Etats-Unis
Afrique: Bush joue la continuité
Le secrétaire d'Etat américain a entamé, mercredi 23 mai, son premier périple en Afrique, cinq mois après l'arrivée de George W. Bush à la Maison Blanche. Voyage qui doit le mener au Mali, en Afrique du Sud, au Kenya et en Ouganda. D'aucuns y voient le signe d'une poursuite de la politique africaine de Bill Clinton, après l'invitation lancée par George W. Bush à trente-cinq dirigeants africains pour un forum économique.
«Je tiens à ce que tout le monde comprenne que l'Afrique est importante», a souligné le secrétaire d'Etat américain, à la veille de sa première tournée africaine au sud du Sahara, entamée mercredi 23 mai par le Mali. En choisissant le continent noir pour son troisième périple hors des Etats-Unis - avant même l'Asie, qui figure au premier rang des partenaires économiques et stratégiques de Washington - Colin Powell confirme la volonté affichée à la Maison Blanche de ne pas délaisser cette partie du monde.
Depuis son arrivée au pouvoir, George W. Bush semble contredire ceux qui prédisaient une réorientation de la politique africaine des Etats-Unis. A la veille de son élection, le président américain avait montré une telle faiblesse en matière de politique étrangère, notamment à propos de l'Afrique, qu'on pouvait s'attendre à un recul par rapport à son prédécesseur. Chose rare pour un chef de l'Etat américain, Bill Clinton s'était découvert un réel intérêt pour ce continent, où il s'est rendu par deux fois au cours de son second mandat. Et si les retombées concrètes de ses voyages sont discutées, personne ne conteste que «Clinton l'Africain» avait ouvert la voie.
L'héritage de Bill Clinton
Sans le dire, George W. Bush ne fait rien d'autre que suivre sa trace, du moins à en juger ses premiers mois de présidence. A peine arrivé à la Maison Blanche, ce dernier a reçu les dirigeants du Rwanda, Paul Kagamé, et de RDC, Joseph Kabila, puis le chef de l'Etat nigérian Olusegun Obasanjo, devenu sous l'administration Clinton l'un des principaux alliés africains des Etats-Unis. Enfin le 16 mai dernier, «W» a invité les dirigeants de trente cinq pays africains à participer à un forum de deux jours à Washington, qui n'aura d'autre but que de stimuler les échanges entre les deux rives de l'Atlantique, sur la base de la Loi sur la croissance et les possibilités en Afrique (AGOA), chère à Bill Clinton, qui l'a promulguée l'année dernière.Le programme du voyage de Colin Powell, du 23 au 28 mai, illustre la continuité apparente entre les deux administrations. La première étape, au Mali, pays de l'aire francophone, confirme à la fois la volonté, déjà affichée du temps de Bill Clinton, d'ouverture à des pays non-anglophones et celle de soutenir les démocrates africains. Quant au thème qu'il a souhaité évoquer en priorité, les ravages du sida sur le continent, il était également particulièrement cher à l'ancien président américain.
Le choix du Mali, dont le chef de l'Etat Alpha Oumar Konaré est président en exercice de la Communauté économiques des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), correspond aussi à la volonté du secrétaire d'Etat d'aborder des problèmes régionaux, en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone. Colin Powell entend aussi marquer le soutien des Etats Unis aux entités régionales, comme la CEDEAO et la SADC (Communauté de développement de l'Afrique australe), et aux initiatives africaines de maintien de la paix. Echaudés par le fiasco somalien, en 1993, les Etats-Unis s'opposent désormais à l'envoi de troupes dans cette partie du monde et, comme la France, ont mis en place un programme d'aide au renforcement des forces africaines d'interposition. Colin Powell ne démentira certainement pas cette doctrine. Chef d'état-major des armées au moment de la catastrophique opération «Restaurer l'espoir», en Somalie, le secrétaire d'Etat fait depuis partie des tenants d'une intervention minimale des «boys» dans les conflits étrangers.
Les trois autres étapes de son périple sont tout aussi conformes aux intérêts américains au sud du Sahara. L'Afrique du Sud de l'après-apartheid est devenue un pilier essentiel de la politique africaine des Etats-Unis. Le Kenya accueille un grand nombre de sociétés américaines et se trouve au c£ur de d'une région, l'Afrique de l'Est, considérée de longue date comme stratégique à Washington. Enfin, l'Ouganda, conserve traditionnellement les faveurs de Washington. Mais l'évolution du contexte politique et militaire en République démocratique du Congo oblige les Etats-Unis à infléchir leur position vis-à-vis de Kampala, comme de Kigali. Colin Powell entend faire pression sur Yoweri Museveni pour qu'il retire entièrement ses troupes de RDC. Et en recevant à quelques jours d'intervalle Paul Kagamé et Joseph Kabila, au mois de février, George Bush avait déjà amorcé un recentrage, par rapport à l'administration Clinton, qui appuyait ouvertement le régime rwandais, depuis le début de la rébellion contre Laurent Désiré Kabila.
Comme toujours, la visite d'un secrétaire d'Etat américain en Afrique, de surcroît s'il est le premier Noir a occuper un poste aussi élevé, constitue aussi un appel du pied à la communauté afro-américaine (13% de la population) des Etat-Unis. Quant à savoir si son origine le rend forcément plus sensible au sort de l'Afrique, qu'on ne s'y trompe pas, la plupart des analystes s'accordent à dire que Colin Powell est avant tout américain, et entouré de tenants d'un conservatisme pur et dur. A commencer par son secrétaire d'Etat adjoint aux Affaires africaines, Walter H. Kansteiner. Ancien directeur des Affaires africaines au Conseil national de sécurité, il a longtemps travaillé pour une cabinet de consultants, fondé par Brent Scowcroft, ex-conseiller à la sécurité nationale de Bush père. Mais il est aussi l'auteur d'un ouvrage controversé, publié en 1988, soit deux ans avant la libération de Nelson Mandela, où il qualifiait les membres de l'ANC de «révolutionnaires violents, engagés dans une lutte injustifiée et marxiste contre le gouvernement sans le soutien du peuple».
Depuis son arrivée au pouvoir, George W. Bush semble contredire ceux qui prédisaient une réorientation de la politique africaine des Etats-Unis. A la veille de son élection, le président américain avait montré une telle faiblesse en matière de politique étrangère, notamment à propos de l'Afrique, qu'on pouvait s'attendre à un recul par rapport à son prédécesseur. Chose rare pour un chef de l'Etat américain, Bill Clinton s'était découvert un réel intérêt pour ce continent, où il s'est rendu par deux fois au cours de son second mandat. Et si les retombées concrètes de ses voyages sont discutées, personne ne conteste que «Clinton l'Africain» avait ouvert la voie.
L'héritage de Bill Clinton
Sans le dire, George W. Bush ne fait rien d'autre que suivre sa trace, du moins à en juger ses premiers mois de présidence. A peine arrivé à la Maison Blanche, ce dernier a reçu les dirigeants du Rwanda, Paul Kagamé, et de RDC, Joseph Kabila, puis le chef de l'Etat nigérian Olusegun Obasanjo, devenu sous l'administration Clinton l'un des principaux alliés africains des Etats-Unis. Enfin le 16 mai dernier, «W» a invité les dirigeants de trente cinq pays africains à participer à un forum de deux jours à Washington, qui n'aura d'autre but que de stimuler les échanges entre les deux rives de l'Atlantique, sur la base de la Loi sur la croissance et les possibilités en Afrique (AGOA), chère à Bill Clinton, qui l'a promulguée l'année dernière.Le programme du voyage de Colin Powell, du 23 au 28 mai, illustre la continuité apparente entre les deux administrations. La première étape, au Mali, pays de l'aire francophone, confirme à la fois la volonté, déjà affichée du temps de Bill Clinton, d'ouverture à des pays non-anglophones et celle de soutenir les démocrates africains. Quant au thème qu'il a souhaité évoquer en priorité, les ravages du sida sur le continent, il était également particulièrement cher à l'ancien président américain.
Le choix du Mali, dont le chef de l'Etat Alpha Oumar Konaré est président en exercice de la Communauté économiques des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), correspond aussi à la volonté du secrétaire d'Etat d'aborder des problèmes régionaux, en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone. Colin Powell entend aussi marquer le soutien des Etats Unis aux entités régionales, comme la CEDEAO et la SADC (Communauté de développement de l'Afrique australe), et aux initiatives africaines de maintien de la paix. Echaudés par le fiasco somalien, en 1993, les Etats-Unis s'opposent désormais à l'envoi de troupes dans cette partie du monde et, comme la France, ont mis en place un programme d'aide au renforcement des forces africaines d'interposition. Colin Powell ne démentira certainement pas cette doctrine. Chef d'état-major des armées au moment de la catastrophique opération «Restaurer l'espoir», en Somalie, le secrétaire d'Etat fait depuis partie des tenants d'une intervention minimale des «boys» dans les conflits étrangers.
Les trois autres étapes de son périple sont tout aussi conformes aux intérêts américains au sud du Sahara. L'Afrique du Sud de l'après-apartheid est devenue un pilier essentiel de la politique africaine des Etats-Unis. Le Kenya accueille un grand nombre de sociétés américaines et se trouve au c£ur de d'une région, l'Afrique de l'Est, considérée de longue date comme stratégique à Washington. Enfin, l'Ouganda, conserve traditionnellement les faveurs de Washington. Mais l'évolution du contexte politique et militaire en République démocratique du Congo oblige les Etats-Unis à infléchir leur position vis-à-vis de Kampala, comme de Kigali. Colin Powell entend faire pression sur Yoweri Museveni pour qu'il retire entièrement ses troupes de RDC. Et en recevant à quelques jours d'intervalle Paul Kagamé et Joseph Kabila, au mois de février, George Bush avait déjà amorcé un recentrage, par rapport à l'administration Clinton, qui appuyait ouvertement le régime rwandais, depuis le début de la rébellion contre Laurent Désiré Kabila.
Comme toujours, la visite d'un secrétaire d'Etat américain en Afrique, de surcroît s'il est le premier Noir a occuper un poste aussi élevé, constitue aussi un appel du pied à la communauté afro-américaine (13% de la population) des Etat-Unis. Quant à savoir si son origine le rend forcément plus sensible au sort de l'Afrique, qu'on ne s'y trompe pas, la plupart des analystes s'accordent à dire que Colin Powell est avant tout américain, et entouré de tenants d'un conservatisme pur et dur. A commencer par son secrétaire d'Etat adjoint aux Affaires africaines, Walter H. Kansteiner. Ancien directeur des Affaires africaines au Conseil national de sécurité, il a longtemps travaillé pour une cabinet de consultants, fondé par Brent Scowcroft, ex-conseiller à la sécurité nationale de Bush père. Mais il est aussi l'auteur d'un ouvrage controversé, publié en 1988, soit deux ans avant la libération de Nelson Mandela, où il qualifiait les membres de l'ANC de «révolutionnaires violents, engagés dans une lutte injustifiée et marxiste contre le gouvernement sans le soutien du peuple».
par Christophe Champin
Article publié le 23/05/2001