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Zimbabwe

Visite controversée de Robert Mugabe à Rome

par  RFI

Article publié le 02/06/2008 Dernière mise à jour le 03/06/2008 à 11:06 TU

Le président Zimbabwéen Robert Mugabe et sa femme, à l'aéroport de Fiumicino à Rome, le 1er juin 2008.(Photo: Reuters)

Le président Zimbabwéen Robert Mugabe et sa femme, à l'aéroport de Fiumicino à Rome, le 1er juin 2008.
(Photo: Reuters)

Le président zimbabwéen Robert Mugabe est arrivé dimanche soir à Rome pour assister au sommet de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) consacré à la crise alimentaire mondiale. Ce déplacement intervient alors que le président zimbabwéen est en campagne pour le second tour de la présidentielle face à l'opposant Morgan Tsvangirai, leader du Mouvement pour le changement démocratique (MDC). Un dissident de cette organisation, Arthur Mutambara, a été interpellé dimanche soir à Harare et libéré sous caution ce mardi. La police a également arrêté 70 personnes soupçonnées d'avoir participé à une attaque menée la semaine dernière contre des membres du Zanu-PF, le parti de Robert Mugabe.

C'est le premier déplacement à l'étranger de Robert Mugabe depuis les élections législatives du 29 mars, remportées par l'opposition. Selon la télévision d'Etat zimbabwéenne, Mugabe est accompagné de son épouse, Grace, et de plusieurs responsables de son gouvernement. Or, l'Union européenne a imposé au président zimbabwéen, et à plusieurs de ses proches, une interdiction d'entrée sur son territoire en raison des atteintes aux droits de l'homme commises dans son pays. Mais cette interdiction ne concerne pas les sommets organisés par les Nations unies sur le territoire européen. Et c'est le cas de cette réunion de la FAO, l'agence onusienne pour l'agriculture et l'alimentation.

A l'occasion d'un sommet similaire, également à Rome, en octobre 2005, Robert Mugabe s'était illustré par des propos qui avaient fait scandale. Il avait comparé George Bush et Tony Blair aux fascistes Adolf Hitler et Benito Mussolini. Il avait aussi dénoncé les pays donateurs, les accusant de déverser des vivres inutiles sur le Zimbabwe. Pourtant, le pays traversait déjà à l'époque une crise alimentaire grave. En avril dernier, la FAO a tiré la sonnette d'alarme, indiquant que la sécheresse dans plusieurs régions du Zimbabwe risquait de compromettre sérieusement la prochaine récolte de maïs.

La visite de Mugabe dans la capitale italienne a suscité un grand nombre de réactions. L’opposition zimbabwéenne estime que « Mugabe n’a aucun mandat et aucune légitimité pour être à Rome ». Le Premier ministre britannique Gordon Brown considère que la présence du président du Zimbabwe au sommet de la FAO est « particulièrement regrettable, étant donné sa contribution aux difficultés liées à la situation alimentaire » dans son pays. Le gouvernement australien a jugé « obscène » ce déplacement de Mugabe, tandis que le gouvernement français s’est interrogé, lundi, sur « l’opportunité de cette visite, compte tenu de la situation au Zimbabwe ». Le secteur agricole du pays, autrefois considéré comme le « grenier de l’Afrique australe », s’est effondré, depuis que le régime de Robert Mugabe a décidé de mettre en pratique une réforme agraire en 2000. Le Zimbabwe est également frappé par une hyperinflation annuelle de près de 165 000%. De nombreux autres dirigeants vont participer à ce sommet de Rome : le président français Nicolas Sarkozy, le Brésilien Lula da Silva, l’Espagnol José Luis Zapatero, le Sénégalais Abdoulaye Wade, ainsi que le président iranien Mahmoud Ahmadinedjad.

Tension à l’approche du second tour de la présidentielle

Le déplacement de Robert Mugabe à Rome survient alors que le chef de l'Etat zimbabwéen est en campagne pour le second tour de la présidentielle face à l'opposant Morgan Tsvangirai du MDC. Ce parti assure qu'au moins 50 de ses partisans ont été tués, des centaines blessés et plus de 25 000 déplacés en représailles. Le MDC accuse également le régime de vouloir intimider les électeurs avant le second tour du 27 juin. La police a arrêté 70 personnes après l'attaque menée la semaine dernière contre des vétérans de la guerre de libération, mais aussi contre des membres de la Zanu-PF, le parti au pouvoir. Le régime attribue ces violences au MDC, dont un dissident, Arthur Mutambara, a été arrêté à Harare.

C'est pour un article publié au mois d'avril qu'Arthur Mutambara a été interpellé dimanche soir. Après avoir pris ses distances avec Morgan Tsvangirai pendant la campagne électorale, Mutambara le soutient désormais. Il a signé une tribune dans les colonnes du Standard, le seul hebdomadaire indépendant au Zimbabwe, dans laquelle il accuse le chef de l'Etat de « ruiner l'économie » du pays et les forces de sécurité de commettre des violences. Le mois dernier, l'éditeur du Standard avait été arrêté pour avoir publié cet article. Cette fois, c'est donc Mutambara lui-même qui est interpellé. Selon son avocat, l'opposant est accusé de « mensonges » et « d'outrage à magistrat ». Il a été libéré sous caution ce mardi. En sortant du tribunal, il a notamment déclaré : « Ce qui m'est arrivé n'est rien en comparaison de ce que les Zimbabwéens vivent. Mugabe viole les droits de nos citoyens, mais aucune violation des droits de l'homme ne réussira. Nous triompherons sur le mal. »

Un autre représentant du MDC a également été interpellé ce week-end. Eric Matinenga est député d'une circonscription de l'est du Zimbabwe. Il est accusé « d'incitation à la violence ». Une attaque contre des partisans de Robert Mugabe avait été menée, la semaine dernière, dans cette circonscription. Soixante-dix personnes ont été arrêtées dans cette affaire lundi matin. Eric Matinenga est le cinquième député du MDC à être interpellé à l'approche du second tour de l'élection présidentielle.