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Afrique du Sud

Basson nie avoir empoisonné des <br> combattants de la Swapo

Au dernier jour de sa déposition, lundi 30 juillet, l'ancien chef des laboratoires militaires du régime d'apartheid, Wouter Basson, a nié avoir empoisonné des opposants de la Swapo. Mais le «Docteur la Mort» a admis avoir confectionné des armes secrètes, comme des parapluies empoisonnés.
«Je n'ai jamais reçu une telle requête et je n'ai jamais fourni de telles substances», a affirmé Wouter Basson, qui a dirigé pendant dix ans (1982-1992) les laboratoires militaires du régime d'apartheid sud-africain, spécialement chargé du programme d'armement chimique. Un démenti catégorique de la part de celui qu'on surnomme le «Docteur la Mort», et qui comparaît depuis octobre 1999 pour 46 chefs d'accusation allant du meurtre au trafic de drogue, en passant par diverses formes de fraude.

Devant la Haute Cour de Pretoria, Basson a contré point par point les accusations portées contre lui par l'un des principaux témoins à charge, l'ancien agent des forces spéciales Johan Theron. Ce dernier avait raconté à la barre, en mai 2000, comment il avait exécuté des dizaines d'opposants au régime avec des substances élaborées par Wouter Basson. Il s'agissait, selon lui, de poisons provoquant une mort lente par «asphyxie» des muscles, injectés directement dans le c£ur de la victime selon un procédé dont Basson lui avait fait la démonstration sur des guérilleros de la Swapo, une organisation anti-apartheid basée en Namibie.

«Je n'avais aucune raison de fournir des poisons à Theron, et je ne l'ai jamais fait». Niant tout en bloc sur ce volet de son lourd dossier, Basson a affirmé, tout en reconnaissant l'existence de ce type d'«armes», n'avoir jamais été directement impliqué dans ces opérations. A fortiori, il n'a jamais montré à Theron comment s'y prendre pour injecter un produit mortel.

Parapluies empoisonnés

Dans un plaidoyer alliant arrogance et cynisme, il a d'ailleurs expliqué que l'utilisation de ce genre de méthode aurait été bien inutile. Pourquoi tuer des ennemis par étouffement des muscles, ce qui prendrait de longues minutes, plutôt qu'avec du cyanure, un produit à l'action quasi-immédiate? Surtout, a-t-il, expliqué, si les corps devaient ensuite être embarqués dans un avion puis jetés au dessus de la mer, à 4000 m d'altitude. Compte tenu de la vitesse de chute, les cadavres se seraient alors écrasés et se «seraient brisés en morceaux» contre une eau devenue dure comme du béton. Enfin, dans ce qui se veut un ultime argument, Basson admet que cela ne lui aurait, de toute façon, posé aucun problème de conscience, puisque ces substances, qui existaient bel et bien, «étaient produites comme n'importe quelle arme».

En revanche, Basson a reconnu avoir fourni des instruments mortels à l'armée sud-africaine, des gadgets destinés à l'assassinat d'opposants. Ainsi, des tournevis ou des parapluies empoisonnés permettant de tuer la victime par surprise, au milieu d'une foule. Ou des produits soporifiques pour faciliter des enlèvements. Il a également admis avoir donné aux Forces spéciales des pilules de cyanure permettant à leurs agents de pouvoir se donner la mort, au cas où ils auraient été faits prisonniers. Comparaissant libre au procès, Basson (51 ans) plaide non coupable. Au terme d'une déposition de six jours, il devait subir, à partir de ce mardi, un contre-interrogatoire.



par Philippe  Quillerier-Lesieur

Article publié le 31/07/2001