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France

Pêcheurs : ça bloque toujours

par Myriam Berber

Article publié le 23/05/2008 Dernière mise à jour le 23/05/2008 à 16:18 TU

Les marins pêcheurs de la Rochelle mobilisés contre la hausse du carburant.(Photo : Reuters)

Les marins pêcheurs de la Rochelle mobilisés contre la hausse du carburant.
(Photo : Reuters)

Dans les ports, la tension restait vive vendredi. Mécontents, les marins-pêcheurs français continuent de multiplier les actions, poursuivant le blocus des ports et de dépôts de carburants. Le plan gouvernemental destiné à compenser la hausse du prix du gazole annoncé par le ministre de l’Agriculture Michel Barnier n’a pas calmé la colère des pêcheurs qui protestent contre le prix du gazole. Une grogne qui pourrait bientôt être relayée par d’autres corporations. Les transporteurs routiers ou bien encore les taxis sont, eux aussi, concernés par la hausse du gazole.

Les marins-pêcheurs français n’ont pas repris le travail ce vendredi et une bonne part des ports de pêche de Bretagne (Saint-Malo, Roscoff, Le Guilvinec), de la côte Atlantique (les Sables d’Olonne) et de la Manche sont toujours bloqués. Sur le terrain, les pêcheurs du Pas-de-Calais ont mis fin à leur « opération escargot » destinée à ralentir les navires marchands dans la zone. Mais les accès à plusieurs dépôts pétroliers continuaient d’être partiellement bloqués, comme la raffinerie de Total à Dunkerque. En Normandie, une centaine de pêcheurs ont vidé, vendredi matin, les étals de grossistes en poissons de Caen. D’autres ont vidé des rayons de poissons à Arcachon, Quimper ou bien encore à Port-la-Nouvelle dans l’Aude. Et partout la même revendication : « payer le litre de gazole à 40 centimes d’euros au lieu de 75 centimes actuellement ».

Outre le prix du gazole, les pêcheurs se plaignent également de la difficulté à vendre plus cher leur poisson et de la réduction des quotas de pêche au cabillaud. A l’issue d’une intense négociation, le ministre de l’Agriculture et de la Pêche Michel Barnier a annoncé, mercredi, le déblocage d’un chèque d’urgence de 110 millions d’euros en faveur des pêcheurs. Une enveloppe qui fait partie du plan d’action de 310 millions d’euros annoncé en janvier. Mais prévu pour trois ans, ce plan va être compacté sur deux ans.

Un système d’aide durable

Pour compenser la hausse du prix du gazole, ce plan englobe notamment une aide sociale de 40 millions d’euros de soutien aux revenus des pêcheurs et une enveloppe de 22 millions pour les patrons pêcheurs. Les pêcheurs auront « le gazole à 40 centimes, pas à la pompe car c'est formellement interdit par Bruxelles, mais par un système d'aide aux équipages », a précisé André Le Berre, président du comité des pêches de Bretagne. Avant d’expliquer : « chaque marin pourra amener sa fiche de paie avec les carburants consommés par son navire et il sera remboursé de la différence ».

François Fillon

Premier ministre français

« Nous avons l'accord des autorités européennes sur les dispositions proposées pour aider les pêcheurs à surmonter la crise. »

écouter 01 min 05 sec

23/05/2008 par Eric Chaurin


Le Premier ministre, François Fillon, a affirmé vendredi à Copenhague que la France avait obtenu le feu vert de Bruxelles pour attribuer cette aide sociale. La Commission avait, en effet, indiqué jeudi son intention d’être vigilante à propos des mesures annoncées par Paris, soulignant que diminuer les prix du gazole constituerait une distorsion de concurrence incompatible avec les règles européennes. Michel Barnier a assuré vendredi que l’aide sociale de 40 millions serait versée avant le 15 juin et surtout qu’elle serait « durable » et « maintenue au-delà de six mois ». Si les représentants nationaux du secteur sont plutôt dits rassurés. La base n’est visiblement pas convaincue par « un mécanisme de compensation sociale qu’ils jugent complexe » et qui ne répond pas à la crise profonde de la filière. Même s’ils ne payent pas les taxes sur le gazole, les pêcheurs professionnels avaient tablé sur un gazole à 30 voire 40 centimes d’euros le litre cette année. Il est aujourd’hui à 75 centimes d’euros. Les dépenses de carburant peuvent représenter jusqu'à 40% de leurs charges

Après les pêcheurs, les transporteurs routiers

Un manque à gagner qui touche autant les patrons que les salariés. En effet, un mécanisme de paiement « à la part » prévoit un intéressement aux produits de la pêche mais aussi la participation des salariés à certains frais comme le carburant. A titre d’exemple, un chalutier de mer consomme jusqu’à 40 000 litres de carburant par marée. Et la factura a plus que doublé en quelques mois. Les marins sont d’autant plus impuissants qu’aucun système de compensation du prix de gazole n’existe en France et qu’ils ne peuvent pas répercuter cette augmentation de charges sur le prix du poisson, vendu aux enchères à la criée, fixé par les grossistes et les mareyeurs. Un marché de l’offre et de la demande actuellement plutôt atone. C’est pourquoi bon nombre de pêcheurs revendiquent un prix plancher du poisson. Michel Barnier s’est engagé à tenir le 29 mai prochain une réunion sur la « formation et la transparence des prix dans la filière de la pêche » avec les marins-pêcheurs, les mareyeurs et la grande distribution.

Cette situation devrait perdurer dans la mesure où le cours du pétrole est en hausse continue depuis plusieurs mois. Ainsi, pour la première fois, le Brent de la mer du Nord comme le brut américain a grimpé, jeudi, au-dessus des 135 dollars le baril. En France, la grogne des pêcheurs pourrait bientôt être relayée par d’autres corporations. Les transporteurs routiers en passant par les taxis ou les ambulanciers sont, eux aussi, entrés dans une zone à risques. Les organisations patronales des routiers n’excluent pas de se mobiliser et envisagent des « opérations escargot » sous quinzaine dans plusieurs régions de France. L'Organisation des transporteurs routiers européens (OTRE) qui regroupe près de 4 500 PME demande un gel des prélèvements obligatoires et un étalement des charges. La Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) a, elle aussi, appelé le gouvernement à prendre des mesures pour les transporteurs de voyageurs dont la situation économique est « fortement pénalisée » par la hausse du gazole.