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Somalie / France

Les deux Français kidnappés livrés à des Islamistes

par  RFI

Article publié le 15/07/2009 Dernière mise à jour le 16/07/2009 à 09:35 TU

Les deux Français enlevés mardi par des hommes armés ont changé de mains dans la nuit de mardi à mercredi. Il s’agit de deux conseillers en mission officielle auprès du gouvernement somalien qui ont été kidnappés par des hommes armés dans leur hôtel à Mogadiscio. Les ravisseurs des deux Français les ont visiblement livrés à un groupe islamiste baptisé Hizbul Islam, le groupe de Cheikh Hassan Dahir Aweys, ex-allié du président Sharif Cheikh Ahmed, islamiste modéré élu en décembre dernier à la tête des institutions de transition. Le gouvernement français a démenti mercredi que les deux conseillers - qui étaient en mission officielle - opéraient avec la fausse identité de journalistes.

Cheikh Hassan Dahir Aweys, chef du groupe islamiste Hizbul Islam, le 24 juin 2009.(Photo : Reuters)

Cheikh Hassan Dahir Aweys, chef du groupe islamiste Hizbul Islam, le 24 juin 2009.
(Photo : Reuters)

Selon des sources dans la capitale somalienne, les deux otages français ont changé de mains dans la nuit de mardi à mercredi et ils sont dorénavant aux mains du groupe Hizbul Islam, qui les a également fait changer de lieu à Mogadiscio. Hizbul Islam c’est l’organisation de Cheikh Hassan Dahir Aweys, ancien chef de la « Shura », les Tribunaux islamiques, en 2006. Aweys était revenu à Mogadiscio, il y a quelques mois, pour combattre - aux côtés des shebab (les jeunes) - son ancien allié Sharif Cheikh Ahmed, le président du gouvernement de transition. 

Le premier groupe de ravisseurs avait tenté un coup audacieux, le premier de ce type dans la longue série de kidnappings en Somalie. Ils étaient venus en uniforme dans un véhicule du gouvernement, n’attirant ainsi la méfiance de personne. Il ont pu s’emparer des deux Français en un clin d’œil à un carrefour très fréquenté et pourtant surveillé en permanence par des détachements de la Mission de paix de l’Union africaine en Somalie (Amisom). 

Toutefois, ils ont préféré les revendre car garder des otages étrangers à Mogadiscio requiert une organisation, une logistique et surtout demande de contrôler une zone étendue. La motivation est le plus souvent financière, puisque les ressortissants étrangers sont vus comme une source d’argent, ce qui explique que différents groupes cherchent en général à les récupérer.

La mission des deux Français à Mogadiscio

En ce qui concerne la mission des deux hommes, le ministère français des Affaires étrangères parle pudiquement de « conseillers ». Plus directement, les autorités somaliennes précisent que les deux Français enlevés à Mogadiscio travaillaient pour les services de renseignement. Ils étaient sur place pour apporter une aide au gouvernement fédéral de transition, affirme Mogadiscio. Plus précisément, les deux ressortissants français devaient participer à la formation de personnel de sécurité. Pour l'instant, Paris reste discret sur leurs fonctions précises. On ne sait pas s'il s'agit de civils ou de militaires.

Au printemps dernier, la France s'était engagée à entraîner des militaires somaliens, via notamment la base de Djibouti qui doit accueillir un bataillon de 500 soldats. En avril dernier, la communauté internationale s'était engagée à hauteur de 200 millions de dollars pour aider les autorités somaliennes à restructurer l'armée et la police.

Dans un autre registre, Washington a, tout dernièrement, reconnu fournir des armes et des munitions aux forces gouvernementales somaliennes. Celles-ci sont en proie aux pires difficultés pour venir à bout d'une insurrection islamiste radicale. Des milices de mieux en mieux organisées, épaulées depuis quelques mois par de nombreux « combattants djihadistes venus de l'étranger », selon les autorités somaliennes.

A propos de la polémique selon laquelle les deux conseillers se seraient enregistrés comme journalistes à l’hôtel Sahafi dans le sud de Mogadiscio, le ministère français des Affaires étrangères a opposé une démenti, assurant n'avoir aucun élément permettant de dire qu'ils se sont prévalus de cette profession. « Etant en mission officielle, leur statut était également officiel et n'était pas celui de journalistes. Nous n'avons aucun élément authentifiant l'indication initiale faite localement selon laquelle ils se seraient prévalus d'un autre statut que le leur », a déclaré, ce mercredi, le porte-parole adjoint du Quai d'Orsay, Frédéric Desagneaux qui répondait ainsi à une question sur les critiques d'organisations de journalistes concernant le statut des deux Français séquestrés à Mogadiscio.

Ernest Sagada

Responsable de la communication et des droits de l'homme à la Fédération internationale des journalistes

« Les syndicats de journalistes en France ont demandé aux autorités françaises d'éviter à l'avenir ce genre d'opération qui met en péril les journalistes en Somalie. On a un sentiment d'inquiétude parce qu'on sait que la Somalie est le pays le plus dangereux en Afrique pour les journalistes. On a déjà perdu là-bas 6 collègues depuis le début de l'année. »

16/07/2009 par Xavier Martinet