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Eglise catholique

Le Pape appelle chrétiens et musulmans à l'unité

En visite au Kazakhstan, Jean Paul II a exhorté les chrétiens et les musulmans à s'unir dans la prière au moment où la tension monte en Asie centrale après les attentats aux Etats-Unis et les menaces de représailles américaines.
De notre correspondant à Rome

«De ce lieu, j'invite chrétiens et musulmans à élever une prière à l'unique Dieu tout-puissant, dont nous sommes tous les fils, afin que le grand don de la paix puisse régner dans le monde». Cet appel lancé par Jean Paul II dimanche midi, au terme de la messe célébrée dans le centre d'Astana, la capitale du Kazakhstan, était lourd de sens pour les quelques dizaines de milliers de personnes présentes. Beaucoup de catholiques, naturellement, appartenant à cette communauté d'environ 300 000 fidèles qui jouissent, depuis l'indépendance du pays il y a dix ans, d'une liberté religieuse retrouvée. Mais il y avait aussi beaucoup de musulmans kazakhs, venus avec curiosité accueillir le Pape.

«J'ai vu à la télévision le Pape qui entrait pour la première fois dans une mosquée», confiait un étudiant musulman, «alors je me suis dit que je devais venir le voir et l'écouter». Une référence à la visite de Jean Paul II à Damas, au printemps dernier. Tout le pontificat, à dire vrai, n'aura été qu'une succession de gestes symboliques de ce genre, qu'il s'agisse de la grande rencontre inter religieuse d'Assise en 1986, ou encore de la rencontre avec les jeunes Marocains au stade de Casablanca, en 1985. A Astana, Jean Paul II a réitéré son message : «Nous ne devons pas laisser les événements qui se sont produits nous diviser davantage. La religion ne doit jamais être utilisée pour attiser des conflits». L'intention est claire : délégitimer tout appel à la guerre sainte, toute opposition entre peuples, entre civilisations.

«Grâce à Dieu, je suis là»

Compte tenu de la conjoncture internationale, et de la position géographique du Kazakhstan à quelques centaines de kilomètres de l'Afghanistan, ce voyage a ainsi pris une dimension inattendue. Jusqu'à la dernière minute, d'ailleurs, le vol du Pape a été incertain. C'est Jean Paul II lui-même, manifestement de plus en plus fatigué mais encore assez vif d'esprit pour improviser quelques mots des plus significatifs, qui l'a révélé durant sa rencontre avec Noursoultan Nazarbaiev, le président kazakh : «certains disaient que ce voyage n'était pas possible à cause des événements tragiques (survenus aux USA). On a vu que c'était possible et grâce à Dieu, je suis là!».

Pendant que le Pape poursuit ainsi son pèlerinage, la diplomatie vaticane s'active et fait savoir à toutes les chancelleries qu'une guerre, au sens propre du terme, pourrait avoir des conséquences imprévisibles. A l'instar de ce que fut la position du Pape durant la guerre du Golfe, le Vatican craint une réaction en chaîne incontrôlable, tout en considérant une riposte américaine comme légitime. Les responsables au sein de la Curie romaine chargés du dialogue avec l'Islam ont, dès les attentats du 11 septembre, maintenu le contact avec leurs interlocuteurs. Le Pape lui-même est heureux d'avoir pu réaliser ce voyage qui offre un nouveau signe de dialogue.

Avant de quitter le Kazakhstan, Jean Paul II a apporté son soutien à la petite minorité catholique, invitant les fidèles à poursuivre leurs efforts dans la reconstruction de leur communauté décimée par les persécutions sous le régime soviétique. «L'Eglise ne souhaite pas imposer sa foi aux autres», a déclaré lundi le Pape, en signe d'apaisement vis-à-vis de l'importante communauté orthodoxe qui accuse régulièrement les institutions catholiques de prosélytisme.

Devant des prêtres, des religieuses et des religieux venus des cinq Etats d'Asie centrale, Jean Paul II a rendu hommage à tous les croyants victimes de la «répression communiste», à «tous ceux qui ont souffert non seulement de l'exil et de la prison, mais aussi de l'opprobre et de la violence pour ne pas avoir renoncé à leur foi». Le Pape est à présent attendu mardi à Erevan, en Arménie. Un pays majoritairement chrétien qui célèbre cette année le 1700e anniversaire de son baptême. Dans une région, le Caucase, elle aussi en quête d'une stabilité que les récents événements rendent encore plus incertaine.



par Laurent  Morino

Article publié le 24/09/2001