Etats-Unis
Bush courtise minorités et démocrates
Dans un effort pour réunifier une nation déchirée, le nouveau président américain tente d'apaiser ses détracteurs. Alors que neuf Noirs américains sur dix ont voté Gore, le général Powell devient le premier secrétaire d'Etat noir de l'histoire des Etats-Unis. George W. Bush s'efforce également d'inclure des démocrates dans son équipe. Mais les conservateurs qui entouraient son père montent toujours la garde.
De notre correspondant à New York
George W. Bush a donné dans le symbole, pour ses premières nominations. Sans surprise, il a nommé le général Colin Powell secrétaire d'Etat, faisant de lui le premier Noir américain à occuper ce poste clé. Agé de 63 ans, l'homme s'est rendu célèbre durant la guerre du Golfe. Plusieurs fois pressenti pour la Maison blanche, il n'a jamais donné suite. C'est «un héros et un exemple pour l'Amérique», a déclaré George W. Bush, avant d'ajouter : «C'est un grand jour pour l'Amérique lorsqu'un fils d'immigrés du Bronx peut succéder au fauteuil occupé en premier par Thomas Jefferson». Bon client, Colin Powell a prédit que sa nomination «serait une inspiration pour les jeunes Afro-américains».
De fait, ce fils d'émigrants modestes est un modèle de réussite sociale. Sans être militant de la cause noire, il est favorable à la discrimination positive et au droit à l'avortement, chose rare chez les conservateurs. Personnalité consensuelle, George Bush père l'a fait chef d'état-major en 1989. Le «héros de guerre» en a conservé un goût pour le langage martial plus que diplomatique. Promettant de garder un £il sur «des leaders ratés menant une politique ratée», Colin Powell promet d'adopter une attitude de «fermeté» : soutien renouvelé à Israël, maintien strict des sanctions contre l'Irak, désengagement des soldats américains à l'étrangerà Comme pour les autres postes ministériels, la nomination de Colin Powell devra être ratifiée par un Sénat divisé en parts égales entre Républicains et Démocrates. Etant donné l'aura du personnage, qui devrait balancer l'inexpérience de Bush en matière internationale, le vice-président Dick Cheney ne devrait pas avoir à intervenir pour faire pencher la balance.
Autre signe de bonne volonté en direction de la communauté noire, la nomination comme conseillère pour la sécurité nationale de l'Afro-américaine Condoleezza Rice, qui a rappelé avoir connu la ségrégation raciale dans les écoles du Sud. Cette spécialiste de la Russie a également servi Bush senior avant de rejoindre le fils. Une autre femme, Karen Hughes est nommée conseillère, et Alberto Gonzales, d'origine hispanique, devient conseiller juridique de la Maison Blanche.
Jesse Jackson n'a pas désarmé
Sans remettre en cause la valeur des nominés, les commentateurs ont relevé la tentative de séduction maladroite de George W. Bush à l'égard des minorités, et surtout des Noirs qui ont voté Gore à 90%. A leur tête, Jesse Jackson n'a pas désarmé. Le militant des droits civique conteste toujours la «légitimité» de Bush et persiste dans son combat pour les milliers de Noirs dont le vote aurait été spolié en Floride. «Il doit s'attaquer à la discrimination raciale, l'injustice de la peine capitale, a conseillé le révérend dans le New York Times. (...) Et il doit soutenir la discrimination positive». George W. Bush sera plus sûrement jugé sur son aptitude à prendre en compte ces revendications que sur la teinte de ses premières nominations.
Le nouveau président cherche aussi à s'attirer les faveurs de ses ennemis politiques. Son premier déjeuner après la victoire s'est tenu avec le ténor démocrate de Louisiane John Breaux, pressenti pour un poste ministériel qu'il a décliné. Même si George W. Bush se targue d'avoir su gouverner avec les Démocrates dans son Etat, de nombreux analystes rétorquent qu'un Démocrate au Texas, réputé conservateur, n'est qu'un Républicain déguisé.
Qu'on ne s'y trompe pas, le nouveau locataire du Bureau ovale n'a rien d'un libéral. Son vice-président, déjà secrétaire d'Etat à la défense de son père, veille au grain. Dick Cheney a travaillé ces cinq dernières années à la tête du géant pétrolier Halliburton, après s'être fait connaître, lui aussi, durant la guerre du Golfe. Sa fragile santé (quatre crises cardiaques et un pontage) n'entame pas son credo résolument conservateur. Viscéralement opposé à l'IVG, admirateur de Reagan, c'est un chaud partisan du programme de bouclier antimissile («guerre des étoiles») qui fait peur au monde entier. Avec des ultra-conservateurs, tel l'ex-candidat de la droite chrétienne Gary Bauer, les anciens de l'administration Bush et quelques amis Texans, Dick Cheney se chargera de prévenir tout «dérive» centriste. Il l'a d'ailleurs rappelé : la baisse massive des impôts, qui favorisera selon les Démocrates les plus riches, reste l'une des priorités.
George W. Bush a donné dans le symbole, pour ses premières nominations. Sans surprise, il a nommé le général Colin Powell secrétaire d'Etat, faisant de lui le premier Noir américain à occuper ce poste clé. Agé de 63 ans, l'homme s'est rendu célèbre durant la guerre du Golfe. Plusieurs fois pressenti pour la Maison blanche, il n'a jamais donné suite. C'est «un héros et un exemple pour l'Amérique», a déclaré George W. Bush, avant d'ajouter : «C'est un grand jour pour l'Amérique lorsqu'un fils d'immigrés du Bronx peut succéder au fauteuil occupé en premier par Thomas Jefferson». Bon client, Colin Powell a prédit que sa nomination «serait une inspiration pour les jeunes Afro-américains».
De fait, ce fils d'émigrants modestes est un modèle de réussite sociale. Sans être militant de la cause noire, il est favorable à la discrimination positive et au droit à l'avortement, chose rare chez les conservateurs. Personnalité consensuelle, George Bush père l'a fait chef d'état-major en 1989. Le «héros de guerre» en a conservé un goût pour le langage martial plus que diplomatique. Promettant de garder un £il sur «des leaders ratés menant une politique ratée», Colin Powell promet d'adopter une attitude de «fermeté» : soutien renouvelé à Israël, maintien strict des sanctions contre l'Irak, désengagement des soldats américains à l'étrangerà Comme pour les autres postes ministériels, la nomination de Colin Powell devra être ratifiée par un Sénat divisé en parts égales entre Républicains et Démocrates. Etant donné l'aura du personnage, qui devrait balancer l'inexpérience de Bush en matière internationale, le vice-président Dick Cheney ne devrait pas avoir à intervenir pour faire pencher la balance.
Autre signe de bonne volonté en direction de la communauté noire, la nomination comme conseillère pour la sécurité nationale de l'Afro-américaine Condoleezza Rice, qui a rappelé avoir connu la ségrégation raciale dans les écoles du Sud. Cette spécialiste de la Russie a également servi Bush senior avant de rejoindre le fils. Une autre femme, Karen Hughes est nommée conseillère, et Alberto Gonzales, d'origine hispanique, devient conseiller juridique de la Maison Blanche.
Jesse Jackson n'a pas désarmé
Sans remettre en cause la valeur des nominés, les commentateurs ont relevé la tentative de séduction maladroite de George W. Bush à l'égard des minorités, et surtout des Noirs qui ont voté Gore à 90%. A leur tête, Jesse Jackson n'a pas désarmé. Le militant des droits civique conteste toujours la «légitimité» de Bush et persiste dans son combat pour les milliers de Noirs dont le vote aurait été spolié en Floride. «Il doit s'attaquer à la discrimination raciale, l'injustice de la peine capitale, a conseillé le révérend dans le New York Times. (...) Et il doit soutenir la discrimination positive». George W. Bush sera plus sûrement jugé sur son aptitude à prendre en compte ces revendications que sur la teinte de ses premières nominations.
Le nouveau président cherche aussi à s'attirer les faveurs de ses ennemis politiques. Son premier déjeuner après la victoire s'est tenu avec le ténor démocrate de Louisiane John Breaux, pressenti pour un poste ministériel qu'il a décliné. Même si George W. Bush se targue d'avoir su gouverner avec les Démocrates dans son Etat, de nombreux analystes rétorquent qu'un Démocrate au Texas, réputé conservateur, n'est qu'un Républicain déguisé.
Qu'on ne s'y trompe pas, le nouveau locataire du Bureau ovale n'a rien d'un libéral. Son vice-président, déjà secrétaire d'Etat à la défense de son père, veille au grain. Dick Cheney a travaillé ces cinq dernières années à la tête du géant pétrolier Halliburton, après s'être fait connaître, lui aussi, durant la guerre du Golfe. Sa fragile santé (quatre crises cardiaques et un pontage) n'entame pas son credo résolument conservateur. Viscéralement opposé à l'IVG, admirateur de Reagan, c'est un chaud partisan du programme de bouclier antimissile («guerre des étoiles») qui fait peur au monde entier. Avec des ultra-conservateurs, tel l'ex-candidat de la droite chrétienne Gary Bauer, les anciens de l'administration Bush et quelques amis Texans, Dick Cheney se chargera de prévenir tout «dérive» centriste. Il l'a d'ailleurs rappelé : la baisse massive des impôts, qui favorisera selon les Démocrates les plus riches, reste l'une des priorités.
par Philippe Bolopion
Article publié le 18/12/2000