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Etats-Unis

Anthrax: la psychose

Le «bio terrorisme» affole aujourd'hui les populations américaines. Quelques affections dont une mortelle aux Etats-Unis, dues au bacille du charbon, appelé «Anthrax» en anglais, font craindre le pire. Mais pour l'heure aucune preuve formelle n'indique que ces cas déclarés de la maladie soient liés aux attentats du 11 septembre dernier et au groupe terroriste d'Oussama ben Laden.
Après le décès d'un photographe du journal «Sun» en Floride, qui a été victime de la forme pulmonaire de la maladie du charbon, les autorités sanitaires et politiques américaines avaient tout de suite rassuré les populations en parlant de «cas isolé». Mais très rapidement aussi le discours a changé, laissant supposer une éventuelle attaque bactériologique, dont les Etats-Unis seraient victimes. En effet, plusieurs autres cas de la maladie du charbon ont été détectés parmi les employés d'Américan Media Inc qui abrite le journal «Sun». Mais les mesures préventives draconiennes rapidement prises et censées rassurer les américains, ont plutôt créé l'effet inverse. La légitime vigilance est progressivement devenue une psychose généralisée. Malheureusement la découverte d'autres cas de cette maladie, dans d'autres régions, est venue renforcer l'idée du «bio terrorisme» dans les esprits d'une population déjà traumatisée par les attaques kamikazes du 11 septembre. Le secrétaire d'Etat à la santé, Tommy Thompson a précisé que les services sanitaires américains étaient en alerte maximale, pour apporter des réponses immédiates partout où il serait nécessaire. Il a également cherché à rassurer les américains en soulignant le caractère non contagieux de la maladie du charbon.

Une mystérieuse poudre blanche

A New York, une employée de la chaîne de télévision NBC a développé, ces derniers jours, la forme cutanée de la maladie du charbon. C'est la forme bénigne de la maladie. Elle aurait été en contact avec un courrier contenant une mystérieuse poudre blanche. Selon le maire de New York, Rudolph Giuliani, le centre de contrôle des maladies d'Atlanta, à qui a été confié les analyses, a confirmé qu'il s'agissait bel et bien d'une exposition au bacille du charbon. Tous les employés de la NBC sont donc testés et les locaux de la télévision nettoyés. Par précaution, la chaîne de télévision CBS, a provisoirement fermé sa salle des courriers. Et partout, il a été demandé aux employés qui pourraient manipuler des lettres de porter des gants en caoutchouc, et de se laver régulièrement les mains à l'eau chaude. Les services de la poste, quant à eux, craignent de transporter à leur insu, du courrier contaminé, appelant leur personnel à la prudence et à la vigilance. De nombreuses sociétés ont créé, ces derniers jours, des services spéciaux de traitement de leur courrier, isolant systématiquement tout ce qui leur paraît suspect.
Au journal New York Times, une lettre de menace contre les Etats-Unis, contenait une poudre blanche, qui n'a révélé, après analyse, aucune trace de la bactérie mortelle. La salle de rédaction des affaires du Proche-Orient a néanmoins été évacuée, vendredi pour inspection.
A Carson city, dans le Nevada, une filiale du groupe informatique «Microsoft» a reçu une lettre, dont le contenu, un chèque et une page de journal pornographique portent des traces d'anthrax. La Malaisie, d'où est parti le courrier, a promis sa collaboration dans la recherche de la vérité.
A Santa Rosa et Culver City en Californie plusieurs personnes ont reçu des lettres contenant de la poudre blanche, mais qui n'ont rien révélé. Et ces cas de fausses alertes se multiplient aux Etats-unis, traduisant bien, la perte du sentiment de sécurité des américains.
Cette peur se propage aussi au Canada dont la première victime est une association caritative, Vision mondiale Canada. Sa campagne de récolte des fonds en faveur des enfants affamés d'Afrique, est basée sur la distribution d'enveloppes contenant des semences de carottes. Son slogan «Secouer et écouter le bruit de l'espoir» n'a pas fait recette cette année. La police a dû suspendre la campagne après les inquiétudes exprimées par de «potentiels donneurs».
En Grande-Bretagne, trois personnes venant des Etats-Unis et ayant travaillé dans les bâtiments où la maladie s'était déclarée, ont été mises en quarantaine.
En Belgique, le gouvernement annonce que des enveloppes suspectes ont été examinées, mais n'ont révélé aucune trace de la maladie du charbon.
A Gènes en Italie, cinq personnes ont été hospitalisées après avoir manipulé une enveloppe contenant une poudre blanche et un message d'attaques bactériologiques. Mais face à la dimension prise par les événements l'auteur des lettres s'est présenté à la police, confessant une blague faite à des amis. Il a été laissé en liberté mais risque plusieurs mois de prison.

La peur de la guerre bactériologique n'est plus un fantasme, surtout depuis les révélations du «Journal du Dimanche» qui a reçu des aveux du Comité international de la Croix Rouge, qui a dû quitter ses laboratoires d'Afghanistan à la mi-septembre, où étaient cultivées des souches du bacille du charbon. Aujourd'hui ces laboratoires sont de fait aux mains des Talibans. Mais selon les experts du CICR, les souches du bacille destinées à la production de vaccins sont inoffensives. Selon le journal, les mêmes experts du CICR, confirment que le laboratoire de Kaboul pourrait toute fois être adapté à la production de germes virulents.

Les menaces restent réelles, malgré la complexité des moyens à mettre en £uvre pour la culture, la manipulation et le transport de souches. L'attaque au gaz «sarin» dans le métro de Tokyo, en 1995, n'a fait que 12 morts et 5000 blessés parce que les auteurs se sont enfuis, après avoir légèrement percé le sac plastique qui transportait leur arme. La volonté d'empoisonner un grand nombre de personnes était manifeste, mais celle de mourir avec les victimes l'était moins, pour une raison simple, la souffrance atroce avant la mort. C'est pourquoi les attaques kamikazes, sous cette forme (biologique) n'ont pour l'instant pas d'adeptes.



par Didier  Samson

Article publié le 14/10/2001