Sida
Dr Aliou Sylla : «Le prix des médicaments, c'est 90 % du problème»
Aliou Sylla, médecin directeur du CESAC (Centre d'écoute, de soin, d'animation, de conseil pour les personnes vivant avec le VIH), un organisme géré par l'association Arcad, qui réunit des bénévoles, professionnels de santé, travailleurs sociaux et personnes touchées par les VIH, à Bamako au Mali, a une opinion tranchée sur le problème du prix des médicaments anti-sida en Afrique. Dans un état d'urgence sanitaire, il faut selon lui faire jouer rapidement la solidarité Nord-Sud pour que les malades africains puissent bénéficier des mêmes traitements que ceux des pays industrialisés. Car il n'y a pas «un sida du Nord et un sida du Sud».
RFI : Que pensez-vous du procès intenté par 39 laboratoires pharmaceutiques à l'Etat sud-africain?
Aliou Sylla : En tant que praticien, je suis confronté à des patients atteints du sida et je me sens impuissant car je ne peux pas prescrire de médicaments efficaces alors qu'ils existent. Cela me pose un problème sur le plan éthique. Les laboratoires pharmaceutiques ont, en effet, investi beaucoup pour la recherche et doivent rentabiliser cet investissement. Mais par rapport à cela, la vie n'a pas de prix. On a fait un plan Marshall pour l'Europe après la deuxième guerre mondiale. On pourrait en faire un autre pour que nous ayons accès aux médicaments anti-sida car les budgets de nos pays ne nous permettent pas de les acheter.
RFI : Quelles solutions préconisez-vous pour financer l'accès aux traitements en Afrique?
A.L: On compare le sida à une catastrophe naturelle, à une menace pour la sécurité, à un fléau mondial. Mais il n'y a pas un sida du Nord et un sida du Sud. C'est un problème unique. Et c'est ensemble que nous pouvons le résoudre. Humainement, on ne peut être satisfait de la situation actuelle. Aujourd'hui, les médicaments anti-sida sont vendus en Afrique à des prix exorbitants. Un traitement coûte, au Mali, 3500 francs français par mois. Vous connaissez nos PIB, les autres problèmes de santé que nous rencontronsà Nous avons déjà le poids de la dette à supporter. Les réductions de prix de 90 ou 95 % comme au Sénégal sont intéressantes mais l'idéal serait la gratuité totale car nous sommes dans un problème de survie. L'arrivée des médicaments génériques a eu un effet au niveau des prix, elle les a fait chuter. De ce point de vue, la concurrence c'est bien.
RFI : Que pensez-vous des importations de médicaments génériques pour contourner l'obstacle du prix des molécules vendues trop cher par les laboratoires?
A.L: C'est une alternative. On ne dirait pas non à condition qu'il y ait une garantie d'un contrôle de la qualité de ces médicaments. Mais j'ai l'impression que les gens se cachent la vérité. Les laboratoires qui fabriquent les génériques ne sont pas en mesure de copier toutes les molécules disponibles contre le sida. Se limiter à faciliter l'accès aux génériques reviendrait à accepter qu'il n'y ait pas d'équité entre les malades du Nord et ceux du Sud, à ce que les meilleurs médicaments soient pour le Nord et les génériques pour le Sud. Il faut les deux en Afrique, les génériques et les spécialités.
RFI : Un sommet sur l'accès aux médicaments génériques doit se réunir en mai à Ouagadougou, que peut-on en attendre?
A.L: Cette manifestation va aider à mobiliser, à faire prendre conscience du problème de l'accès aux médicaments. C'est un forum où l'on va débattre et où l'homme sera au c£ur du problème. On va pouvoir réfléchir notamment au fait que l'on peut fabriquer des génériques dans les pays africains.
RFI : Le prix des médicaments est-il le seul obstacle qui empêche de soigner les malades du sida en Afrique?
A.L: Le prix des médicaments représente 90 % du problème. Une initiative malienne pour faciliter l'accès aux antirétroviraux est en cours. Elle s'inspire de l'exemple sénégalais. Elle vise à assurer un meilleur dépistage, un conseil préalable. Mais disposer des médicaments faciliterait l'action des prestataires. L'accès aux médicaments débloquerait le reste. Cela permettrait, par exemple, d'améliorer le plateau technique qui fait défaut.
Aliou Sylla : En tant que praticien, je suis confronté à des patients atteints du sida et je me sens impuissant car je ne peux pas prescrire de médicaments efficaces alors qu'ils existent. Cela me pose un problème sur le plan éthique. Les laboratoires pharmaceutiques ont, en effet, investi beaucoup pour la recherche et doivent rentabiliser cet investissement. Mais par rapport à cela, la vie n'a pas de prix. On a fait un plan Marshall pour l'Europe après la deuxième guerre mondiale. On pourrait en faire un autre pour que nous ayons accès aux médicaments anti-sida car les budgets de nos pays ne nous permettent pas de les acheter.
RFI : Quelles solutions préconisez-vous pour financer l'accès aux traitements en Afrique?
A.L: On compare le sida à une catastrophe naturelle, à une menace pour la sécurité, à un fléau mondial. Mais il n'y a pas un sida du Nord et un sida du Sud. C'est un problème unique. Et c'est ensemble que nous pouvons le résoudre. Humainement, on ne peut être satisfait de la situation actuelle. Aujourd'hui, les médicaments anti-sida sont vendus en Afrique à des prix exorbitants. Un traitement coûte, au Mali, 3500 francs français par mois. Vous connaissez nos PIB, les autres problèmes de santé que nous rencontronsà Nous avons déjà le poids de la dette à supporter. Les réductions de prix de 90 ou 95 % comme au Sénégal sont intéressantes mais l'idéal serait la gratuité totale car nous sommes dans un problème de survie. L'arrivée des médicaments génériques a eu un effet au niveau des prix, elle les a fait chuter. De ce point de vue, la concurrence c'est bien.
RFI : Que pensez-vous des importations de médicaments génériques pour contourner l'obstacle du prix des molécules vendues trop cher par les laboratoires?
A.L: C'est une alternative. On ne dirait pas non à condition qu'il y ait une garantie d'un contrôle de la qualité de ces médicaments. Mais j'ai l'impression que les gens se cachent la vérité. Les laboratoires qui fabriquent les génériques ne sont pas en mesure de copier toutes les molécules disponibles contre le sida. Se limiter à faciliter l'accès aux génériques reviendrait à accepter qu'il n'y ait pas d'équité entre les malades du Nord et ceux du Sud, à ce que les meilleurs médicaments soient pour le Nord et les génériques pour le Sud. Il faut les deux en Afrique, les génériques et les spécialités.
RFI : Un sommet sur l'accès aux médicaments génériques doit se réunir en mai à Ouagadougou, que peut-on en attendre?
A.L: Cette manifestation va aider à mobiliser, à faire prendre conscience du problème de l'accès aux médicaments. C'est un forum où l'on va débattre et où l'homme sera au c£ur du problème. On va pouvoir réfléchir notamment au fait que l'on peut fabriquer des génériques dans les pays africains.
RFI : Le prix des médicaments est-il le seul obstacle qui empêche de soigner les malades du sida en Afrique?
A.L: Le prix des médicaments représente 90 % du problème. Une initiative malienne pour faciliter l'accès aux antirétroviraux est en cours. Elle s'inspire de l'exemple sénégalais. Elle vise à assurer un meilleur dépistage, un conseil préalable. Mais disposer des médicaments faciliterait l'action des prestataires. L'accès aux médicaments débloquerait le reste. Cela permettrait, par exemple, d'améliorer le plateau technique qui fait défaut.
par Propos recueillis par Valérie Gas
Article publié le 12/03/2001