Liban
La Syrie montre sa «<i>capacité de nuisance</i>»
Au Liban-Sud, une attaque du Hezbollah a provoqué de violentes représailles israéliennes, immédiatement suivies d'une riposte du parti islamiste. Derrière cette escalade subite, il y a d'importants enjeux politiques: la Syrie veut rappeler sa «capacité de nuisance».
De notre correspondant au Liban
Les fameuses «règles du jeu» que le Premier ministre israélien Ariel Sharon s'est promis de changer à la frontière avec le Liban ont été vite rétablies par la Syrie. Après s'être abstenue de riposter à la destruction par l'aviation israélienne d'un poste radar de son armée au Liban le 15 avril dernier, Damas a choisi, cette fois, de riposter au bombardement d'une de ses positions dans la Békaa libanaise. L'équilibre de la terreur (attaques-représailles-ripostes), que l'on croyait rompu par un Sharon déterminé à ne pas se laisser entraîner dans le marécage libanais a donc été rétabli par une Syrie tout aussi déterminée à montrer que sa «capacité de nuisance» demeure intacte.
Tout a commencé vendredi dernier par une attaque du Hezbollah contre une position de Tsahal dans les fermes de Chébaa, à l'extrême sud-est du Liban qui a fait deux blessés dans les rangs israéliens. Dimanche, Israël, qui tient la Syrie responsable des actions du Hezbollah, lançait son aviation contre un poste-radar de l'armée syrienne dans la plaine de la Békaa, à moins de dix kilomètres de la frontière syrienne. Le site a été détruit et deux soldats syriens ainsi qu'un conscrit de l'armée libanaise ont été blessés. La riposte du Hezbollah ne s'est pas faite attendre. Immédiatement après le raid israélien, le parti intégriste a lancé en l'espace de 30 minutes plus de 80 projectiles contre trois positions israéliennes à Chébaa, concentrant ses tirs sur l'une d'entre elles : un poste radar. La canonnade a été accompagné et suivie de sérieuses mises en garde provenant tout aussi bien d'Israël que de la Syrie et du Hezbollah.
La Syrie redoute d'être marginalisée
Cette escalade subite provoquée par le Hezbollah est intervenue quelques jours après une visite du président Bachar el-Assad à Paris et une tournée du secrétaire d'Etat américain Colin Powell au Proche-Orient. Elle est survenue aussi au lendemain d'une promesse arrachée à Israël par le représentant de Kofi Annan, Stefan De Mistura, sur l'arrêt du survol des villes libanaises par l'aviation israélienne. Une mesure qui aurait grandement contribué à faire baisser la tension à la frontière libano-israélienne.
L'attaque du Hezbollah ne peut pas être dissociée de ce contexte politique. Contrairement à certaines analyses qui affirment que le Hezbollah a pris l'initiative d'attaquer l'armée israélienne sans obtenir au préalable le feu vert de Damas, la plupart des observateurs pensent que Damas a encouragé, voire commandité, la dernière action du parti islamiste. C'est la crainte de la Syrie d'être marginalisée qui l'a poussé à réchauffer le front du Liban-Sud. Lors de sa tournée au Proche-Orient, Colin Powell ne s'est pas rendu à Damas, préférant concentrer son énergie sur le volet israélo-palestinien. Or, la Syrie sait pertinemment qu'un éventuel règlement du conflit entre Israéliens et Palestiniens va reléguer aux oubliettes de l'histoire le cas du Golan que Damas veut à tout prix récupérer. En réchauffant le front du Liban-Sud, la Syrie veut montrer aux Etats-Unis et à Israël que sa «capacité de nuisance» demeure intacte et qu'une paix conclue sans elle peut difficilement aboutir.
L'attaque tombe aussi à point nommé pour le Hezbollah dont le nom a été mêlé récemment à un scandale financier et à un conflit social. Depuis sa fondation, il y a 20 ans, le Hezbollah s'est forgé l'image d'un parti intègre, évoluant au-dessus des magouilles politiques libanaises et consacrant toute son énergie à la lutte contre Israël. Mais voilà que son nom est mêlé à une affaire de piratage de communications téléphoniques internationales et à une manifestation violente des employés de la compagnie aérienne nationale qui protestaient contre une mesure de licenciements collectifs. L'attaque contre l'armée israélienne a permis au parti islamiste d'échapper aux sévères critiques dont il a fait l'objet en se présentant à nouveau comme un parti résistant.
Le réchauffement du front du Liban-Sud permet donc à chacun d'y trouver son compte. Seuls les civils craignent un embrasement généralisé qui risque de les jeter à nouveau dans les abris.
Les fameuses «règles du jeu» que le Premier ministre israélien Ariel Sharon s'est promis de changer à la frontière avec le Liban ont été vite rétablies par la Syrie. Après s'être abstenue de riposter à la destruction par l'aviation israélienne d'un poste radar de son armée au Liban le 15 avril dernier, Damas a choisi, cette fois, de riposter au bombardement d'une de ses positions dans la Békaa libanaise. L'équilibre de la terreur (attaques-représailles-ripostes), que l'on croyait rompu par un Sharon déterminé à ne pas se laisser entraîner dans le marécage libanais a donc été rétabli par une Syrie tout aussi déterminée à montrer que sa «capacité de nuisance» demeure intacte.
Tout a commencé vendredi dernier par une attaque du Hezbollah contre une position de Tsahal dans les fermes de Chébaa, à l'extrême sud-est du Liban qui a fait deux blessés dans les rangs israéliens. Dimanche, Israël, qui tient la Syrie responsable des actions du Hezbollah, lançait son aviation contre un poste-radar de l'armée syrienne dans la plaine de la Békaa, à moins de dix kilomètres de la frontière syrienne. Le site a été détruit et deux soldats syriens ainsi qu'un conscrit de l'armée libanaise ont été blessés. La riposte du Hezbollah ne s'est pas faite attendre. Immédiatement après le raid israélien, le parti intégriste a lancé en l'espace de 30 minutes plus de 80 projectiles contre trois positions israéliennes à Chébaa, concentrant ses tirs sur l'une d'entre elles : un poste radar. La canonnade a été accompagné et suivie de sérieuses mises en garde provenant tout aussi bien d'Israël que de la Syrie et du Hezbollah.
La Syrie redoute d'être marginalisée
Cette escalade subite provoquée par le Hezbollah est intervenue quelques jours après une visite du président Bachar el-Assad à Paris et une tournée du secrétaire d'Etat américain Colin Powell au Proche-Orient. Elle est survenue aussi au lendemain d'une promesse arrachée à Israël par le représentant de Kofi Annan, Stefan De Mistura, sur l'arrêt du survol des villes libanaises par l'aviation israélienne. Une mesure qui aurait grandement contribué à faire baisser la tension à la frontière libano-israélienne.
L'attaque du Hezbollah ne peut pas être dissociée de ce contexte politique. Contrairement à certaines analyses qui affirment que le Hezbollah a pris l'initiative d'attaquer l'armée israélienne sans obtenir au préalable le feu vert de Damas, la plupart des observateurs pensent que Damas a encouragé, voire commandité, la dernière action du parti islamiste. C'est la crainte de la Syrie d'être marginalisée qui l'a poussé à réchauffer le front du Liban-Sud. Lors de sa tournée au Proche-Orient, Colin Powell ne s'est pas rendu à Damas, préférant concentrer son énergie sur le volet israélo-palestinien. Or, la Syrie sait pertinemment qu'un éventuel règlement du conflit entre Israéliens et Palestiniens va reléguer aux oubliettes de l'histoire le cas du Golan que Damas veut à tout prix récupérer. En réchauffant le front du Liban-Sud, la Syrie veut montrer aux Etats-Unis et à Israël que sa «capacité de nuisance» demeure intacte et qu'une paix conclue sans elle peut difficilement aboutir.
L'attaque tombe aussi à point nommé pour le Hezbollah dont le nom a été mêlé récemment à un scandale financier et à un conflit social. Depuis sa fondation, il y a 20 ans, le Hezbollah s'est forgé l'image d'un parti intègre, évoluant au-dessus des magouilles politiques libanaises et consacrant toute son énergie à la lutte contre Israël. Mais voilà que son nom est mêlé à une affaire de piratage de communications téléphoniques internationales et à une manifestation violente des employés de la compagnie aérienne nationale qui protestaient contre une mesure de licenciements collectifs. L'attaque contre l'armée israélienne a permis au parti islamiste d'échapper aux sévères critiques dont il a fait l'objet en se présentant à nouveau comme un parti résistant.
Le réchauffement du front du Liban-Sud permet donc à chacun d'y trouver son compte. Seuls les civils craignent un embrasement généralisé qui risque de les jeter à nouveau dans les abris.
par Paul Khalifeh
Article publié le 02/07/2001