Burundi
«La paix est impossible sans la RDC et la Tanzanie»
Le processus de paix s'enlise au Burundi, malgré les efforts de Nelson Mandela, rejoint récemment par le président gabonais Omar Bongo. Cela alors que le président Buyoya sort affaibli d'une tentative de coup d'Etat, au mois d'avril. Pour Fabienne Hara, analyste à l'International Crisis Group (ICG), et co-auteur d'un rapport intitulé Burundi: sortir de l'impasse, la médiation sud-africaine est dans l'impasse et seule une amélioration de la situation en RDC pourra amener la paix.
RFI: Où est en est le processus de paix ?
Fabienne Hara: La signature de l'accord d'Arusha, en août 2000, avait eu pour vertu de clore un cycle de négociations et de représenter une étape. La formule de ce processus de paix de l'avis général, ne portait pas ses fruits. Elle était inclusive de tous les partis politiques, c'est-à-dire à la fois les grands partis, l'Uprona et le Frodebu, mais aussi tous les petits partis politiques qui existent depuis 1992. Mais elle était exclusive des mouvements de rébellion sur le terrain. Cette formule avait atteint ses limites. Depuis, il y a eu énormément d'efforts de la part du médiateur Nelson Mandela, qui s'est engagé quand il a été nommé à faire aboutir un cessez-le-feu. Par ailleurs, il y a eu un accord pour continuer la négociation sur le leadership de transition.
RFI: Ces efforts ont-ils porté leurs fruits ?
FH: Sur le cessez-le-feu, il y a eu pas mal de rencontres en Afrique du Sud. Il y a eu énormément de contacts entre la médiation et les rebelles. Sans grands succès. Car il semble que la médiation sud-africaine n'a pas vraiment de stratégie pour faire entrer les rebelles dans le processus de paix, d'une part, et d'autre part, il y a un contexte régional qui a empêché jusqu'à aujourd'hui, l'aboutissement d'un cessez-le-feu.
RFI: Vous voulez parler de la guerre en RDC ?
FH: Oui. En septembre 2000, Laurent Désiré Kabila avait lancé une grande offensive à partir de Pweto (sud-est). Elle devait aboutir au Burundi. Elle a été cassée en plein élan, essentiellement par l'Armée patriotique rwandaises, le RCD-Goma, mais aussi quelques troupes burundaises, en décembre 2000. Cela a entraîné une infiltration massive de troupes rebelles vers l'Est du Congo et vers le Burundi. Et donc beaucoup de violence depuis le mois de décembre l'année dernière, avec notamment l'attaque de Kinama [dans la banlieue de Bujumbura], au mois de février.
RFI: Le pouvoir burundais n'est pas seulement menacé par les rebelles hutus. Il a également connu une tentative de coup d'Etat militaire au mois d'avril. Quelle portée faut-il donner à ce putsch manqué ?
FH: Il montre qu'il y a des divisions internes. Le pouvoir de Pierre Buyoya ne repose pas sur une base politique qui lui est entièrement dévouée. Il y a des divisions à l'intérieur même de l'armée. Tout cela révèle aussi la situation de blocage dans laquelle se trouve le processus de paix. Bien sûr, Buyoya y a sa part de responsabilité. Mais il représente également une espèce de bouc émissaire pour tous les partis politiques de même que pour des groupes de la société burundaise qui sont de plus en plus pauvres et supportent de moins en moins la violence. Il y a donc risque d'un départ de Buyoya dans la violence.
RFI: Est-ce que le processus de paix peut encore aboutir ?
FH: La condition pour s'en sortir est que la médiation reprenne une stratégie plus cohérente et plus unie. Il faut travailler à un front uni à la fois régional et international. Parce que aujourd'hui cela part un peu dans tous les sens. On a le médiateur francophone, le président gabonais Omar Bongo, qui s'agrège à la médiation sud-africaine. Ensuite, il faut absolument que la Tanzanie et la RDC voisines s'impliquent directement dans le processus de paix. Il n'y aura pas de paix sans un minimum de pression de ces deux parrains de la rébellion.
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Fabienne Hara: La signature de l'accord d'Arusha, en août 2000, avait eu pour vertu de clore un cycle de négociations et de représenter une étape. La formule de ce processus de paix de l'avis général, ne portait pas ses fruits. Elle était inclusive de tous les partis politiques, c'est-à-dire à la fois les grands partis, l'Uprona et le Frodebu, mais aussi tous les petits partis politiques qui existent depuis 1992. Mais elle était exclusive des mouvements de rébellion sur le terrain. Cette formule avait atteint ses limites. Depuis, il y a eu énormément d'efforts de la part du médiateur Nelson Mandela, qui s'est engagé quand il a été nommé à faire aboutir un cessez-le-feu. Par ailleurs, il y a eu un accord pour continuer la négociation sur le leadership de transition.
RFI: Ces efforts ont-ils porté leurs fruits ?
FH: Sur le cessez-le-feu, il y a eu pas mal de rencontres en Afrique du Sud. Il y a eu énormément de contacts entre la médiation et les rebelles. Sans grands succès. Car il semble que la médiation sud-africaine n'a pas vraiment de stratégie pour faire entrer les rebelles dans le processus de paix, d'une part, et d'autre part, il y a un contexte régional qui a empêché jusqu'à aujourd'hui, l'aboutissement d'un cessez-le-feu.
RFI: Vous voulez parler de la guerre en RDC ?
FH: Oui. En septembre 2000, Laurent Désiré Kabila avait lancé une grande offensive à partir de Pweto (sud-est). Elle devait aboutir au Burundi. Elle a été cassée en plein élan, essentiellement par l'Armée patriotique rwandaises, le RCD-Goma, mais aussi quelques troupes burundaises, en décembre 2000. Cela a entraîné une infiltration massive de troupes rebelles vers l'Est du Congo et vers le Burundi. Et donc beaucoup de violence depuis le mois de décembre l'année dernière, avec notamment l'attaque de Kinama [dans la banlieue de Bujumbura], au mois de février.
RFI: Le pouvoir burundais n'est pas seulement menacé par les rebelles hutus. Il a également connu une tentative de coup d'Etat militaire au mois d'avril. Quelle portée faut-il donner à ce putsch manqué ?
FH: Il montre qu'il y a des divisions internes. Le pouvoir de Pierre Buyoya ne repose pas sur une base politique qui lui est entièrement dévouée. Il y a des divisions à l'intérieur même de l'armée. Tout cela révèle aussi la situation de blocage dans laquelle se trouve le processus de paix. Bien sûr, Buyoya y a sa part de responsabilité. Mais il représente également une espèce de bouc émissaire pour tous les partis politiques de même que pour des groupes de la société burundaise qui sont de plus en plus pauvres et supportent de moins en moins la violence. Il y a donc risque d'un départ de Buyoya dans la violence.
RFI: Est-ce que le processus de paix peut encore aboutir ?
FH: La condition pour s'en sortir est que la médiation reprenne une stratégie plus cohérente et plus unie. Il faut travailler à un front uni à la fois régional et international. Parce que aujourd'hui cela part un peu dans tous les sens. On a le médiateur francophone, le président gabonais Omar Bongo, qui s'agrège à la médiation sud-africaine. Ensuite, il faut absolument que la Tanzanie et la RDC voisines s'impliquent directement dans le processus de paix. Il n'y aura pas de paix sans un minimum de pression de ces deux parrains de la rébellion.
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par Propos recueillis par Christophe CHAMPIN
Article publié le 15/05/2001