Proche-Orient
Le retour de l'ONU
Deux jours après l'expiration de l'ultimatum d'Ehoud Barak, la diplomatie a repris ses droits. Au coeur de la négociation, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, qui s'est substitué au président Clinton comme principal médiateur.
A Madrid, en 1991, les Nations Unies n'avaient qu'un rôle d'observateur, tout comme l'Union européenne. Ainsi l'avaient voulu Américains et Israéliens. Les Israéliens parce qu'ils se défiaient de la «majorité automatique» antiisraélienne de l'ONU, et les Américains parce que leaders incontestés de la coalition qui avait vaincu l'Irak, ils n'imaginaient pas un instant partager ce leadership retrouvé avec une organisation internationale. Au moment même où débutait le processus de paix israélo-arabe, l'organisation internationale dont la charte prévoit explicitement cette responsabilité en était exclu.
L'ouverture en 1993 des négociations directes entre Israéliens et Palestiniens qui ont abouti à la signature des accords d'Oslo s'est faite sans le concours des Etats-Unis, mais c'est à la Maison Blanche que ces accords ont été signés le 13 septembre 1993. L'effondrement de l'URSS avait entre-temps mis fin au mythe du «co-parrainage» américano-soviétique. De l'ONU, il n'était toujours pas question.
Les Arabes, longtemps demandeurs de l'intervention de l'ONU et de l'Europe, semblaient s'accommoder du monopole américain. L'administration Clinton, bien que très proche d'Israël, se posait en «honnête courtier» et recevait tout le monde à la Maison Blanche. Cela convenait à Arafat et à Assad. Personne ne parlait d'introduire l'ONU dans le processus de paix. Quand il était en panne, on se tournait vers Madeleine Albright et Bill Clinton.
Dans ces conditions, la mission au Proche-Orient qu'effectue actuellement Kofi Annan constitue une spectaculaire irruption des Nations Unies dans le processus de paix. Irruption, car il n'est même pas possible de parler de retour. Son rôle est d'autant plus significatif que nul ne conteste que le secrétaire général a joué un rôle déterminant dans la décision d'Ehoud Barak de prolonger de 48 heures son ultimatum.
Plusieurs facteurs expliquent cette vitalité retrouvée des Nations Unies. En premier lieu, l'incapacité dans laquelle se trouve actuellement la diplomatie américaine de débloquer la situation entre Israéliens et Palestiniens. C'est donc avec le plein assentiment du président Clinton que le secrétaire général s'est en quelque sorte substitué au «facilitateur» américain, temporairement empêché de jouer son rôle. Mais cela n'est possible que parce que l'organisation internationale a retrouvé sa légitimité aux yeux de ceux qui la vilipendaient naguère, à savoir Israël et les Etats-Unis.
Dès son élection au poste de secrétaire général, Kofi Annan a consacré une grande partie de ses efforts à normaliser les relations d'Israël avec les Nations Unies. L'autre partie du chemin a été accomplie par Israël lorsqu'au printemps dernier, le gouvernement de l'Etat hébreu a pour la première fois reconnu la résolution 425, adoptée en 1978 par le Conseil de sécurité, exigeant le retrait israélien du Liban Sud. L'attitude de l'ONU, lors du retrait israélien fin mai, a convaincu le gouvernement Barak que Kofi Annan était un arbitre impartial, puisque son représentant a, sur un certain nombre de points, arbitré en faveur d'Israël contre le Liban.
Kofi Annan avait déjà donné la mesure de ses capacités de diplomate en février 1998 lorsqu'il s'était rendu à Bagdad, permettant d'éviter une nouvelle guerre irako-américaine. A l'époque, son succès avait provoqué la colère d'une partie de la presse américaine, de responsables du Pentagone et du département d'Etat. Mais l'on sait aujourd'hui qu'Annan est allé voir Saddam Hussein avec la bénédiction de Bill Clinton, peu désireux, quoi qu'on en ait dit, de provoquer un nouveau conflit, même pour faire oublier l'affaire Lewinsky.
Dans la crise actuelle, la mission Annan est devenue acceptable par Israël dès lors que trois soldats israéliens ont été capturés par le Hezbollah. L'un des objectifs du secrétaire général étant d'obtenir leur libération, son intervention dans l'ensemble du dossier devient légitime pour Israël.
Le plus important reste cependant à venir : la réintroduction de l'ONU au Proche-Orient se traduira vraisemblablement par une implication des Nations Unies dans le dossier hautement sensible du statut des lieux saints de Jérusalem.
L'ouverture en 1993 des négociations directes entre Israéliens et Palestiniens qui ont abouti à la signature des accords d'Oslo s'est faite sans le concours des Etats-Unis, mais c'est à la Maison Blanche que ces accords ont été signés le 13 septembre 1993. L'effondrement de l'URSS avait entre-temps mis fin au mythe du «co-parrainage» américano-soviétique. De l'ONU, il n'était toujours pas question.
Les Arabes, longtemps demandeurs de l'intervention de l'ONU et de l'Europe, semblaient s'accommoder du monopole américain. L'administration Clinton, bien que très proche d'Israël, se posait en «honnête courtier» et recevait tout le monde à la Maison Blanche. Cela convenait à Arafat et à Assad. Personne ne parlait d'introduire l'ONU dans le processus de paix. Quand il était en panne, on se tournait vers Madeleine Albright et Bill Clinton.
Dans ces conditions, la mission au Proche-Orient qu'effectue actuellement Kofi Annan constitue une spectaculaire irruption des Nations Unies dans le processus de paix. Irruption, car il n'est même pas possible de parler de retour. Son rôle est d'autant plus significatif que nul ne conteste que le secrétaire général a joué un rôle déterminant dans la décision d'Ehoud Barak de prolonger de 48 heures son ultimatum.
Plusieurs facteurs expliquent cette vitalité retrouvée des Nations Unies. En premier lieu, l'incapacité dans laquelle se trouve actuellement la diplomatie américaine de débloquer la situation entre Israéliens et Palestiniens. C'est donc avec le plein assentiment du président Clinton que le secrétaire général s'est en quelque sorte substitué au «facilitateur» américain, temporairement empêché de jouer son rôle. Mais cela n'est possible que parce que l'organisation internationale a retrouvé sa légitimité aux yeux de ceux qui la vilipendaient naguère, à savoir Israël et les Etats-Unis.
Dès son élection au poste de secrétaire général, Kofi Annan a consacré une grande partie de ses efforts à normaliser les relations d'Israël avec les Nations Unies. L'autre partie du chemin a été accomplie par Israël lorsqu'au printemps dernier, le gouvernement de l'Etat hébreu a pour la première fois reconnu la résolution 425, adoptée en 1978 par le Conseil de sécurité, exigeant le retrait israélien du Liban Sud. L'attitude de l'ONU, lors du retrait israélien fin mai, a convaincu le gouvernement Barak que Kofi Annan était un arbitre impartial, puisque son représentant a, sur un certain nombre de points, arbitré en faveur d'Israël contre le Liban.
Kofi Annan avait déjà donné la mesure de ses capacités de diplomate en février 1998 lorsqu'il s'était rendu à Bagdad, permettant d'éviter une nouvelle guerre irako-américaine. A l'époque, son succès avait provoqué la colère d'une partie de la presse américaine, de responsables du Pentagone et du département d'Etat. Mais l'on sait aujourd'hui qu'Annan est allé voir Saddam Hussein avec la bénédiction de Bill Clinton, peu désireux, quoi qu'on en ait dit, de provoquer un nouveau conflit, même pour faire oublier l'affaire Lewinsky.
Dans la crise actuelle, la mission Annan est devenue acceptable par Israël dès lors que trois soldats israéliens ont été capturés par le Hezbollah. L'un des objectifs du secrétaire général étant d'obtenir leur libération, son intervention dans l'ensemble du dossier devient légitime pour Israël.
Le plus important reste cependant à venir : la réintroduction de l'ONU au Proche-Orient se traduira vraisemblablement par une implication des Nations Unies dans le dossier hautement sensible du statut des lieux saints de Jérusalem.
par Olivier Da Lage
Article publié le 11/10/2000