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Honduras

Un président de trop à Tegucigalpa

par  RFI

Article publié le 23/09/2009 Dernière mise à jour le 24/09/2009 à 08:52 TU

Au Honduras, le couvre feu a été prolongé mercredi. L’ambassade du Brésil où s’est réfugié le président destitué Manuel Zelaya est en état de siège. L’armée et la police ont été déployées dans la capitale. Le Président issu du coup d’Etat, Roberto Micheletti, propose à son rival de discuter si ce dernier reconnaît en retour la légitimité des prochaines élections, prévues en novembre.

Le président déchu Manuel Zelaya s’adresse aux médias dans l’ambassade du Brésil à Tegucigalpa, le 23 septembre 2009.(Photo : Edgard Garrido / Reuters)

Le président déchu Manuel Zelaya s’adresse aux médias dans l’ambassade du Brésil à Tegucigalpa, le 23 septembre 2009.
(Photo : Edgard Garrido / Reuters)

Les rues de Tegucigalpa sont désertes. Aéroports, services publics, écoles et commerces restent fermés et les hélicoptères de l’armée survolent la capitale pour s’assurer du respect du couvre feu. Depuis que Manuel Zelaya est clandestinement rentré au Honduras lundi 21 septembre, la crise a pris une nouvelle tournure. Le chef d'Etat, chassé par les militaires le 28 juin dernier, a trouvé refuge dans l’enceinte de l’ambassade du Brésil. Ses partisans ont bravé le couvre feu lundi pour le soutenir mais les forces de l’ordre ont très vite dispersé les manifestants.

Francisco Catunda Resende, chargé d’affaires brésilien confirme qu’ « un périmètre de sécurité a été mis en place par la police hondurienne autour de l’ambassade. Mardi, il y a eu des tirs de gaz lacrymogène, mais le calme est maintenant revenu ». Le gouvernement de fait s’est engagé à ne pas forcer l’entrée des locaux diplomatiques mais « personne n’entre ni ne sort ». Roberto Micheletti, l’ancien Président du Congrès qui a succédé à Manuel Zelaya après le coup d’Etat du 28 juin propose aujourd’hui de dialoguer avec son rival. Mais attention : l'offre est assortie d'une série de conditions. Il faudrait d'abord que le chef d'Etat déchu accepte la tenue de l'élection présidentielle du 29 novembre (scrutin auquel il n'est pas autorisé à se re-présenter, c’est précisément ce point qui est à l'origine de la crise actuelle). Par ailleurs Roberto Micheletti refuse toujours catégoriquement que Manuel Zelaya revienne au pouvoir jusqu'au terme de son mandat, en janvier 2010. Il ne s'engage pas non plus sur une levée des poursuites judiciaires contre le président déchu.

Répression contre les partisans de Zelaya ?

Depuis l’ambassade du Brésil où il est retranché Manuel Zelaya a aussitôt rejeté cette vraie-fausse main tendue, il évoque une "manipulation" et dénonce la répression qui s’exerce dit-il contre ses partisans. Bertrand Duterme, chercheur au centre Tricontinental de Louvain, en Belgique, note que cette offre « révèle la fébrilité qui règne dans le camp de Roberto Micheletti. Les autorités de fait se sont laissé surprendre par le rocambolesque retour au Honduras de Manuel Zelaya ».  

Bertrand Duterme

Chercheur au Centre Tricontinental de Louvain (Belgique)

« Le dialogue semble bloqué pour l'instant... »

24/09/2009 par Frédérique Misslin

Le Front de la Résistance au coup d’Etat affirme que l’armée aurait procédé « à des centaines d’arrestations ». Manuel Zelaya lui-même affirme que les putschistes « instaurent une dictature répressive et criminelle au Honduras, il faut les arrêter immédiatement ». Roberto Micheletti rétorque que « Manuel Zelaya continue de mentir, il n’y a pas eu de morts durant les affrontements avec la police », pour autant le Président de fait n’a pas l’intention de céder quoi que ce soit. Il a ainsi déclaré que son adversaire pouvait bien rester dans l’ambassade « pour 5 ou 10 ans », il se dit prêt à maintenir le siège.

La communauté internationale appelle au dialogue

La communauté internationale semble gênée par la tournure que prennent les événements au Honduras. La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton affirme qu’il faut ouvrir « un canal de communication entre les deux camps(…) Le retour de Manuel Zelaya ne doit pas mener à la violence (…) Il faut trouver un terrain d’entente ». À la tribune des Nations unies ce mercredi, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a demandé que Manuel Zelaya soit rétabli dans ses fonctions « sans volonté politique dit-il nous assisterons à d’autres coups d’Etat ». Le Brésil souhaite que le Conseil de sécurité de l’ONU se saisisse du dossier en urgence.

Zelaya et le Brésil

Avec notre correspondante à Rio, Annie Gasnier

Depuis le renversement du président du Honduras, le Brésil a montré un soutien indéfectible à Manuel Zelaya. Il n´a pas reconnu l´équipe actuellement au pouvoir, le président brésilien a encore traité à New York de « golpistas » les responsables d´un coup d´Etat. Au contraire, Manuel Zelaya avait eu les honneurs d´un chef d´Etat le 12 août dernier à Brasilia, reçu par Lula mais aussi par d´autres autorités du pays.

La classe politique brésilienne est unie pour réclamer le retour au pouvoir d´un homme démocratiquement élu. Des députés et sénateurs ont mis en garde les dirigeants de Tegucigalpa contre tout désir d´invasion du siège diplomatique. L´encerclement de l´ambassade a été qualifié au Congrès « d´invasion indirecte », les coupures d´eau électricité et téléphone de « grossièreté extrême ».

Cependant, la presse brésilienne s´interroge sur ce retour de Manuel Zelaya. Elle doute clairement de la version officielle qui affirme n´avoir rien su de cette opération-retour. Et le quotidien O Globo entrevoit une situation « inédite en terrain miné pour la diplomatie brésilienne ».