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Tchad

La bipolarisation nord-sud se perpétue

Le chef de l'Etat sortant Idriss Deby et son principal opposant Ngarledgy Yorongar sont au coude-à-coude dans le dépouillement du premier tour de la présidentielle du 20 mai.
Surprise à N'Djamena à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle du 20 mai dernier : l'opposant sudiste qui se détache et qui peut mettre en ballottage le président sortant Idriss Deby n'est pas le vieux chef sudiste Wadal Abdelkader Kamougué comme en 1996, mais le bouillant Ngarledjiy Yorongar. Selon la CENI, la Commission électorale nationale indépendante, les premières tendances sur 20 des 29 départements du pays indiquent que MM. Deby et Yorongar devancent de loin les cinq autres candidats.

Saleh Kebzabo est actuellement en troisième position, mais loin derrière les deux champions. Au vu de ces tendances, Idriss Deby maintient ses positions de 1996 dans le Nord, notamment à Abéché et Faya, tandis que Ngarledji Yorongar perce dans le Sud, à Moundou et même à Sarh, la ville qui était acquise jusqu'à présent au général Kamougué. Saleh Kebsabo conserverait une partie de son fief du Mayo Kebi, dans le Sud-Ouest. Quant à la capitale, N'Djamena, elle se partagerait entre les quartiers Nord pro-Deby et les quartiers Sud pro-Yorongar.

Un réflexe ethnique

Première leçon : De nombreux Tchadiens ont conservé un réflexe ethnique. Les Nordistes ont massivement voté pour l'un des leurs, les Sudistes également. Le mur de méfiance hérité des années de guerre civile (1979-198O) n'est pas encore abattu entre les deux communautés ethnico-religieuses.

Deuxième leçon : Ce vote régionaliste s'est manifesté tout particulièrement chez les électeurs de Ngarledji Yorongar, le seul candidat qui propose le fédéralisme. Beaucoup de Sudistes espèrent en effet tirer un profit maximum de la future exploitation du pétrole de Doba à l'extrême-sud. Cependant, une partie de l'électorat sudiste a également porté ses suffrages sur le candidat Deby, preuve que l'idée nationale fait aussi son chemin.

Troisième leçon : Ce scrutin a été pour les cinq autres candidats de l'opposition un vote-sanction. Les partisans de l'opposition reprochaient à MM. Kebzabo, Kamougué, Kassiré, Alingué et Ibni Oumar d'avoir collaboré à un moment ou à un autre avec le régime. Ils ont préféré voter pour le seul candidat qui n'avait jamais fait de compromis avec le pouvoir actuel, M. Yorongar.

Il reste à connaître maintenant les résultats définitifs de ce premier tour. Idriss Deby, dont le parti MPS annonce déjà la victoire au premier tour avec plus de 60 % des voix, tentera-t-il de passer dès ce premier tour malgré les nombreuses accusations de fraude portées contre lui ? Ngarledji Yorongar, persuadé lui aussi qu'il a gagné, fera-t-il appel à la rue si jamais il n'y a pas de deuxième tour ? La CENI proclamera les résultats du premier tour ce dimanche 27 mai à 20 heures locales - 19 heures TU.



par Christophe  Boisbouvier

Article publié le 26/05/2001