par Frédérique Misslin
Article publié le 09/09/2008 Dernière mise à jour le 10/09/2008 à 07:29 TU
George W. Bush lors de son allocution devant la National Defense University, le 9 septembre 2008.
(Photo : Reuters)
Sans surprise, George Bush a suivi les recommandations de ses conseillers militaires et civils, au premier rang desquels se trouve le général David Petraeus. Dans six mois, les Etats-Unis rapatrieront modestement 8 000 militaires actuellement postés en Irak. Le corps expéditionnaire américain sur place comptera alors 138 000 soldats.
Au plus fort de son déploiement en Irak, début 2007, l’armée américaine comptait 170 000 militaires. Washington se lançait alors dans un spectaculaire changement de stratégie, baptisé « Surge », pour éviter le chaos. 30 000 hommes supplémentaires avaient été envoyés sur place.
Aujourd’hui, c’est un retrait timide que propose George Bush, juste avant de quitter le pouvoir. Preuve que la stabilisation de la situation en Irak demeure fragile. En effet, le terrain reste miné : Bagdad espère pouvoir organiser des élections provinciales avant la fin de l’année mais il existe des blocages politiques persistants.
D’autres questions sont en suspens : le ralliement des anciens insurgés à la politique américaine est-il durable ? Que fera le remplaçant du général Pétraeus (le général Raymond Odierno) le 16 septembre prochain ? Devant la National Defense University, le président Bush a tout de même insisté sur les progrès accomplis ces derniers mois, son discours soulignait que la violence avait considérablement baissé en Irak, le niveau est désormais celui de 2004.
« L'une des tâches qui nous attend est de parvenir à la conclusion d'un accord stratégique et sur le statut des troupes entre les Etats-Unis et l'Irak. »
Renforcer le front afghan
En revanche Washington estime que « d’immenses défis demeurent en Afghanistan ». Le commandement de l’OTAN réclame 12 000 hommes supplémentaires dans un pays où la bataille contre les talibans fait rage. Les militaires n’ont pas vu cela depuis 2001, 260 civils afghans ont été tués au mois de juillet dernier.
Sur place les Etats-Unis disposent de 33 000 militaires (contre 146 000 actuellement en Irak). Ces soldats participent aux missions de l’OTAN mais certains sont également en charge de la lutte anti-terroriste sous la responsabilité directe du Pentagone. George Bush a annoncé qu’un bataillon de marine, qui devait être envoyé en Irak, serait finalement expédié en Afghanistan. Une brigade de combat de l’armée de terre l’y rejoindra en janvier 2009, soit 4 500 personnes au total.
L’administration américaine semble contrariée par la détérioration de la situation en Afghanistan. Ce dossier sera le principal défi du général David Petraeus qui va désormais être à la tête du Centcom (le commandement central américain). Le fait que les talibans utilisent comme base de repli les zones tribales pakistanaises complique la situation lorsqu’on sait qu’officiellement le Pakistan est un allié de Washington.
Les forces armées irakiennes prennent le relais
En Irak, « il y a encore huit mois nous préconisions un démantèlement de la police nationale » pour cause de corruption et d’inefficacité, reconnaît le général Franck Helmick. Ce haut gradé affirme aujourd’hui que « le changement a été remarquable ».
C’est au printemps dernier que les progrès ont été les plus visibles, lorsque les forces irakiennes ont défait la milice de Moqtada Sadr (l’Armée du Madhi), à Bassorah. Une démonstration de force qui a permis à l’Etat irakien de s’affirmer. Il dispose aujourd’hui de 560 000 policiers et 260 000 soldats. En ce qui concerne l’équipement de ses forces armées, Bagdad négocie actuellement à l’étranger l’achat de fusils d’assaut M16 et de chasseurs F16.
Au vu des progrès accomplis, l’armée américaine a déjà transféré aux forces irakiennes 11 des 18 provinces du pays. Dans ces zones, les soldats américains se cantonnent désormais à soutenir et superviser. L’amiral Driscoll résume ainsi la mission actuelle des GI’s « nous avons à la fois une mission de formation et une mission anti-insurrection. On construit l’avion tout en le faisant voler, ce qui est difficile ».
La stratégie du général Petraeus semble pourtant avoir payé. Elle consiste à rallier les ex-rebelles sunnites pour combattre al-Qaïda, 100 000 « Sahwas », membre des milices du Réveil, sont ainsi payés par les Américains pour maintenir la sécurité. Pour combien de temps ?
Le retrait annoncé aujourd’hui par George Bush intervient au moment où Bagdad et Washington finalisent un accord de sécurité qui doit réglementer la présence des troupes américaines en Irak, lorsque le mandat de l’ONU arrivera à expiration à la fin de l’année 2008. Les irakiens, eux, réclament haut et fort un retrait complet des troupes étrangères à l’horizon 2011.
La suite après la présidentielle américaine…
A deux mois de l’élection présidentielle aux Etats-Unis, George Bush laisse donc à son successeur, le soin de trancher sur les effectifs américains en Irak. Il lègue à son remplaçant une présence militaire a priori plus forte qu’elle ne l’était il y a deux ans. Selon les sondages pourtant, deux américains sur trois sont opposés à cette guerre, ils sont favorables (dans les mêmes proportions) à un calendrier de retrait. De plus, l’Irak est un des principaux sujets de division de la campagne américaine. Le démocrate Barack Obama a promis un retrait complet des troupes dans les 16 mois, s’il est élu, afin de pouvoir repositionner les militaires américains en Afghanistan et le long de la frontière pakistanaise, dans le cadre de la lutte anti-terroriste. John McCain, lui, se refuse à évoquer un quelconque calendrier de retrait. Le candidat républicain s’aligne sur l’actuel président en déclarant que s’il siège à la Maison Blanche il prendra ses décisions en fonction des recommandations de ses conseillers militaires.
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