par RFI
Article publié le 04/08/2009 Dernière mise à jour le 04/08/2009 à 22:00 TU
Les six millions d'électeurs nigériens ont été appelés, ce mardi, à se prononcer par ce référendum controversé sur une nouvelle Constitution censée permettre au président Mamadou Tandja, 71 ans, de rester au pouvoir après la fin de son deuxième quinquennat le 22 décembre prochain. L’opposition, qui dénonce un « coup d’Etat », a décidé de boycotter ce scrutin référendaire qui suscite également de profondes critiques de la communauté internationale et tout particulièrement de l’Union européenne (UE), ainsi que de la France. Le taux de participation était bien limité dans la matinée. Toutefois, le président Mamadou Tandja parie sur une participation importante.
Le président nigérien, Mamadou Tandja mettant son bulletin dans l'urne, dans un bureau de vote à Niamey, le 4 août 2009.
(Photo : AFP)
« La satisfaction est totale : j'ai répondu à mes obligations de président de la République face à la demande du peuple nigérien. »
Il est vrai que, pour le chef de l'Etat nigérien, le véritable enjeu de ce scrutin est la participation. Toutefois, à l’ouverture des bureaux, il y a eu un peu de cafouillage. Dans le quartier populaire de Bukoki, par exemple, des présidents de bureau se sont énervés car ils ne trouvaient pas leur lieu d’affectation. On a aussi cherché des clés pour ouvrir les salles de classe et, parfois, c’était le matériel électoral qui n’était pas arrivé.
Dans une des écoles du centre-ville de la capitale, vers 10 heures locales (9H00 Temps universel), on attendait encore des urnes. Très peu d’électeurs étaient visibles en fin de matinée, et il n'y avait aucune file d’attente dans les cours des écoles qui abritent des bureaux de vote. Certains des policiers présents pour sécuriser le scrutin somnolaient sous les arbres. Vers midi (11H00 TU), la participation n’atteignait que très difficilement les 10% dans une dizaine de bureaux visités. De plus, la journée est très chaude à Niamey, ce qui n’est pas très incitatif.
Le vœu du président - qui souhaite que 75% des électeurs inscrits aillent voter – sera peut-être difficile à réaliser. En tout cas, ce qu’il faut préciser, c’est que ces opérations de vote se déroulent sans observateurs indépendants. L’UE, ainsi que l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), par exemple, n’ont pas jugé bon d’envoyer des observateurs.
La coopération avec les Européens remise en cause
Le fait que ce scrutin référendaire soit organisé par le seul pouvoir et dans un climat de contestation risque, bien sûr, de le discréditer. Comme on sait, le président nigérien a éliminé tous les obstacles politiques et juridiques pour imposer une nouvelle Constitution qui doit lui permettre de rester au pouvoir trois ans mais aussi, ensuite, de briguer autant de mandats qu’il le souhaite. Pour arriver à ses fins, il a dissous l’Assemblée nationale et la Cour constitutionnelle, qui se sont opposées à son projet.
Ce référendum suscite, donc, une très forte contestation des partis politiques, des syndicats, mais aussi de la société civile. L’opposition nigérienne, mais également le principal mouvement allié du président Tandja, la Convention démocratique et sociale (CDS) de Mahamane Ousmane, ont constitué un « Front de la défense de la démocratie ». Ces derniers jours, ces partis ont appelé « les démocrates et les patriotes » à boycotter le scrutin. Ils demandent à leurs militants de barrer la route à un référendum jugé « illégal et anticonstitutionnel ». A Niamey, pour le moment, tout est calme. Mais il faudra attendre la fin de la journée, bien sûr, pour savoir si ce scrutin référendaire a pu se dérouler normalement dans la capitale, mais aussi dans les provinces du pays.
La France a rappelé, mardi, la menace de l'Union européenne (UE) d'interrompre les aides financières en faveur du Niger. Le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Romain Nadal, a ainsi déclaré que « la position de la France est très claire et nous l'avons rappelé à plusieurs reprises : les décisions récentes du président Tandja constituent des atteintes répétées à la démocratie. Elles se situent en dehors du cadre constitutionnel et menacent de fragiliser durablement les institutions du Niger ». Il a ajouté que « les événements politiques récents au Niger sont en contradiction avec les principes essentiels de l'Accord de Cotonou et font donc nécessairement courir le risque de la suspension de la coopération communautaire au titre de l'article 96 ». Cet accord de coopération et de développement, signé en juin 2000 dans la capitale du Bénin entre l'Union européenne et les pays dits ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique), prévoit le respect de critères démocratiques et de défense des droits de l'homme. La déclaration de la présidence suédoise de l'UE menaçait vendredi le Niger de « graves conséquences pour la coopération » avec les Européens.
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