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Immigration

Les naufragés kurdes étaient syriens

Les Kurdes naufragés de l'East sea en février dernier, venaient pour la plupart de Syrie et non d'Irak. Cette nouvelle version établie a permis de retracer le parcours des exilés dont le naufrage sur les côtes françaises avait suscité une véritable émotion.
Ils avaient affirmé qu'ils avaient fui la répression anti-kurde en Irak. C'est cette version qu'avait jusque-là retenue la presse et les associations humanitaires dépêchées dans le Var. Car le naufrage avait provoqué, on s'en souvient, une vague d'émotion en France et les militants des droits de l'homme arrivés à la hâte dans le sud du pays, avaient dû gérer la situation dans l'urgence.

L'Office français de protection des réfugiés et apatrides, avait déjà, lors des premiers entretiens avec les réfugiés, émis quelques doutes sur leur provenance et décidé d'enquêter. Le concours des autorités allemandes dans cette affaire n'a pas été négligeable puisque de nombreuses familles de l'East sea avaient été arrêtées en mars dernier, alors qu'elles tentaient de franchir la frontière franco-allemande. Certaines d'entre elles possédaient des pièces d'identité syriennes. Voilà qui avait mis la puce à l'oreille des enquêteurs.

Pendant ce temps, les réfugiés restés en France et répartis dans plusieurs centres d'accueil, préparaient leur dossier d'asile à destination de l'Ofpra, aidés de nombreux militants des droits de l'homme et d'association d'aide aux réfugiés. Parmi eux, Ali Dogan, kurde et proche de la Cimade (service £cuménique d'entraînement). En recueillant et recoupant les divers récits des exilés, il découvre que la plupart des passagers de l'East sea, «750 sur les 900» viendraient de Syrie.

Mentir par peur

Pourquoi ont-ils menti? «Par peur» répond-on du côté des associations. Les Kurdes auraient été menacés par les passeurs d'être expulsés de France s'ils révélaient leur provenance. Le spectre d'un retour forcé par avion vers Damas aurait fait le reste. En revanche affirmer qu'ils venaient d'Irak, où l'embargo à l'encontre du régime de Saddam Hussein sévit toujours, était plus «crédible et plus jouable» auprès des autorités occidentales.

Autre peur qui expliquerait le mensonge: la crainte de représailles à l'encontre des familles restées en Syrie. Pour accentuer la pression sur les réfugiés, les passeurs leur ont confisqué leurs papiers d'identité. De fait, peu après le naufrage, les Kurdes se sont livrés à un récit tronqué face à la presse.

Par ailleurs, les conditions de l'arrivée sur les côtes françaises des Kurdes de l'East sea commencent à être mieux connues. Moyennant une somme allant de 2000 à 4000 dollars par personne, ils auraient quitté Damas en autobus et ont été acheminés vers Beyrouth, au Liban, où il seraient restés quelques jours avant de monter à bord du navire. Le bateau venait de Turquie où il aurait déjà embarqué des Kurdes irakiens. Les réfugiés de Syrie se seraient inspirés de leur histoire pour présenter leur version aux autorités françaises.



par Sylvie  Berruet

Article publié le 23/02/2001