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Proche-Orient

Logique de guerre

Au cinquième jour des affrontements israélo-palestiniens, ce qui avait commencé comme une nouvelle Intifada prend l'allure d'une guerre ouverte entre l'armée israélienne et la population palestinienne. Le processus de paix est bien atteint, mais officiellement du moins, il ne fait pas encore partie des nombreuses victimes.
Jamais, au cours des sept années d'Intifada, la violence n'avait atteint ce niveau entre Israéliens et Palestiniens. Les affrontements, alors, étaient sporadiques. Et si, au terme de ce soulèvement, le bilan de la «guerre des pierres» fut lourd, c'est davantage par l'addition des pertes quotidiennes et hebdomadaires subies par la population palestinienne lors de combats qui jamais ne prirent l'allure de bataille rangée comme aujourd'hui.

Les images montrant les soldats israéliens surarmés faisant face à des jeunes munis de pierres pour toutes munitions avaient fait le tour du monde. Elles contraignirent le gouvernement israélien à donner des consignes de «retenue» à son armée. En dépit de cette retenue, les jeunes Palestiniens périrent par centaines durant l'Intifada.

Cette fois-ci, il n'est plus question de retenue. Les chars de Tsahal se sont déployés dans les Territoires palestiniens et les soldats israéliens visent à l'horizontale, à balles réelles. De toute façon, une balle caoutchoutée, lorsqu'elle atteint la tête ou le cou, est tout aussi mortelle. En face d'elle, l'armée israélienne a désormais, outre les jeunes armés de lance-pierres, une véritable armée : la police palestinienne. Certes, les policiers d'Arafat, munis de leurs pistolets et de leur Kalachnikov, ne font pas le poids militairement face aux chars, aux hélicoptères de combat, et aux armes sophistiquées dont sont dotées les force de sécurité de l'Etat juif. Mais la détermination et la motivation de ces combattants compense, politiquement, leur insuffisance sur le plan militaire.

Déjà, la mort filmée par les caméras de France 2 de Mohammed Aldura, cet enfant de 12 ans, a été diffusée par toutes les chaînes de télévision de la planète, suscitant un profond malaise dans une fraction de l'opinion israélienne. Et Mohammed n'était pas la plus âgée des victimes.

Une frustration réciproque

Pour une fois, Arafat et ses forces de sécurité sont au diapason de son peuple. Il n'est d'ailleurs pas sûr qu'un ordre de cessez-le-feu du président palestinien serait suivi d'effet, tant sont vifs le ressentiment des Palestiniens après la promenade matinale d'Ariel Sharon sur l'Esplanade des Mosquées, et la frustration de la population devant le blocage du processus de paix.

Côté israélien, la frustration n'est pas moindre. Pris au piège par la provocation du leader du Likoud, le Premier ministre Ehoud Barak est contraint à la fermeté face au soulèvement palestinien, et risque par là même de rendre vains tous ses efforts pour parvenir à un accord avec les Palestiniens. Son ministre des Affaires étrangères Shlomo Ben Ami ûqui passe pour une colombe- a appelé à sauver le processus de paix, tout en accusant les dirigeants palestiniens d'avoir délibérément encouragé la violence afin de s'attirer la sympathie internationale et faire pression sur l'Etat hébreu.

Le comportement des policiers palestiniens, qui ont rapidement fait usage de leurs armes contre les soldats israéliens (comme il y a quatre ans, après l'affaire du tunnel) plaide en ce sens.

En cinq jours, les affrontements ont fait plusieurs dizaines de morts et plusieurs centaines de blessés. Le processus de paix fait partie des seconds, mais personne ne se risque encore à prononcer son acte de décès.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 02/10/2000