par Frank Weil-Rabaud
Article publié le 11/11/2008 Dernière mise à jour le 11/11/2008 à 16:45 TU
Après une semaine d’interruption, le gouvernement israélien a autorisé mardi une reprise partielle des livraisons de fuel destinées à la centrale électrique du territoire palestinien. Mais la situation économique globale ne cesse de se dégrader en dépit des promesses des donateurs internationaux.
Israël a repris les livraisons de carburant à destination de l'unique centrale électrique de la bande de Gaza : Nahal Oz, le 11 novembre 2008.
( Photo : Reuters )
L’arrêt de la seule centrale électrique de la bande de Gaza a privé plus de 800 000 palestiniens de courant. C’est le manque de carburant qui a contraint les autorités palestiniennes de Gaza à fermer cette centrale qui fournit près de 40% des besoins en électricité d’un territoire qui compte quelque 1,5 million d’habitants. Le fuel nécessaire au fonctionnement de la centrale est acheté par les Palestiniens grâce à un financement de l’Union européenne. Mais ce fuel ne peut être acheminé qu’avec l’accord du gouvernement israélien.
La semaine dernière, l’Etat hébreu avait décidé d’interdire toute livraison d’essence à la suite de tirs de roquettes déclenchés par des groupes palestiniens en direction du sud d’Israël. Ce mardi, après un entretien avec l’envoyé spécial du Quartette, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, le ministre israélien de la Défense Ehud Barak a annoncé la reprise minimale des livraisons de fuel pour permettre le redémarrage de la centrale électrique de Gaza. Il faut savoir que plus des deux tiers de l’électricité fournie au territoire palestinien proviennent d’Israël grâce à dix lignes à haute tension. L’Egypte fournit quant à elle environ 5% des besoins de Gaza en électricité.
La pénurie de fuel n’est que l’une des illustrations du blocus imposé par les autorités israéliennes à la bande de Gaza. Durant la semaine écoulée, aucun camion n’a ainsi été autorisé à pénétrer dans le territoire palestinien. Selon l’office de coordination des affaires humanitaires des Nations unies, la situation reste très fluctuante. Entre le 26 octobre et le 1er novembre, quelque 683 camions ont pu rentrer à Gaza. Un chiffre en baisse de 54% par rapport à la moyenne du mois de juillet. A cette date, la relative accalmie consécutive à la trêve acceptée tant par les Israéliens que par le mouvement islamiste Hamas au pouvoir à Gaza avait conduit l’Etat hébreu à autoriser le passage de plus de 1 100 camions.
En revanche, la circulation des personnes reste toujours aussi problématique. Le point de passage de Rafah - à la frontière avec l’Egypte - qui constitue la seule porte de sortie pour les Palestiniens de Gaza est ainsi officiellement fermé depuis le 9 juin 2007. Seules quelques centaines de personnes ont depuis cette date été autorisées à emprunter ce point de passage, essentiellement pour des raisons de santé. On est très loin des 20 000 Palestiniens qui transitaient chaque mois par Rafah avant sa fermeture.
Les tunnels pour pallier la fermeture des points de passage
Renforcé depuis que les islamistes du Hamas ont pris le contrôle total de la bande de Gaza, le blocus israélien a eu pour conséquence un développement sans précédent des tunnels creusés entre le territoire palestinien et l’Egypte. Plusieurs centaines d’entre eux permettent de faire rentrer à Gaza des produits alimentaires et de l’essence qui ne pénètrent qu’au compte-goutte par les points de passage traditionnels. Dans un récent reportage, la correspondante de RFI Catherine Monnet a pu constater que le creusement de ces tunnels est désormais pratiqué officiellement. La mairie de Rafah perçoit même une taxe en échange d’un branchement sur le réseau électrique permettant d’éclairer ces tunnels. Le gouvernement israélien accuse de son côté le Hamas d’utiliser ces tunnels pour s’approvisionner en armes. Les services de renseignements israéliens affirment que des roquettes de type katioucha d’origine iranienne seraient ainsi entrées dans le territoire palestinien. Pour l’heure néanmoins, aucune attaque à l’aide de ces armes, bien plus sophistiquées que les roquettes fabriquées sur place, n’a été répertoriée.
C’est pour tenter de fermer certains de ces tunnels que l’armée israélienne avait mené il y a dix jours une attaque causant la mort de six Palestiniens. En représailles, quelque 50 roquettes avaient été tirées vers le sud du territoire israélien. Le Hamas affirme que ces tunnels sont le seul moyen offert aux Palestiniens de Gaza pour survivre. Le mouvement islamiste réclame toujours la réouverture de l’ensemble des points de passage contrôlés par Israël. C’est d’ailleurs l’une des conditions que le Hamas pose pour accepter de libérer le caporal Gilad Shalit enlevé dans la bande de Gaza en juin 2006.
Une situation aggravée par les dissensions inter-palestiniennes
Le report d’une réunion de réconciliation entre le Hamas et le Fatah qui devait se tenir dimanche dernier à l’initiative de l’Egypte est venu confirmer que les deux principales factions palestiniennes sont encore loin d’un compromis.
Le Fatah fidèle au président de l’Autorité palestinienne exige du Hamas qu’il renonce au pouvoir qu’il exerce à Gaza. Le parti fondé par Yasser Arafat estime que cette prise du pouvoir est la conséquence d’un véritable coup de force. De son côté, le mouvement islamiste, fort de sa victoire lors du dernier scrutin législatif, refuse de reconnaître la légitimité du gouvernement de Salam Fayyad installé à Ramallah, en Cisjordanie occupée. Cette existence de deux centres du pouvoir palestinien ne fait qu’aggraver les problèmes économiques des Territoires palestiniens.
Les donateurs internationaux qui, en décembre dernier, ont promis de verser quelque 7 milliards de dollars sur trois ans pour soutenir l’économie palestinienne refusent toujours tout contact politique avec les responsables du Hamas. Les promesses de financer en parallèle des projets de développement pour la population de Gaza doivent encore être confirmées. Sans compter que toute aide concrète pour la bande de Gaza dépend pour son transfert du bon vouloir du gouvernement israélien. Tous ces facteurs expliquent que, selon les derniers chiffres publiés par la Banque mondiale, près de 60% des Palestiniens de Gaza vivent sous le seuil de pauvreté.
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