qu’elles feront tout ce qui est nécessaire pour arrêter cela. C’est évident, un pays qui déclare qu’il veut rayer Israël de la carte ne doit pas posséder l’arme nucléaire pour mettre sa menace à exécution, et c’est tout. Et donc, on doit s’assurer qu’il ne possèdera pas l’arme nucléaire, mais comment ? ... 

Question : Bernard Kouchner a déclaré il y a quelques mois qu’il pourrait y avoir la guerre…

Ehud Olmert : Chacun est responsable de ce qu’il dit.

Les relations avec la France

Question : Le président Nicolas Sarkozy va venir en visite d’Etat le mois prochain. On parle d’une lune de miel des relations franco-israéliennes….

Ehud Olmert : Ce n’est pas seulement une lune de miel, c’est une histoire d’amour ! Je pense que Nicolas Sarkozy est un très bon ami d’Israël. Je l’apprécie personnellement. Avant même qu’il soit élu président, il m’a dit qu’il voulait absolument venir en Israël. Quand il a été élu, il m’a répété qu’il voulait absolument venir. Maintenant, il vient célébrer avec nous le 60e anniversaire. La France a toujours été un grand ami d’Israël et du peuple juif. Les juifs se sont épanouis en France, ils ont été de toutes les grandes réalisations, ils caractérisent la culture française, les intellectuels, la technologie… Nous avons toujours eu de bonnes relations avec la France. Parfois, il y a eu quelques tensions, et cela a été un peu difficile. Dieu merci, ces relations sont maintenant ce qu’elles doivent être avec un président ami, un gouvernement ami, un peuple ami, et nous espérons qu'elles continueront à se développer dans ce sens.

En audio

Ehud Olmert

Premier ministre israélien

On veut essayer de parvenir à une entente qui va jeter les bases d'une solution à deux Etats avant la fin 2008.

13/05/2008 par Catherine Monnet