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Proche-Orient

Palestiniens : La réconciliation introuvable

par Franck WEIL-RABAUD

Article publié le 16/10/2009 Dernière mise à jour le 16/10/2009 à 17:20 TU

Le leader du Hamas, Khaled Mechaal, à la sortie de la médiation interpalestinienne de Damas le 11 octobre 2009.

Le leader du Hamas, Khaled Mechaal, à la sortie de la médiation interpalestinienne de Damas le 11 octobre 2009.

Le gouvernement égyptien a annoncé le report de la signature de l’accord de réconciliation interpalestinien prévu le 26 octobre. Le Hamas avait réclamé jeudi 15 octobre quelques jours supplémentaires de réflexion. Le mouvement islamiste n’a pas accepté la position initiale du président Mahmoud Abbas sur le rapport Goldstone concernant l’offensive israélienne l’hiver dernier à Gaza

Ce devait être une cérémonie confirmant l’influence régionale de l’Egypte. Après plusieurs mois d’efforts, le général Omar Soleimane, patron des services de renseignement égyptiens avait obtenu que les deux factions rivales palestiniennes, le Fatah et le Hamas, se retrouvent au Caire le 26 octobre prochain pour signer un accord de réconciliation. Le texte devait permettre de mettre un terme à une rivalité sanglante, née de la prise de contrôle par la force de la bande de Gaza par le mouvement islamiste.

Au terme de multiples rencontres, les médiateurs égyptiens avaient obtenu des deux parties qu’elles acceptent en juin prochain la tenue simultanée des élections législatives et de l’élection présidentielle. Parallèlement, les forces de sécurité affiliées au Fatah seraient autorisées à se déployer à la frontière entre l’Egypte et le territoire palestinien autonome. Un premier pas vers un retour dans la bande de Gaza des partisans de Mahmoud Abbas. Cet accord a minima devait permettre la mise en place d’un gouvernement d’union nationale et offrir ainsi au Hamas la possibilité de revenir dans un jeu politique dont il a été de facto exclu tant par Israël que par les Etats-Unis et l’Union européenne.

Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Meshaal, en exil à Damas, avait fini par accepter la proposition égyptienne. Les responsables du mouvement islamiste ont pris conscience de leur isolement total sur le plan diplomatique et de l’aggravation continue de la situation sociale et humanitaire dans la bande de Gaza. En dépit des protestations des organisations non gouvernementales, relayées, timidement il est vrai, par les chancelleries occidentales, Israël n’a toujours pas desserré l’étau autour de Gaza. Et l’Egypte en gardant fermé la plupart du temps le point de passage de Rafah n’a pas offert d’alternative à ce bouclage du territoire palestinien.

Le Hamas, appuyé par plusieurs petites factions palestiniennes a fait connaître, jeudi 15 octobre lors d’une conférence de presse à Damas, l’une de ses principales réticences sur l’accord de réconciliation. Il estime que le texte doit inclure le droit des Palestiniens à la résistance contre Israël. En clair, le mouvement islamiste n’entend toujours pas reconnaître formellement l’Etat hébreu et renoncer à la violence comme l’exige le Quartet, composé des Nations unies, de la Russie, de l’Union européenne et des Etats-Unis.

Le rapport de la discorde

Mais c’est paradoxalement un rapport sur les exactions de l’armée israélienne lors de l’offensive de l’hiver dernier à Gaza qui va provoquer le refus du Hamas de signer l’accord de réconciliation. Rédigé par une commission d’enquête dirigée par le juge sud-africain Richard Goldstone et commandité par la Commission des droits de l’homme des Nations unies, ce rapport de près de six cents pages accuse l’armée israélienne mais également les miliciens du Shas d’avoir commis des crimes de guerre voire des crimes contre l’humanité.

Le président palestinien Mahmoud Abbas va pourtant dans un premier temps appuyer la décision de ce conseil de l’ONU de reporter jusqu’au mois de mars le vote sur ce rapport. Immédiatement les responsables du Hamas accusent le président palestinien de « trahison des droits du peuple palestinien » et d’avoir cédé aux pressions des Etats-Unis et de certains pays européens. Au sein même du Fatah, certaines voix comme le ministre de l’Economie se montrent critiques vis-à-vis de l’attitude de Mahmoud Abbas. Le président palestinien fait alors volte-face. Il sollicite la Libye, seul pays arabe membre non permanent du Conseil de sécurité, de porter l’affaire devant la plus haute instance de l’organisation de l’ONU.

Le rapport Goldstone a été évoqué mercredi 14 octobre à New-York mais dans le cadre d’un débat général sur la situation au Proche-Orient. Parallèlement, une session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme est convoquée à Genève. Et ce vendredi avec 25 voix pour, 6 contre et 11 abstentions, le rapport sur l’offensive israélienne est finalement adopté.

Quelques heures avant cette adoption, Mahmoud Zahar, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement du Hamas doutait dans une interview au quotidien Libération de la bonne foi du président : cette volte-face, dit-il, « est peut être un piège. Il compte sur un échec à l’ONU pour justifier sa demande initiale de reporter le vote sur ce rapport ». Et pour celui qui est considéré comme un dur du mouvement islamiste, l’empressement du Fatah à vouloir signer un accord de réconciliation s’explique par le fait que les partisans de Mahmoud Abbas pensent que « c’est la bouée de sauvetage qui les sortira du pétrin dans lequel ils se sont mis avec le rapport Goldstone ».

Pour l’heure, le Hamas n’entend pas fournir au président palestinien la possibilité de restaurer une crédibilité de plus en plus entamée auprès de l’opinion publique palestinienne.