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Syrie

Le chemin de Damas de Jean-Paul II

En se rendant en Syrie du 5 au 8 mai, Jean-Paul II achèvera son pèlerinage en Terre Sainte, un peu plus d'un an après ses visites en Egypte, en Jordanie, en Palestine et en Israël. A Damas, le souverain pontife renouera avec la tradition de Saint Paul, qui reçut la foi chrétienne alors qu'il se rendait dans la capitale syrienne pour y combattre les chrétiens.
De notre envoyé spécial en Syrie

Ultime étape de son voyage en Terre Sainte, la Syrie sera l'occasion pour Jean-Paul II de marcher sur les pas de Saül de Tarse devenu Saint Paul. C'est en effet sur le chemin de Damas que ce Juif citoyen romain, né vers l'an IX, reçut l'appel de Dieu qui lui dit : «Je suis ce Jésus que tu persécutes ; mais relève-toi, entre dans la ville et on te dira ce que tu dois faire». Trois jours durant, Paul resta aveugle puis fut guéri par Ananie, un disciple chrétien, qui le convertit aussitôt, selon les Actes des Apôtres. A Damas, le pape doit visiter deux lieux dédiés à l'apôtre, la Chapelle Saint Paul et le Mémorial Saint Paul, pour commémorer son action décisive d'évangélisation du monde.

Pour Mgr Diego Causero, nonce apostolique à Damas, «Saint Paul est la figure la plus importante des premières années de la chrétienté. C'est lui qui prit conscience de la mission universelle de l'Eglise qui ne concernait jusqu'alors que les Juifs de Palestine. La Syrie est aussi importante car c'est ici que les disciples de Jésus furent désignés sous le terme de chrétiens». Bref, alors que Pierre représente le fondateur et l'autorité de l'Eglise, Paul est considéré comme le missionnaire et le propagateur de la foi chrétienne dans le monde.
Mais Jean-Paul II doit également effectuer un geste £cuménique fort en direction des musulmans qui représentent 87% de la population syrienne. Le souverain pontife sera en effet le premier chef de l'Eglise dans l'histoire à pénétrer dans une mosquée, celle des Omeyyades, l'une des plus vénérée dans la monde islamique. Dans le vieux Damas, elle occupe l'emplacement d'un temple araméen, d'où s'éleva ensuite le temple romain de Jupiter, transformé à son tour en église dédiée à Saint Jean-Baptiste. Aujourd'hui, un tombeau abriterait, selon la tradition, la tête du prophète chrétien, vénéré aussi par les musulmans sous le nom de Yahya.

«Une prière commune avec les dignitaires religieux musulmans avait été prévue, mais devant certaines réactions hostiles, nous avons décidé de l'annuler pour ne pas créer de problème», explique Mgr Diego Causero. «Nous accueillons tout le monde ici quelle que soit sa religion et le pape est le bienvenu», affirme de son côté Cheikh Abdel Razak Al Halabi, recteur de la mosquée des Omeyyades depuis un demi-siècle.

Qounaitra, une étape «politique»

Enfin, le pape conclura son pèlerinage par une halte très symbolique à Qounaitra, ville fantôme du plateau du Golan, démolie par les Israéliens lors de leur retrait en 1974. De l'église orthodoxe Saint Georges, il ne reste que les façades externes et le plafond. Ce sont les autorités syriennes qui ont proposé cette visite au souverain pontife. Une étape éminemment politique au moment où la répression israélienne de l'Intifada ensanglante les Territoires palestiniens tandis que le Golan syrien reste toujours occupé. «Au cours de sa visite à Qounaitra, le pape ne prononcera aucun discours, précise Mgr Diego Causero. Il se recueillera en silence pour signifier que la guerre n'a jamais constitué une solution à quelque problème que ce soit.»

Pour les chrétiens de Syrie, la visite du pape est perçue comme une reconnaissance de leur existence. Forte d'environ 1,5 million d'âmes, dont 600 000 grecs-orthodoxes, la communauté chrétienne attend des signes d'espoir et d'encouragement de la part de Jean-Paul II. Même s'ils ne sont pas victime de discrimination - l'idéologie du régime syrien étant laïque-, les chrétiens immigrent chaque année, affaiblissant du même coup leur poids démographique en Syrie. «Depuis une quinzaine d'année, précise le père Métri Haji-Athanasiou, curé de l'église Notre-Dame de Damas, ils quittent le pays pour des raisons économiques et sociales et ne reviennent plus. Beaucoup ont des proches ou de la famille aux Etats-Unis, au Canada et en Europe, ce qui facilite leur départ.» Une hémorragie pour la Syrie où la convivialité inter-religieuse est une réalité de tous les jours.




par Christian  Chesnot

Article publié le 04/05/2001