Proche-Orient
L'après-Arafat et l'après-Barak en filigrane
Yasser Arafat et Ehoud Barak sont présents à Charm el Cheikh, entourés de Kofi Annan (ONU) Bill Clinton (Etats-Unis), Hosni Moubarak (Egypte) et Javier Solana (UE). Jamais la méfiance n'a été aussi grande entre les partenaires du processus de paix qui, l'un et l'autre, jouent leur dernière carte.
Yasser Arafat est arrivé à Charm el Cheikh en traînant les pieds. Ehoud Barak a fait savoir qu'il «en avait assez» d'Arafat. Ce dernier avait exigé comme condition à sa venue un ordre du jour précis, comportant notamment la création d'une commission d'enquête internationale sur les responsabilités des violences actuelles. Le président palestinien n'a pas obtenu satisfaction, et il est présent à Charm el Cheikh, il ne pouvait faire autrement : Américains, Européens et Arabes lui ont clairement fait comprendre qu'une absence de sa part le désignerait aux yeux de l'opinion mondiale comme le principal responsable d'un échec.
Ehoud Barak, pour sa part, affirmait rejeter toute condition préalable, tout en exigeant de l'Autorité palestinienne qu'elle donne l'ordre aux jeunes Palestiniens de cesser leur soulèvement. Peu importe que le chef du gouvernement israélien, parfaitement informé de la situation sur le terrain, sache pertinemment que Yasser Arafat ne dispose pas d'un tel pouvoir : Ehoud Barak en tire argument pour laisser entendre qu'à ses yeux, le leader historique de l'OLP n'est peut-être déjà plus un «partenaire pour la paix» et qu'il faudra, en cas d'échec, traiter avec ses successeurs.
Cette menace, brandie à plusieurs reprises ces derniers jours, est plus un aveu d'échec qu'un choix stratégique. Car même affaibli, Yasser Arafat n'aura pas de successeur de sa stature et de sa légitimité au sein du peuple palestinien. Arafat n'est pas seulement le président de l'Autorité palestinienne. Il est aussi et surtout celui de l'OLP et représente à ce titre non seulement les Palestiniens des Territoires mais aussi ceux de la diaspora, et notamment des camps de réfugiés. Aucun des successeurs putatifs d'Arafat ne disposera simultanément de toutes ces légitimités. L'une des nouvelles les plus terrifiantes que pourrait apprendre un dirigeant israélien ces jours-ci serait la mort de Yasser Arafat, seul capable à l'heure actuelle, de freiner dans une certaine mesure la bouffée de frustrations, de violence et de haine qui s'est emparée de son peuple.
La paix est désormais impopulaire
En tout état de cause, ce n'est sans doute pas Ehoud Barak qui aurait à gérer l'après-Arafat : la durée de vie de son gouvernement touche à son terme. A la fin de ce mois, le vote d'une motion de défiance hautement probable par la Knesset a toute chance de mettre un terme à un gouvernement minoritaire depuis le début juillet. De plus, l'inclusion d'Ariel Sharon au sein d'un gouvernement d'«urgence nationale», quel qu'en soit le chef, ne laisse guère augurer d'une conclusion rapide du processus de paix, avec ou sans Arafat.
L'angoisse de la communauté internationale, largement représentée à Charm el Cheikh au chevet -on n'ose dire aux funérailles ! -du processus de paix est donc totalement justifiée. Car le moment magique (la «fenêtre d'opportunité», comme disent les diplomates) est déjà passé. Après l'échec de Camp David II en juillet, on pouvait espérer un sursaut fin août, début septembre. Il n'a pas eu lieu. L'initiative d'Ariel Sharon le 28 septembre a agi comme un catalyseur, révélant le délabrement de la situation et les tensions latentes.
Car en cas d'échec à Charm el Cheikh, non seulement Arafat et Barak ne seront plus en mesure d'enrayer la spirale de la guerre, mais leurs successeurs n'y parviendront pas non plus. La volonté politique de quelques leaders d'exception avait permis, en septembre 1993 avec la signature des accords d'Oslo, d'entraîner à leur suite une partie des opinions israélienne et palestinienne, malgré l'opposition de larges secteurs de celles-ci, hostiles au processus de paix. Désormais, non seulement les adversaires de ce dernier trouvent la justification de leur politique dans les violences actuelles, mais que ce soit en Israël ou en Palestine, le processus de paix ne trouve plus guère d'avocat, tant sont nombreuses les frustrations et les espérances trahies.
Si la paix n'est pas signée très vite, dans la foulée de Charm el Cheikh, par un effort quasi-surhumain d'Ehoud Barak et de Yasser Arafat sur eux-mêmes, leurs successeurs ne pourront y parvenir avant longtemps : l'idée même de la paix est aujourd'hui impopulaire chez les partenaires d'hier.
Ehoud Barak, pour sa part, affirmait rejeter toute condition préalable, tout en exigeant de l'Autorité palestinienne qu'elle donne l'ordre aux jeunes Palestiniens de cesser leur soulèvement. Peu importe que le chef du gouvernement israélien, parfaitement informé de la situation sur le terrain, sache pertinemment que Yasser Arafat ne dispose pas d'un tel pouvoir : Ehoud Barak en tire argument pour laisser entendre qu'à ses yeux, le leader historique de l'OLP n'est peut-être déjà plus un «partenaire pour la paix» et qu'il faudra, en cas d'échec, traiter avec ses successeurs.
Cette menace, brandie à plusieurs reprises ces derniers jours, est plus un aveu d'échec qu'un choix stratégique. Car même affaibli, Yasser Arafat n'aura pas de successeur de sa stature et de sa légitimité au sein du peuple palestinien. Arafat n'est pas seulement le président de l'Autorité palestinienne. Il est aussi et surtout celui de l'OLP et représente à ce titre non seulement les Palestiniens des Territoires mais aussi ceux de la diaspora, et notamment des camps de réfugiés. Aucun des successeurs putatifs d'Arafat ne disposera simultanément de toutes ces légitimités. L'une des nouvelles les plus terrifiantes que pourrait apprendre un dirigeant israélien ces jours-ci serait la mort de Yasser Arafat, seul capable à l'heure actuelle, de freiner dans une certaine mesure la bouffée de frustrations, de violence et de haine qui s'est emparée de son peuple.
La paix est désormais impopulaire
En tout état de cause, ce n'est sans doute pas Ehoud Barak qui aurait à gérer l'après-Arafat : la durée de vie de son gouvernement touche à son terme. A la fin de ce mois, le vote d'une motion de défiance hautement probable par la Knesset a toute chance de mettre un terme à un gouvernement minoritaire depuis le début juillet. De plus, l'inclusion d'Ariel Sharon au sein d'un gouvernement d'«urgence nationale», quel qu'en soit le chef, ne laisse guère augurer d'une conclusion rapide du processus de paix, avec ou sans Arafat.
L'angoisse de la communauté internationale, largement représentée à Charm el Cheikh au chevet -on n'ose dire aux funérailles ! -du processus de paix est donc totalement justifiée. Car le moment magique (la «fenêtre d'opportunité», comme disent les diplomates) est déjà passé. Après l'échec de Camp David II en juillet, on pouvait espérer un sursaut fin août, début septembre. Il n'a pas eu lieu. L'initiative d'Ariel Sharon le 28 septembre a agi comme un catalyseur, révélant le délabrement de la situation et les tensions latentes.
Car en cas d'échec à Charm el Cheikh, non seulement Arafat et Barak ne seront plus en mesure d'enrayer la spirale de la guerre, mais leurs successeurs n'y parviendront pas non plus. La volonté politique de quelques leaders d'exception avait permis, en septembre 1993 avec la signature des accords d'Oslo, d'entraîner à leur suite une partie des opinions israélienne et palestinienne, malgré l'opposition de larges secteurs de celles-ci, hostiles au processus de paix. Désormais, non seulement les adversaires de ce dernier trouvent la justification de leur politique dans les violences actuelles, mais que ce soit en Israël ou en Palestine, le processus de paix ne trouve plus guère d'avocat, tant sont nombreuses les frustrations et les espérances trahies.
Si la paix n'est pas signée très vite, dans la foulée de Charm el Cheikh, par un effort quasi-surhumain d'Ehoud Barak et de Yasser Arafat sur eux-mêmes, leurs successeurs ne pourront y parvenir avant longtemps : l'idée même de la paix est aujourd'hui impopulaire chez les partenaires d'hier.
par Olivier Da Lage
Article publié le 16/10/2000