par Julie Lerat
Article publié le 28/08/2008 Dernière mise à jour le 28/08/2008 à 22:07 TU
Radovan Karadzic lors de sa première comparution au Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye, aux Pays-Bas, le 31 juillet 2008.
(Photo : Reuters)
« Plaidez-vous coupable ou non coupable ? » La question sera posée ce vendredi à Radovan Karadzic, qui comparaîtra pour la deuxième fois devant les juges du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. L’ancien chef des Serbes de Bosnie devrait sans surprise plaider non coupable et, s’il décidait de ne pas répondre à la question du juge, il serait automatiquement prononcé en son nom qu’il plaide non coupable. Sur ce point, il y a donc relativement peu de suspens.
Radovan Karadzic pourrait également préciser sa stratégie de défense. Il a déjà fait savoir lors de sa première comparution, il y a un mois, qu’il se représenterait lui-même durant le procès. Mais il avait demandé à pouvoir bénéficier du délai légal de 30 jours prévu pour confirmer sa position, comme l’avait fait avant lui son ancien mentor, l’ex-président serbe Slobodan Milosevic. Et comme lui, Radovan Karadzic pourrait construire sa défense sur la mise en cause de la légitimité du tribunal de La Haye.
Radovan Karadzic, procédurier
Déjà, lors de sa première comparution, Radovan Karadzic n’avait cessé de dénoncer des irrégularités lors de son arrestation – il dit avoir été « enlevé » un vendredi alors que son arrestation n’a été officiellement annoncée que le lundi suivant. Il avait donné le ton, en se montrant très procédurier. Au point que le juge avait dû lui signifier, à plusieurs reprises, que les requêtes devaient être rédigées par écrit, et selon un certain nombre de règles juridiques. Ce qui n’a pas empêché l’ancien chef des Serbes de Bosnie d’insister.
Dans une requête rendue publique ce mardi, Radovan Karadzic a demandé l’annulation de son procès. « Violations des procédures, (…) non respect de mes droits, (…), possibilité de liquidation judiciaire, (…) il faut que ces questions soient éclaircies avant la poursuite des procédures contre moi », a-t-il écrit. Avant de conclure en demandant « l’annulation de (son) procès pour ces raisons ».
Une semaine plus tôt, Radovan Karadzic avait demandé le remplacement des juges chargés de la phase préparatoire de son procès. Il estime, en effet, que le juge Alphons Orie a un « intérêt personnel » dans son affaire, car une lourde condamnation de Karadzic légitimerait les décisions que le juge a prises dans le passé concernant d’autres criminels de guerre. L’ancien chef des Serbes de Bosnie demande également le remplacement des autres magistrats qui assistent Alphons Orie.
Controverse autour d’un « accord » passé avec les Etats-Unis
Ce vendredi, Radovan Karadzic pourrait également poursuivre sur ce qui a été l’un de ses principaux arguments de défense devant les juges : un « accord » qu’il dit avoir passé avec Richard Holbrooke, l’ancien négociateur américain lors des accords de Dayton. Selon Radovan Karadzic, Holbrooke lui aurait promis qu’il ne serait pas poursuivi devant le TPIY s’il disparaissait de la vie publique et politique – ce qu’il a fait à partir de 1997. Aujourd’hui, l’ancien négociateur américain chercherait à le « liquider », selon les termes employés par Karadzic.
Richard Holbrooke a toujours nié l’existence de cet accord. S’il a bien négocié le départ de Radovan Karadzic, Richard Holbrooke affirme qu’il n’a jamais promis, en échange, que le chef des Serbes de Bosnie ne serait pas poursuivi. Selon l’ancien négociateur américain, il s’agit là de « désinformation » et il est « complètement faux » de dire que les Etats-Unis auraient promis à Radovan Karadzic qu’il ne serait pas poursuivi.
« Afin de pouvoir assurer que le procès est légalement défendable, je propose que (…) vous ordonniez que Richard Holbrooke comparaisse devant nous et déclare sous serment s’il y avait ou non un (tel) accord », a écrit Radovan Karadzic dans une autre requête aux juges du TPIY. Une manière, pour l’ancien chef des Serbes de Bosnie, de faire diversion. Radovan Karadzic comparaît pour crime contre l’humanité, crimes de guerre, génocide, entre autres. Plutôt que d’écouter les juges établir sa responsabilités lors du massacre de Srebrenica - 8 000 civils tués - et du siège de Sarajevo - 10 000 morts en 3 ans - Radovan Karadzic semble avoir choisi de mener le procès de la communauté internationale.