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Energie

EDF parie sur Constellation pour conquérir le nucléaire américain

par Myriam Berber

Article publié le 03/12/2008 Dernière mise à jour le 03/12/2008 à 18:39 TU

C'est sur le site de Flamanville où une première tranche est déjà installée que sera construit le premier nouveau réacteur nucléaire EPR.
(Photo : AFP)

C'est sur le site de Flamanville où une première tranche est déjà installée que sera construit le premier nouveau réacteur nucléaire EPR.
(Photo : AFP)

L’électricien français EDF a décidé de lancer une nouvelle offre pour le groupe américain Constellation Energy, en cours de rachat par l’homme d’affaires Warren Buffet, propriétaire de MidAmerican. EDF propose de racheter la moitié des activités nucléaires de Constellation pour 4,5 milliards de dollars. Pour l’heure, le groupe américain reste sur ses positions et déclare « ne pas avoir retiré, modifié ou nuancé » la recommandation faite à ses actionnaires d’approuver l’offre de MidAmerican. Cette acquisition d’EDF s’inscrit dans sa stratégie de développement nucléaire à l’international.

Alors qu’il avait abandonné le dossier il y a un mois et demi, le groupe français d’électricité EDF a décidé de revenir dans la bataille pour le contrôle de son partenaire américain, Constellation Energy Group dont il détient 9,5%. EDF a proposé, mercredi 3 décembre 2008, d’acquérir la moitié des activités nucléaires de Constellation pour 4,5 milliards de dollars (3,5 milliards d’euros). L’opération valorise Constellation autour de 52 dollars par action, soit le double de celle du son concurrent MidAmerican, appartenant au milliardaire Warren Buffet. Cette proposition d’EDF comporte également un apport en liquidités d’un milliard de dollars et une option permettant à Constellation de céder à EDF des actifs non nucléaires.

(Photo : Constellation Energy)

« Nous considérons que les conditions de notre offre sont nettement meilleures que celles de MidAmerican. En plus d’offrir aux actionnaires de Constellation la possibilité de valoriser leur investissement dans ce groupe, nous fournissons à ce dernier suffisamment de liquidités pour lui permettre de garder son statut d’entreprise solide et indépendante », a expliqué le PDG d’EDF, Pierre Gadonneix, en annonçant son offre. EDF espère finaliser cette opération dans un délai de six à neuf mois après avoir reçu l’approbation des autorités américaines compétentes.

EDF, le premier exploitant nucléaire mondial

A la mi-octobre, l’électricien français avait renoncé à surenchérir sur l’offre de Warren Buffet, en raison des conditions difficiles de marché du crédit aux entreprises. Le milliardaire américain a proposé de débourser 4,7 milliards de dollars (3,7 milliards d’euros) pour racheter l’ensemble du groupe Constellation, valorisant l’action à 26 dollars, une offre acceptée par le conseil d’administration du groupe et sur laquelle les actionnaires doivent se prononcer le 23 décembre prochain. Pour l’heure, Constellation reste sur ses positions. Dans un communiqué rendu public mercredi 3 décembre 2008, le groupe américain indique que « son conseil d’administration étudiera la proposition à multiples facettes d’EDF dès que cela sera faisable » et déclare « ne pas avoir retiré, modifié ou nuancé » la recommandation faite à ses actionnaires d’approuver l’offre de MidAmerican.

(Photo: edf.fr)

EDF est aujourd’hui le premier exploitant nucléaire mondial avec 58 réacteurs opérationnels. Avec le rachat de Constellation, le groupe français EDF espère s’installer sur le marché américain et construire des centrales nucléaires équipées de réacteurs de troisième génération, EPR (European Pressurised Water Reactor). Dans le cadre de sa stratégie de développement dans le nucléaire à l’international, les Etats-Unis sont une priorité pour EDF au même titre que la Chine, l’Afrique du Sud et le Royaume-Uni. En Chine, il est associé à l’électricien CGNPC pour construire deux réacteurs de type EPR. En Afrique du Sud, EDF qui est exploitant de centrales, devrait également fournir deux EPR. Au Royaume-Uni, l’opérateur français qui a pris le contrôle de l’opérateur nucléaire British Energy, envisage de construire quatre EPR.

Le réacteur de Flamanville plus cher que prévu

Cette offre de rachat de Constellation intervient alors que l’électricien français a été contraint de revoir à la hausse les coûts du prototype de l’EPR actuellement en cours de construction à Flamanville dans le département de la Manche. Le premier réacteur EPR français dont le chantier a débuté en décembre 2007 sous la direction d’EDF doit être mis en service en 2012. Selon des informations rapportées par le quotidien économique Les Echos, le groupe français devrait annoncer, jeudi 4 décembre 2008 lors d’une réunion avec les investisseurs, une hausse de près de 20% du coût de production de son futur réacteur EPR de Flamanville.

« Le coût de production de l’électricité serait maintenant estimé à près de 55 euros le mégawatheure (MWh), au lieu de 46 euros annoncés lors du lancement du projet en mai 2006 », indique Les Echos. Le coût du réacteur EPR est désormais estimé autour de 4 milliards d’euros, contre 3,3 milliards prévu. Plusieurs raisons expliquent ce dépassement de budget : la hausse du prix des matières premières, l’appréciation de l’euro et la prise en compte d’un certain nombre de problèmes techniques. EDF est confrontée à des contraintes de sûreté plus dures que prévu et à des aléas comme le creusement compliqué d’un tunnel pour le puits d’évacuation.

L’EPR est issu d'une technologie franco-allemande développée par le géant de l’atome Areva. Comme la plupart des centrales nucléaires actuellement dans le monde, l’EPR utilise l’eau pressurisée pour véhiculer l’énergie dégagée par la réaction nucléaire. Plus puissant(1 650 mégawatts) que les réacteurs datant des années 1980, l'EPR est une centrale nucléaire qui produit 22% d’électricité en plus et 30% de déchets radioactifs en moins qu’un réacteur standard. Présentée comme un choix stratégique pour la France, l'électricité qui sort d'un EPR devrait être 30% à 50% moins chère que l'électricité qui provient d'une centrale à gaz ou au charbon. Mais à près de 55 euros le MWh l’avantage économique du nucléaire ne se vérifie plus, puisque le coût de production d’électricité à base de gaz ou de charbon se situe entre 50 et 60 euros.