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Liban

Raz-de-marée pour l'opposition

L'opposition libanaise a remporté un succès éclatant lors des élections législatives qui se sont tenues les 27 août et 3 septembre. L'ancien premier ministre Rafic Hariri, dont la liste a raflé tous les sièges à Beyrouth, va sans doute retrouver le poste qu'il a occupé de 1992 à 1998.
Les marchés financiers ont salué comme il convenait la victoire de l'ancien premier ministre Rafic Hariri : par une flambée des cours de la livre libanaise et de l'action Solidere, la société immobilière de M. Hariri, chargée de la reconstruction du centre de la capitale.

L'ancien chef du gouvernement, qui a dirigé le Liban de 1992 à 1998, est donc bien placé pour retrouver son poste. La liste qu'il conduisait à Beyrouth a remporté 18 des 19 sièges en jeu à Beyrouth. Son principal adversaire, le premier ministre sortant Selim Hoss qui a lui-même été battu, a reconnu sa défaite en l'attribuant au «pouvoir de l'argent». Si l'accusation n'est sans doute pas infondée ûRafic Hariri, qui est milliardaire, n'a pas lésiné sur les moyens durant la campagne électoraleû elle est un peu courte pour expliquer cette cuisante défaite du gouvernement sortant. D'autant que celui-ci, de son côté, a mis à son service les moyens de l'Etat, et notamment les forces de sécurité et les services de renseignements. De plus, Rafic Hariri n'est pas le seul opposant à connaître le succès : Au Liban-Sud, ou des élections se tenaient pour la première fois depuis plus de vingt ans, on assiste à un triomphe de la coalition Amal-Hezbollah qui rafle les 23 sièges à pourvoir dans le sud et les 9 sièges de la Bekaa.

Le 27 août, lors de la première phase du scrutin, les partisans du leader druze Walid Joumblatt avaient obtenu 56 % des voix dans la montagne du Chouf et ceux de Rafic Hariri 46 % au Liban-Nord.

Un cinglant désaveu pour le pouvoir sortant

Le message de l'électorat est clair, il s'agit bien d'un rejet massif du pouvoir sortant. Le ministre de l'intérieur, Michel Murr, peut bien insister sur la faiblesse de la participation électorale (de l'ordre de 30 % à Beyrouth) pour relativiser le triomphe de l'adversaire, elle souligne davantage encore l'incapacité du gouvernement à mobiliser les électeurs en sa faveur en dépit du contrôle de l'appareil étatique et des médias gouvernementaux.

Pour de nombreux commentateurs, cette victoire de l'opposition équivaut à un vote de défiance à l'encontre de la Syrie. S'il est vrai que le pouvoir sortant apparaît à de nombreux Libanais comme inféodé à la Syrie, l'analyse est un peu rapide. Nabih Berri, le leader d'Amal et président sortant (et futur ?) du parlement est un proche allié de Damas, comme le sont beaucoup des nouveaux élus. Ce qui est vrai en revanche, c'est que l'après-scrutin va donner l'occasion au nouveau président syrien, Bachar el Assad, de prendre l'initiative sur le dossier libanais. Saisira-t-il cette opportunité pour effectuer un retrait, même partiel, des quelque 30 000 soldats syriens stationnés au Liban, comme le prévoient les accords de Taëf signés en 1989 ? Ce sera pour lui la première occasion d'imprimer sa marque depuis son accession à la présidence à la mi-juillet.

Quant au président libanais, Emile Lahoud, dont le mandat n'était pas directement mis en jeu, le vote des 27 août et 3 septembre constitue un cinglant revers. Son hostilité à Rafic Hariri est notoire. Lors de son élection voici deux ans, le général Lahoud se présentait comme un « Monsieur Propre » venu faire le ménage après les années Hariri, marquées par la corruption. Mais les Libanais se rappellent aussi ces années comme des années de prospérité, suivies par deux années d'immobilisme et une grave crise sociale. Pour sa part, Rafic Hariri se déclare prêt à une cohabitation à la française.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 04/09/2000