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Tennis

Roland-Garros : où sont les étoiles ?

par Gérard Dreyfus

Article publié le 26/05/2003 Dernière mise à jour le 25/05/2003 à 22:00 TU

La dernière semaine de mai et la première du mois de juin sont, en France, le rendez-vous incontournable du tournoi de Roland-Garros. Evénement sportif, mais au moins autant événement mondain bon chic-bon genre qui se nourrit de ses actrices et acteurs, comme de ses spectatrices et spectateurs. Les meilleurs sont présents, même si beaucoup savent ne devoir faire qu’une honorable figuration faute d’être à l’aise sur la surface la plus lente, la terre battue. Les vainqueurs ne seront pas nécessairement les plus en vue, les plus connus, ce qui constitue pour les non-initiés une sorte d’énigme.
Les deux événements sont dissemblables, l’un concerne le cinéma, l’autre le tennis, et pourtant ils possèdent bien des points communs, en dehors du fait qu’ils se déroulent dans le même pays, l’un sur la Côte d’Azur, l’autre dans les allées verdoyantes, presque campagnardes de la capitale. Tous deux font courir les foules, plus populaires à Cannes, car le spectacle, de courte durée, est non-payant, plus bourgeoises à Roland-Garros où l’on doit réserver longtemps à l’avance une place qui n’est pas spécialement bon marché. Ce qui rapproche le plus ces deux points de rencontre, c’est la nécessité absolue de réunir un maximum de vedettes, pour monter le soir l’escalier recouvert d’un tapis rouge à Cannes, pour piétiner la terre couleur ocre rouge des courts de tennis parisiens. Car le public a besoin de s’identifier à une silhouette, à une attitude, à un visage connu, à un palmarès ; il a besoin de héros venus, ici, d’Hollywood, là des quatre coins de la planète pourvu qu’ils aient déjà remporté quelques titres majeurs. A de rares exceptions près l’adulation du public se porte sur ceux qui ont déjà réussi. Même si les contes de fées continuent d’exister dans le cinéma comme dans le sport, pour le plus grand bien de médias toujours avides d’en faire grande consommation. A Paris aujourd’hui, comme à Cannes hier, on fait la chasse aux visages familiers.

Les champions manquent de charisme

Curieusement la cuvée 2003 de Roland-Garros, nous propose, en ouverture, un formidable coup de nostalgie, un retour en arrière de vingt ans, en référence à la dernière victoire d’un joueur français à Paris, celle de Yannick Noah face au Suédois Mats Wilander. Nostalgie d’autant plus forte que ses successeurs potentiels ne sont pas au mieux de leur forme. Personne n’imagine Grosjean et Clément venir sérieusement menacer les numéros un mondiaux André Agassi et Lleyton Hewitt dans la course aux trophées et surtout l’invraisemblable armada espagnole toujours très à son affaire sur la terre parisienne. Faute de trouver le nouveau Noah chez les hommes, la presse française et le public avec elle ont investi leurs espoirs sur la personne d’Amélie Mauresmo dont les derniers résultats sont assez probants, victoire à Varsovie, finaliste à Rome, demi-finaliste à Berlin, avec des succès face aux sœurs Serena et Vénus Williams et à la Belge Justin Hénin. Elle peut gagner, comme les joueuses déjà nommées, plus une autre Belge Kim Clijsters, finaliste l’an passé, voire Jennifer Capriati, championne en 2001. Elles sont cinq ou six au-dessus du lot, cinq ou six à faire le spectacle, cinq ou six que les gens vont se déplacer pour voir jouer. Chez les femmes les étoiles sont clairement identifiées et en même temps facilement identifiables. Ce qui est le contraire du tournoi masculin où le crâne dégarni d’André Agassi est souvent l’unique point de référence.

Roland-Garros comme Cannes ne saurait se contenter de starlettes, plus ou moins évanescentes. Il en faut, mais la réussite reste celle de ceux dont la notoriété est au sommet. L’avènement d’un second rôle est assimilé à un mauvais cru. C’est ainsi. Le public accorde rarement ses faveurs au dernier arrivé. La popularité s’acquiert sur le long terme. En tennis, c’est bien souvent passé la trentaine qu’un champion se voit accordée la reconnaissance populaire, celle sans laquelle il n’est point de légende. Le problème du tennis, c’est que les champions du moment manquent singulièrement de charisme et que l’ultra professionnalisme des sœurs Williams retire toute magie à leurs tirs croisés sur les courts. Difficile de séduire quand on ne fait que son métier.