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Etats-Unis

Marathon de New York sous haute surveillance

par Philippe Bolopion

Article publié le 04/11/2001 Dernière mise à jour le 03/11/2001 à 23:00 TU

Renforts policiers et mesures de sécurité exceptionnelles marquent cette année le marathon de New York. Différents hommages seront rendus aux victimes des attentats du World Trade Center.
De notre correspondant à New York

Tout le monde est au rendez-vous. Il n'y a quasiment aucune défection parmi les 30 000 coureurs dont 10 000 étrangers sur la ligne de départ. Mieux, malgré la peur des attentats, malgré l'anthrax, on compte quatre fois plus d'athlètes de haut niveau que d'habitude. La délégation kenyane affiche quelques vainqueurs potentiels, avec John Kagwe, 32 ans, déjà victorieux en 1997 et 1998, Joseph Chebet, lauréat en 1999 et deuxième en 1997 et 1998, et Japhet Kosgei, un coureur de grand talent entré dans la compétition à l'âge de 28 ans. L'ambiance n'est pourtant pas totalement à la compétition.

Plus que jamais, New York est en état d'alerte maximum, pour son marathon annuel. Avec près de deux millions de spectateurs attendus et 30 000 coureurs, la 32è édition de la traditionnelle course à travers les cinq quartiers de la ville constitue une cible de choix. Ajoutez à cela les mises en garde du gouvernement contre de possibles nouvelles attaques terroristes, et les cas de maladie du charbon, toujours plus nombreux, et vous obtenez un cocktail de nature à faire douter le plus endurci des marathoniens. Faut-il y voir les effets des appels répétés du président Bush à poursuivre une vie normale ? En tous les cas, tout le monde est là, même les sponsors, qui n'ont pas renoncé à leurs engagements. «Evidemment, ça fait un peu peur, confie Patricia, une concurrente de Lausanne. Pour venir, il faut prendre l'avion. Et puis sur place, il y a l'anthrax, les attentats... Mais si on réfléchit trop à tout ça, on ne fait plus rien. Il ne reste plus qu'à s'enfermer chez soi. » Comme tous les ans, la jeune suissesse est bien déterminée à courir.

«Unis, nous courons»

Après une courte période de doute, les autorités ont décidé que le marathon aurait lieu comme prévu. Le parcours n'a pas été modifié, pas plus que la date. Seule la sécurité a été renforcée. Généralement, environ 2 300 officiers de police surveillent les 42 kilomètres de trajet dont le départ a lieu à Staten Island, emprunte le pont de Verrazano, vers Brooklyn, puis Queens, Manhattan, un court passage par le Bronx et un retour en plein coeur de Manhattan pour un «finish» dans Central Park. Ces 2 300 policiers recevront aujourd'hui des renforts, avec notamment 1 500 réservistes de la garde nationale. Seuls quatre hélicoptères ont été autorisés dans le ciel, dont un de la police. Même règle sur l'eau, où les bateaux de plaisance ne seront pas admis aux abords du pont de Verrazano. Des garde-côtes patrouilleront même autour des points sensibles. Sur les ponts empruntés par la course, la circulation est également interdite.

Les participants sont eux aussi astreints à une discipline plus rigoureuse que d'habitude. Chaque compétiteur doit fournir une pièce d'identité. Bien avant le départ, la liste des participants a été passée au crible par les services de police. Les coureurs devaient recevoir leur dossard en personne et gagner le départ à bord des bus de l'organisation. Les sacs de sports, sacs à dos et glacières sont prohibés. Les coureurs doivent entreposer leurs affaires dans des sacs en plastique transparent fournis par l'organisation. Sacrifice à l'air du temps : cette année, il est fortement déconseillé aux coureurs d'accepter les boissons, les fruits ou les biscuits traditionnellement offerts aux marathoniens par les spectateurs. De même, les postes de ravitaillement en eau seront surveillés de près. Du côté de l'organisation, on laisse entendre que d'autres mesures de sécurité sont conservées secrètes.

Même si les marathoniens ne passent pas aux abords des ruines toujours fumantes du World Trade Center, la course sera placée sous le signe d'un hommage aux victimes des attentats du 11 septembre. «United we run» («Unis, nous courons», en référence à ce qui est devenu une devise nationale, «United we stand», «nous nous tenons unis») sera le thème général. Des rubans frappés du slogan seront distribués aux coureurs, de même que des pin's «I love New York». Différents partenaires ont également entrepris de réunir un million de dollars (plus de sept millions de francs) pour un fond de soutien aux victimes et à leurs familles. «Toute l'épreuve est dédiée aux victimes ainsi qu'aux héros qui ont aidé à sauver des vies», a expliqué le directeur de la course Alan Steinfeld. Une dizaine de personnes vont courir à la place et en mémoire de leurs proches décédés le 11 septembre.

«A cause des attaques tragiques sur New York, je ne peux pas être heureuse aujourd'hui», a expliqué la Russe Ludmila Petrova, victorieuse l'an dernier et parmi les favorites de cette année. Mais, après la catastrophe, elle a été la première à plaider pour que la course se déroule, malgré tout. Côté hommes, parmi les prétendants déclarés, on remarque le britannique Jon Brown, quatrième du marathon olympique l'an dernier, les Américains Kim Jones et Christine Clifton, l'Ethiopien Tesfaye Jifar et Hendrik Ramaala, d'Afrique du sud.

Le Kenyan Joseph Chebet, victorieux en 1999, est sérieusement considéré comme un vainqueur potentiel, en dépit d'une saison en dents de scie. Cette année pourtant, la victoire n'aura pas le même goût. Peut-être réside-t-elle tout simplement dans la tenue de la course et la détermination des participants. «Le monde vient courir cette année pour montrer son soutien aux Etats-Unis et à la ville de New York, a expliqué le président de la course Allan Steinfeld. C'est une façon d'unifier New York, mieux que n'importe quel autre événement depuis le 11 septembre.»