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Tchad

Victoire très contestée de Deby

Le président Idriss Deby a remporté son pari et a été réélu dès le premier tour pour un second et dernier mandat de cinq ans à la tête du Tchad, avec 67,3 % des suffrages, contre 13,9 seulement à Ngarlejy Yorongar.
Pas de surprise au Tchad. Idriss Deby a été réélu président dès le premier tour de dimanche 20 mars. Selon la Commission électorale nationale indépendante (CENI), son score est sans appel : 67,3% des voix contre 13,9 % seulement pour Ngarlejy Yorongar, de la Fédération action pour la République, et 6,5 pour Saleh Kabzabo (UNDR).

Cette victoire a été contestée par avance par les huit représentants de l'opposition qui ont décidé de quitter la CENI dès samedi dernier pour protester contre la «fraude massive» qui a ponctué ce scrutin mais aussi le dysfonctionnement de la Commission électorale. Auparavant tous les adversaires de Idriss Deby avaient eux aussi dénoncé les irrégularités de ce scrutin. «Cette mascarade d'élection donne des preuves suffisantes que la démocratie au Tchad n'est qu'un leurre» ont-ils déclaré dimanche après-midi. De son côté le ministre de l'intérieur a appelé la population au calme et «à s'abstenir de suivre ceux qui par tous les moyens cherchent à mettre le feu dans le pays».

La déroute du vétéran Abdelkader Kamougué

Depuis sa «marche sur N'Djaména» de 1989-90, Idriss Deby a abandonné l'uniforme militaire pour se transformer peu à peu en homme politique. Il a ouvert le Tchad à une forme très particulière de multipartisme «sous influence» à partir d'une conférence nationale et engagé le pays dans une «transition démocratique» qui lui a permis de remporter facilement les scrutins qu'il a organisé. Ces promesses sont nombreuses, mais les résultats tardent à arriver, tandis que de nombreux scandales éclatent autour de lui et de son régime, notamment autour du pétrole découvert à Doba (sud du Tchad) et à propos d'une affaire de fausse monnaie. Depuis octobre 1998 il doit faire face à une nouvelle rébellion dans le Tibesti. Comme si l'histoire pouvait se répéter, plus de trente ans après la première grande révolte du nord, sous la houlette du Frolinat, le Front de libération que dirigeait, en autre, Hissène Habré, le mentor politique de Idrisse Déby jusqu'en 1989.

La victoire annoncée de cet ancien pilote de chasse originaire de Fada (nord-est du Tchad) devenu commandant en chef des forces armées lorsqu'il a permis à Habré de chasser Goukouny Weddeye en 1982, a des allures de déroute pour un troisième personnage qui a accompagné l'histoire du pays depuis les années 70 : le «sudiste» Abdelkader Kamougué, président de l'Assemblée nationale, qui était arrivé second, il y a cinq ans, avec 30% des voix. Cette fois-ci il doit se contenter d'un modeste 5,1% qui l'écarte définitivement d'une présidence de la République qu'il a constamment recherché. Par tous les moyens.

Mais on peut penser que le président Deby tentera une fois de plus d'établir un véritable régime personnel basé sur une recomposition politique qui n'oubliera presque personne. Et ce d'autant plus que la manne pétrolière, vraie ou supposée, attise de nouveaux appétits et autorise d'autres grandes man£uvres politiciennes.



par Elio  Comarin

Article publié le 28/05/2001