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Justice Internationale

Un chef rebelle du Darfour défend sa politique

Article publié le 20/10/2009 Dernière mise à jour le 20/10/2009 à 16:03 TU

La Cour pénale internationale a ouvert lundi 19 octobre ses audiences contre le chef rebelle du Darfour, Bahar Idriss Abou Garda, poursuivi pour crimes de guerre. Le procureur lui reproche l’assassinat de 12 soldats de la paix lors de l’attaque de la base militaire d’Haskanita, au nord Darfour, en septembre 2007.

Abou Garda lors d'une conférence de presse à la CPI, le 18 mai 2009.<em>(Photo : Stéphanie Maupas / RFI)</em>

Abou Garda lors d'une conférence de presse à la CPI, le 18 mai 2009.
(Photo : Stéphanie Maupas / RFI)

 
De notre envoyée spéciale à La Haye,
Stéphanie Maupas

Dans sa course au pouvoir personnel, le chef rebelle du Darfour, Bahar Idriss Abou Garda, a décidé de faire un crochet par le siège de la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye. Accusé de crimes de guerre, il comparaît librement devant ses juges et sans surprise, nie toute participation dans l’assassinat des 12 soldats de la Mission de l’Union africaine au Soudan (MUAS), lors de l’attaque de la base militaire d’Haskanita, au nord Darfour, le 29 septembre 2007. Au cours des dix jours d’audience, qui ont débuté lundi 19 octobre, le procureur doit obtenir des juges la confirmation des charges portées par le procureur contre le chef du Front uni de résistance. S’il emporte la partie, le procès pourra alors être inscrit au rôle de la Cour.

Droit au pouvoir et aux richesses

Comme lors de sa reddition volontaire, le 18 mai 2009, Bahar Idriss Abou Garda profite de la tribune politique que lui offre la juridiction. « Je viens maintenant de Libye, raconte-t-il, car nous avions une réunion sur le processus d’unification mené par l’envoyé spécial du président Obama (Scott Gration) et les autorités libyennes ». Son mouvement, le Front uni de résistance, dissident du Mouvement pour la Justice et l’Egalité (JEM), a désormais sa place dans les négociations avec le gouvernement soudanais. Avant de nier sa participation dans les crimes ou de partager la tristesse des victimes, ses pensées vont d’abord vers ses ambitions politiques. « Je suis le président du Front uni de la résistance depuis sa création, en janvier 2008. Ce front constitue une coalition de mouvements révolutionnaires opérant au Darfour et ce front intègre tous ces mouvements qui luttent contre l’oppression et la marginalisation au Soudan et notamment au Darfour. Notre objectif principal est d’instaurer la paix et d’obtenir nos droits au Soudan », droit au pouvoir et aux richesses, précise-t-il.

Les rebelles du Darfour divisés

Mais « les organisations rebelles au Darfour sont devenues de plus en plus fragmentées et de moins en moins efficaces dans leurs objectifs déclarés » explique-t-il. Ses ambitions rejoignent désormais la nouvelle stratégie américaine au Soudan, qui souhaite fédérer les mouvements rebelles. S’il ne se pose pas encore ouvertement comme candidat au leadership, l’accusé fustige sans relâche son principal concurrent, le chef du JEM, Khalil Ibrahim. Pour la procureure, Fatou Bensouda, cette lutte contre Khalil Ibrahim a un lien avec les crimes. Elle estime que les dissidents du JEM « avaient besoin d’être reconnus comme étant une force rebelle à part entière » qui « voulait aussi participer aux futures négociations de paix qui devaient se tenir à Syrte, en Libye. » Idriss Abou Garda estime que le crime a profité « au gouvernement du Soudan » car « en attaquant la base, la communauté internationale va minimiser ses efforts et réduire sa participation dans les troupes. »

Protéger les soldats de la paix

Pour l’avocat du chef rebelle, maître Karim Khan, Bahar Idriss Abou Garda n’a « ni planifié, ni ordonné les crimes d’Haskanita » et « il n’est pas utile, fiable, et justifié de poursuivre cette affaire. Vous le verrez en évaluant les éléments de preuves », ajoute-t-il. Le procureur, qui poursuit depuis un an deux autres chefs rebelles dont il espère obtenir la reddition volontaire, veut faire de cette affaire un exemple pour ceux qui seraient tentés de perpétrer de nouveaux crimes contre les soldats de la paix qui « doivent être protégés par toute la puissance du droit international ». Soixante-dix-huit victimes, des proches des soldats tués à Haskanita, sont représentées dans cette affaire.