par Heike Schmidt
Article publié le 02/01/2009 Dernière mise à jour le 02/01/2009 à 20:58 TU
Le ton monte dans la guerre du gaz qui oppose la Russie à l’Ukraine. Ce vendredi, 2 janvier, le géant gazier russe Gazprom a accusé Kiev de « voler » du gaz transitant par l’Ukraine et destiné aux clients de l’Union européenne. Même si ses cuves sont bien remplies, le conflit russo-ukrainien réveille les vieilles craintes de l’Europe sur sa vulnérabilité énergétique. En effet, Moscou entretient le suspens. Selon Gazprom, l’Ukraine n’a pas donné son feu vert pour ce samedi 3 janvier de livrer au reste de l’Europe l’intégralité du volume de gaz demandé par la Russie. 80% du gaz russe consommé par les clients européens transitent par l’Ukraine.
Le doute sur la fiabilité du partenaire russe s’installe
Avec cette deuxième guerre du gaz en trois ans, le doute s’installe toutefois sur la fiabilité du fournisseur russe. D’autant que la Russie n’hésite pas à utiliser sa puissance énergétique comme d’une arme politique. La meilleure preuve en est que les négociations entre Moscou et Kiev pour une nouvelle tarification traînent depuis trois ans, mais Gazprom a choisi d’interrompre les livraisons au pire moment, au beau milieu de l’hiver, quand les Ukrainiens ont un besoin vital d’énergie. Par ailleurs, le Premier ministre, Vladimir Poutine, a menacé l’Ukraine de « conséquences graves » si Kiev osait détourner le gaz européen transitant sur son territoire pour subvenir à ses propres besoins après la coupure du gaz, intervenue le 1er janvier. L’avertissement est sans détour. Visiblement, Moscou veut mettre en garde son voisin, bien trop pro-occidental à son goût.
« L’objectif principal est de déstabiliser la vie politique ukrainienne, de montrer que la démocratie n’est pas un bon système dans cette partie du monde », estime Anders Aslund, expert de l’économie russe au Peterson Institute for International Economies à Washington. Que ce soit l’attitude critique de l’Ukraine vis-à-vis de Moscou pendant la guerre en Géorgie en août 2008 ou la volonté de l’Ukraine de rejoindre l’Otan, la Russie se méfie de Kiev et le fait savoir à travers un conflit commercial devenu une passe d’arme diplomatique.
L’Ukraine veut rassurer l’Union européenne
Dès jeudi, 1er janvier, l’Union européenne a tenté de calmer le jeu en appelant à une issue rapide du conflit qui oppose Kiev à Moscou. « Tous les engagements existants concernant le transit et la livraison doivent être honorés », a réclamé le vice-Premier ministre tchèque, Alexandr Vondra. Pour rassurer l’Europe, une délégation ukrainienne dirigée par le ministre ukrainien de l’Energie, Iouri Prodan, a entamé ce vendredi 2 janvier une tournée européenne à Prague, la capitale tchèque qui préside l’Union européenne depuis le début de l’année. Mais à l’issue de la réunion entre le Premier ministre, Mirek Topolanek, et les représentants ukrainiens, Jiri Frantisek Potuznik, porte-parole tchèque en charge des questions européennes, a renvoyé les deux parties dos à dos :« Nous espérons que ce différend bilatéral trouvera une solution, sans l'engagement de pays tiers ».
Parmi les clients européens de Gazprom, le conflit russo-ukrainien pourrait réalimenter un vieux débat, à savoir comment devenir plus indépendant du gaz russe ? Pour échapper à sa dépendance, l’UE a lancé son projet de construire le gazoduc Nabucco qui permettrait de faire transiter les hydrocarbures de la mer Caspienne par la Turquie, mais le projet, très coûteux, peine à avancer.
La République tchèque a annoncé que la sécurité énergétique sera la grande priorité de sa présidence européenne. Le sujet tombe à pic.
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