Côte d''Ivoire
Les enjeux du procès Palenfo-Coulibaly<br>
Le procès des généraux Palenfo et Coulibaly s'est ouvert mercredi 21 février à Abidjan, pour être immédiatement renvoyé au 2 mars, afin de permettre à la défense de consulter le dossier d'instruction. Jugés dans le cadre de l'attaque contre la résidence de l'ex-chef de la junte Robert Gueï, mi-septembre 2000, les anciens numéros deux et trois du pouvoir militaire ont toujours nié être derrière ce qui avait été présenté comme une tentative de coup de force.
La comparution prochaine des anciens numéros deux et trois de la junte ivoirienne devant la justice militaire, avec trente-deux autres prévenus, va-t-elle enfin commencer à lever le voile sur l'un des épisodes les plus controversés de la transition militaire? Dans la nuit du 17 au 18 septembre 2000, la résidence du général Gueï, qui dirige alors le pouvoir kaki, est attaquée par des membres de sa garde rapprochée. Plusieurs seront arrêtés et torturés à mort. Deux soldats loyalistes sont par ailleurs tués au cours de ce que l'ex-chef du pouvoir militaire qualifiera immédiatement de «tentative d'assassinat».
Ce complot présumé entraîne immédiatement une purge au sein de la sécurité rapprochée de Robert Gueï, mais aussi du Conseil national de salut public (CNSP) au pouvoir. Lassana Palenfo et Abdoulaye Coulibaly sont limogés. Puis ils sont accusés d'avoir fomenté un putsch, avec au moins l'assentiment tacite d'Alassane Ouattara, leader du RDR, dont ils sont présentés comme des proches. Réfugiés à l'ambassade du Nigeria, dont ils ne sortiront qu'après la chute de leur ancien frère d'armes, ils sont arrêtés par la justice militaire le 8 novembre 2000. Les deux hommes, qui ont toujours nié les accusations portées contre eux, sont détenus depuis. Et s'ils ne comparaissent plus que pour «atteinte à la sûreté de l'Etat» - les charges de «tentatives d'assassinat et complicité» ayant été retirées - ils ont entre temps été inculpés de détournement de fonds dans une autre affaire.
Un pas en direction de la défense
Avant même son ouverture, le procès a suscité une polémique entre leurs défenseurs et le procureur militaire, le capitaine Ange Kessy. Mardi 20 février, les huit avocats ivoiriens et étrangers, qui se sont vus refuser la copie du dossier, ont dénoncé un procès «politique» et ont demandé l'annulation pure et simple de la procédure. En reportant l'audience au 2 mars pour lui permettre de consulter le dossier d'instruction, les magistrats ont fait un pas en direction de la défense. Mais ils ont une nouvelle fois refusé la demande de mise en liberté provisoire présentée par les avocats des deux généraux, au prétexte que seul cinq des trente-cinq prévenus étaient présents. Du côté du pouvoir, le discours ne varie pas: «ce que fait la justice ne nous regarde pas», répètent à l'envi les responsables ivoiriens.
Il reste que le procès a démarré alors qu'aucune procédure judiciaire n'a été engagée contre le général Gueï qui a refusé de témoigner lors de l'instruction. Menés par l'adjudant Boka Yapi, autre grand absent de ce procès, ses sbires ont pourtant tiré sur la foule des manifestants les 24 et 25 octobre dernier. «Gueï n'est pas à l'abri des poursuites», s'est défendu à plusieurs reprises Laurent Gbagbo. Quant au cas de l'ex-président Bédié, contre qui les procédures pour détournement de fonds ont été levées, «c'est l'affaire des juges», nous avait déclaré mi-janvier le chef de l'Etat ivoirien.
L'affaire Palenfo-Coulibaly est donc, à plus d'un titre, un test important pour la justice ivoirienne. Première interrogation: savoir si cette dernière peut aborder sereinement une affaire éminemment politique. Mais on saura aussi si la justice militaire est capable de faire la lumière sur un événement considéré par les uns comme un «faux complot», taxé par les autres de manoeuvre téléguidée par Alassane Ouattara, mais dont les tenants et les aboutissants restent mystérieux.
Ce complot présumé entraîne immédiatement une purge au sein de la sécurité rapprochée de Robert Gueï, mais aussi du Conseil national de salut public (CNSP) au pouvoir. Lassana Palenfo et Abdoulaye Coulibaly sont limogés. Puis ils sont accusés d'avoir fomenté un putsch, avec au moins l'assentiment tacite d'Alassane Ouattara, leader du RDR, dont ils sont présentés comme des proches. Réfugiés à l'ambassade du Nigeria, dont ils ne sortiront qu'après la chute de leur ancien frère d'armes, ils sont arrêtés par la justice militaire le 8 novembre 2000. Les deux hommes, qui ont toujours nié les accusations portées contre eux, sont détenus depuis. Et s'ils ne comparaissent plus que pour «atteinte à la sûreté de l'Etat» - les charges de «tentatives d'assassinat et complicité» ayant été retirées - ils ont entre temps été inculpés de détournement de fonds dans une autre affaire.
Un pas en direction de la défense
Avant même son ouverture, le procès a suscité une polémique entre leurs défenseurs et le procureur militaire, le capitaine Ange Kessy. Mardi 20 février, les huit avocats ivoiriens et étrangers, qui se sont vus refuser la copie du dossier, ont dénoncé un procès «politique» et ont demandé l'annulation pure et simple de la procédure. En reportant l'audience au 2 mars pour lui permettre de consulter le dossier d'instruction, les magistrats ont fait un pas en direction de la défense. Mais ils ont une nouvelle fois refusé la demande de mise en liberté provisoire présentée par les avocats des deux généraux, au prétexte que seul cinq des trente-cinq prévenus étaient présents. Du côté du pouvoir, le discours ne varie pas: «ce que fait la justice ne nous regarde pas», répètent à l'envi les responsables ivoiriens.
Il reste que le procès a démarré alors qu'aucune procédure judiciaire n'a été engagée contre le général Gueï qui a refusé de témoigner lors de l'instruction. Menés par l'adjudant Boka Yapi, autre grand absent de ce procès, ses sbires ont pourtant tiré sur la foule des manifestants les 24 et 25 octobre dernier. «Gueï n'est pas à l'abri des poursuites», s'est défendu à plusieurs reprises Laurent Gbagbo. Quant au cas de l'ex-président Bédié, contre qui les procédures pour détournement de fonds ont été levées, «c'est l'affaire des juges», nous avait déclaré mi-janvier le chef de l'Etat ivoirien.
L'affaire Palenfo-Coulibaly est donc, à plus d'un titre, un test important pour la justice ivoirienne. Première interrogation: savoir si cette dernière peut aborder sereinement une affaire éminemment politique. Mais on saura aussi si la justice militaire est capable de faire la lumière sur un événement considéré par les uns comme un «faux complot», taxé par les autres de manoeuvre téléguidée par Alassane Ouattara, mais dont les tenants et les aboutissants restent mystérieux.
par Christophe Champin
Article publié le 22/02/2001