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Timor-oriental

Alvaro Morna :<br>«Vers l'indépendance lentement mais sûrement»

Le Timor oriental, colonie portugaise annexée par l'Indonésie en 1976, est depuis un an, administré par l'ONU, après le vote massif de sa population pour l'indépendance le 30 août 1999. Depuis un an la situation a évolué. Les explications d'Alvaro Morna, journaliste à la rédaction portugaise de RFI et auteur d'un ouvrage sur le Timor oriental intitulé « Timor, une arme de sang ».
RFI : Où en est la reconstruction et qu'en est-il des étapes de transition du territoire vers l'indépendance annoncées il y a quelques semaines par l'administrateur de l'ONU au Timor, le Brésilien Sergio Vieira de Mello ?

Alvaro Morna : Le Timor oriental a été complètement détruit après le référendum du 30 août 1999. Il s'agit donc dans un premier temps de reconstruire complètement ce territoire, de créer des infrastructures et de former toute une société qui finalement a été très fragmentée par les évènements de l'année dernière. La reconstruction est très lente malgré les promesses de dons de la communauté internationale qui tardent à venir. Entre les promesses de dons et l'application de ces promesses, il y a toujours des délais plus ou moins longs. Aujourd'hui, le Timor a besoin d'énormément d'argent pour pouvoir mener à bien cette période de transition qui aboutira dans un avenir très proche à l'indépendance du territoire.


RFI : Actuellement se déroule le premier congrès national de la résistance timoraise (CNRT), présidé par le dirigeant est-timorais Xanana Gusmao. Quel est le but du CNRT et qu'en est-il de la riposte contre les milices ?

A.M : Ce congrès réuni en son sein tous les partis politiques, c'est en quelque sorte une centralisation de toute la vie politique existante au Timor. Le CNRT est un organe démocratique où chacun peut exprimer ses idées. Le but de ce congrès est de définir, autant que possible, dans l'unité, la stratégie à mettre en £uvre pendant cette période de transition qui aboutira à l'indépendance d'ici deux à trois ans. Concernant la riposte contre les milices, les avis sont partagés. Certains préconisent la manière forte. Quelques milliers de militaires onusiens sont sur place et ils sont bien armés. Ils ont tous les moyens nécessaires pour empêcher les infiltrations des miliciens pro-indonésiens au Timor oriental. Mais la frontière entre le Timor occidental et le Timor oriental est très perméable : le paysage est très accidenté et la végétation est dense. Il va falloir adopter une politique très ferme au niveau militaire pour empêcher ces infiltrations. Mais il va falloir également faire pression sur l'Indonésie pour que la partie occidental du Timor, qui lui appartient, ne soit pas la base arrière des miliciens qui prétendent déstabiliser le Timor oriental.

RFI : L'action de l'ONU au Timor oriental, depuis un an, est controversée. Qu'en pensez-vous ?

A.M : Il y a effectivement eu quelques incidents : deux militaires onusiens ont été victimes des milices pro-indonésiennes. Cette administration des Nations Unies a été critiquée car elle n'a pas associé suffisamment de Timorais pour mener à bien son entreprise. Le problème est maintenant dépassé. L'ONU mène aujourd'hui une très bonne action au Timor oriental : cette action permet notamment aux Timorais de vivre en relative sécurité. Mais elle leur permet surtout d'entrevoir la perspective finale qui est l'indépendance.

RFI : Va-t-on vers l'indépendance doucement mais sûrement ?

A.M : Historiquement le Timor oriental a résisté à une colonisation portugaise qui a duré trois siècles. Après, les Timorais ont subi une occupation militaire très répressive de la part de l'Indonésie mais ils ont su héroïquement y résister en créant une résistance armée. Le Timor a subi un véritable génocide. Quand l'Indonésie a envahi le Timor oriental, il y avait 800 000 habitants, l'année dernière, avant le référendum ils n'étaient plus que 500 000. 300 000 personnes ont donc été massacrées. Mais malgré ce génocide et cette répression féroce, le peuple timorais a toujours résisté à tel point qu'en 1999, quand on lui a donné la possibilité de s'exprimer démocratiquement, il a opté pour l'indépendance. Un message qui venait donc de très loin et qui va être réalisé lentement mais sûrement.



par Propos recueillis par Clarisse  VERNHES

Article publié le 30/08/2000