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Iran / Etats-Unis

La «main tendue» d’Obama à un Iran en campagne électorale

par Nicolas Falez

Article publié le 31/03/2009 Dernière mise à jour le 31/03/2009 à 09:31 TU

Les Etats-Unis et l'Iran peuvent-ils normaliser leurs relations, 30 ans après la Révolution islamique et la rupture totale entre les deux pays ? Barack Obama assure qu'il veut nouer le dialogue avec Téhéran. En juin prochain, l'Iran élira son nouveau président. La volonté américaine de rapprochement pèse-t-elle sur la campagne électorale iranienne ? Et peut-elle peser sur son résultat ? Pour l'heure, l'émissaire spécial des Etats-Unis en Afghanistan et au Pakistan, Richard Holbrooke, a qualifié ce week-end d' « avancée » la participation de l'Iran à la conférence sur l'Afghanistan prévue ce mardi 31 mars à La Haye, aux Pays-Bas.

Barack Obama s'adresse aux Iraniens, le 20 mars 2009.(Photo : Reuters)

Barack Obama s'adresse aux Iraniens, le 20 mars 2009.
(Photo : Reuters)

Avant même son élection, Barack Obama annonçait qu'il voulait dialoguer avec l'Iran, notamment pour résoudre la question brûlante du programme nucléaire suspect de Téhéran. Le 21 mars dernier à l’occasion de Norouz, le Nouvel An iranien, le président américain a enregistré un message vidéo destiné aux Iraniens, assurant qu’il recherchait « un dialogue honnête et fondé sur le respect mutuel ». Fait significatif : Barack Obama s’est adressé au peuple iranien mais aussi aux dirigeants de ce pays, une première pouvant être interprétée comme un geste de reconnaissance tacite de la République islamique.

« Au début ça m’a étonné… après j’ai été très heureuse », raconte Aïda, une Iranienne de 23 ans, jointe par RFI. Cette étudiante téhéranaise explique que le message de Barack Obama est devenu un sujet de conversation au sein de son groupe d’amis. « Je pense que c’est un bon signe », dit Aïda qui se demande à présent « quelle pourrait être la prochaine étape ? ».

Conservateurs et réformateurs

Si le message-vidéo du président américain a fait du bruit en Iran, on ne peut pas dire qu’il corresponde à une ligne de fracture dans le paysage politique du pays. « Tous les candidats savent que [le rapprochement avec les Etats-Unis] est un thème populaire », affirme l’universitaire Ferydoun Khavand, qui enseigne à Paris. Rappelons que l'actuel président iranien Mahmoud Ahmadinejad (élu en 2005) est un ultraconservateur et qu'il a succédé à Mohammad Khatami, un réformateur qui a dirigé le pays pendant huit ans. Ces deux tendances vont de nouveau s'affronter en juin et il faudra aussi compter avec des candidatures de conservateurs critiques envers le bilan du président sortant. Mais personne ne devrait faire campagne contre l’évolution des rapports avec Washington.

Au-delà du choix des électeurs iraniens à la présidentielle de juin, c’est bien le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, qui a la responsabilité de saisir ou non la « main tendue » de Barack Obama. « C’est le domaine réservé du Guide », explique Ahmad Salamatian, qui fut vice-ministre puis député au Parlement de Téhéran dans les premiers mois de la Révolution islamique et qui vit aujourd’hui en France. Dès lors, y aurait-il un président meilleur qu’un autre pour mettre en œuvre la décision du Guide ? « Sur ce point, la différence ne se situe pas entre réformateurs et conservateurs », estime Ahmad Salamatian, il s’agit plutôt de savoir « si des technocrates de la diplomatie vont se retrouver à la tête de l’Etat. Ou si ça sera plutôt une forme de populisme ».

 « Mort à l’Amérique »

Chaque semaine, lors de la grande prière du vendredi à l'Université de Téhéran, des dizaines de milliers d'Iraniens scandent « Mort à l'Amérique » et « Mort à Israël ». La République islamique peut-elle surmonter son hostilité viscérale aux Etats-Unis ? « C’est leur fonds de commerce depuis trois décennies », dit l’universitaire Ferydoun Khavand qui se demande si les dirigeants iraniens pourront perpétuer le système si l’ennemi américain n’est plus là pour le cimenter. Même interrogation pour Ahmad Salamatian, selon lequel cette opposition radicale à l’Amérique a « plutôt bien réussi » aux dirigeants de la République islamique. « Pour que le pouvoir iranien accepte de se débarrasser de ce dogme », nous dit l’ancien vice-ministre et député iranien, « il faudrait que disparaisse de façon claire et nette le sentiment que l’Iran est une nation assiégée ».

La «main tendue» d'Obama à l'Iran

31/03/2009 par Nicolas Falez