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ONU / Iran / Nucléaire

Difficiles négociations

par Franck Weil-Rabaud

Article publié le 24/09/2009 Dernière mise à jour le 24/09/2009 à 16:28 TU

L’Assemblée générale des Nations unies a donné lieu à une nouvelle passe d’armes entre le président iranien et plusieurs délégations étrangères dont la France et les Etats-Unis. Elles ont jugé scandaleuses les critiques du président iranien contre Israël. L’incident complique les difficiles négociations sur le dossier nucléaire.
Au moment du discours du président iranien Ahmadinejad, la délégation allemande quitte la salle, tout comme l'ont fait la France, les Etats-Unis et neuf autres délégations.(Photo : Lucas Jackson/Reuters)

Au moment du discours du président iranien Ahmadinejad, la délégation allemande quitte la salle, tout comme l'ont fait la France, les Etats-Unis et neuf autres délégations.
(Photo : Lucas Jackson/Reuters)

L’image est désormais classique, presque attendue. Une douzaine de délégations dont celle de la France et des Etats-Unis a ostensiblement quitté la salle de conférence des Nations unies alors que le président iranien s’adressait à l’Assemblée générale. Sans surprise Mahmoud Ahmadinejad a consacré une large partie de son discours à une virulente critique de la politique des dirigeants israéliens. "Comment peut-on imaginer que leur politique inhumaine en Palestine se poursuivra ? » s’est interrogé le président iranien. «  Comment les crimes de l'occupant contre des femmes et des enfants sans défense, les destructions de maisons, de fermes, d'hôpitaux, d'écoles, peuvent-ils être soutenus sans conditions par certains gouvernements ?"

Mahmoud Ahmadinejad, sans réitérer ses récentes dénégations de l’Holocauste a ensuite implicitement mis en cause l’influence néfaste dont disposent selon lui les Juifs dans le monde :  "Il n'est plus acceptable qu'une petite minorité domine la politique, l'économie et la culture de la majeure partie du monde grâce à ses réseaux complexes, qu'elle établisse une nouvelle forme d'esclavage et nuise à la réputation d'autres nations, y compris des pays européens et des Etats-Unis, afin de satisfaire ses ambitions racistes ». C’est à la suite de ces déclarations, jugées « inacceptables » par un diplomate français qu’une douzaine de délégations a quitté la salle.

Pour Mark Kornblau, porte-parole de la mission américaine auprès de l’ONU, « il est décevant que M. Ahmadinejad ait choisi une nouvelle fois de recourir à une rhétorique haineuse, insultante et antisémite ». Reste que la plupart des pays européens sont restés dans la salle. Une porte-parole de la présidence suédoise de l’Union européenne a souligné que « le président iranien n’a pas franchi les lignes rouges qui avaient été fixées par l’Union européenne pour déclencher un départ de la salle. Ces lignes rouges étaient la négation de l’Holocauste ou un appel à la destruction d’Israël ».

La France pour de nouvelles sanctions

Ce nouvel incident intervient alors que les pourparlers entre l’Iran et le groupe des 5 + 1 composé des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France, de la Chine, de la Russie et de l’Allemagne sur le programme nucléaire de la République islamique sont dans l’impasse. Mercredi soir, les six ministres des Affaires étrangères ont appelé à « une réponse sérieuse à l’Iran » lors de la prochaine rencontre de négociations prévues le 1er octobre prochain à Genève. Même si officiellement de nouvelles sanctions ne sont pas envisagées, la France plaide depuis plusieurs mois pour un durcissement de l’attitude des pays occidentaux vis-à-vis du régime de Téhéran.

La Chine qui dispose d’un droit de veto au Conseil de sécurité s’est une nouvelle fois opposée à toute nouvelle sanction. « Nous croyons toujours que sanctions et pressions ne sont pas une voie de sortie » a indiqué une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. La Russie, principal fournisseur d’armes à l’Iran s’est montrée plus prudente. Son président, Dmitri Medvedev, tout en soulignant que « les sanctions débouchent rarement sur un résultat productif », a reconnu que « dans certains cas elles sont inévitables ».

Le groupe des six est en revanche à l’unisson pour reconnaitre que le temps presse. Dans son interview aux chaînes de télévision françaises TF 1 et France 2, le président Nicolas Sarkozy a présenté la fin de cette comme l’ultime possibilité pour l’Iran d’accepter de suspendre son programme d’enrichissement d’uranium. Dans le cas contraire, les partisans d’un recours à des frappes militaires contre les sites nucléaires iraniens pourraient obtenir gain de cause.

Tensions renforcées entre Paris et Téhéran

« Les Iraniens méritent mieux que leurs dirigeants actuels ». C’est ainsi que Nicolas Sarkozy avait réagi à la répression des manifestations d’opposants à la réélection de Mahmoud Ahmadinejad. Quelques semaines plus tard, le président iranien a usé des mêmes mots vis-à-vis de son homologue français. Signe que les relations entre les deux pays sont entrées dans une nouvelle phase de crispation, exacerbée par l’affaire Clotilde Reiss. Mahmoud Ahmadinejad a en effet déclaré qu’il était prêt à laisser la jeune chercheuse,  hébergée depuis un mois à l’ambassade de France en  Iran après 45 jours de prison, regagner la France en échange de la libération de détenus iraniens emprisonnés en France.

Parmi eux figure l’assassin de l’ancien Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar. L’homme condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en 1994 a déjà purgé sa peine de sureté de 18 ans. Il est donc éligible à une libération conditionnelle. Mais le président français a rejeté toute idée d’un échange entre « notre ressortissante qui est innocente et un assassin », n’hésitant pas à parler de « chantage ». Plus que jamais le dialogue entre Paris et Téhéran semble impossible. Une situation qui ne peut que renforcer la conviction du président français que la politique de la main tendue vis-à-vis de l’Iran prônée par son homologue américain Barack Obama est vouée à l’échec.